
Les 20 et 21 juillet 1921, une poignée d'aviateurs américains menés par Billy Mitchell avait en effet effectué des tests de bombardement sur le cuirassé allemand Ostfriesland, un dreadnought de 25 000 tonnes ramené aux États-Unis comme prise de guerre (1)
Et les dits essais s'étaient avérés pour le moins... percutants : pris pour cible dans la matinée du 20 juillet par une dizaines de bombes de 200 à 600 livres, le grand cuirassé avait commencé à accuser des voies d'eau impossibles à combattre et à colmater sur ce navire dépourvu d'équipage
Aux premières heures du lendemain, des bombes de 1 000 livres avaient provoqué de nouvelles avaries, mais le clou du spectacle s'était produit aux alentours de midi, avec l'apparition de six Martin MB2 chargés chacun d'une bombe de 2 000 livres qui, à défaut d'aller au but, avaient provoqué de telles ondes de choc qu'elles avaient fait disparaître l'Ostfriesland en moins de 20 minutes !
Si les aviateurs du monde entier en étaient ressortis avec la conviction que plus aucun navire de guerre, quelle que fut sa taille, n'était désormais à l'abri de leurs attaques, les marins étaient demeurés beaucoup plus circonspects (2) mais n'en avaient pas moins commencé à installer des canons antiaériens et de multiples plaques de blindage supplémentaires sur tous leurs bâtiments.
A la fin de 1924, le Warspite va donc lui aussi bénéficier de ces mesures mais à ce petit jeu, les cuirassés du monde entier, déjà quasiment à la limite de leur potentiel de développement, partent cependant perdant face à l'avion, qui vient d'entrer dans l'adolescence.
Et la partie est d'autant plus mal engagée que les cuirassés abritent un traître parmi eux...
(1) demeuré en Allemagne jusqu'en avril 1920, l'Ostfriesland avait échappé au sort des autres cuirassés de la Hochseeflotte contraints d'aller se faire interner, puis de se saborder, à Scapa Flow.
(2) les marins avaient fait observer, non sans raison, que si l'Ostfriesland avait été doté d'un équipage, et de canons antiaériens, aucun des lourds et lents MB2 de Mitchell ne serait parvenu à en réchapper, et aussi que s'il avait été capable de manoeuvrer à grande vitesse au lieu demeurer immobile sur l'eau, aucune bombe ne l'aurait probablement atteint.