samedi 31 décembre 2022

7430 - une diversion malgré tout

Cadavres de soldats japonais, à l'embouchure de la Matanikau. Notez lez tanks à l'arrière-plan
... Henderson Field, 24 octobre 1942, 19h00 

Ironiquement, le seul bénéfice de cette sanglante attaque de diversion lancée 24 heures trop tôt est d'avoir effectivement réussi à attirer l'attention des Américains sur la Matanikau, vers laquelle ils expédient, dans la matinée du 24 octobre, le 2ème Bataillon du 7ème Marines, jusque-là stationné au Sud de Henderson Field !

De facto, le 1er Bataillon, soit environ 700 hommes, se retrouve donc seul à défendre le secteur de plus de deux km, s'étendant du sud-est de Henderson Field jusqu'à la rivière Lunga, déjà théâtre des combats du mois de septembre.

Et preuve de l'habileté nippone en matière de discrétion et de camouflage, les hommes du 1er Bataillon n'ont toujours pas réalisé que des soldats japonais au moins six fois plus nombreux qu'eux ne se trouvent plus qu'à quelques km de là !

L'attaque japonaise doit débuter à 19h00, mais alors que les hommes de Maruyama entament leur approche finale à travers la jungle, l'orage se déchaîne !

Des pluies diluviennes s'abattent sur les malheureux soldats nippons qui, dans l'obscurité totale, avaient déjà bien du mal à se frayer un passage, et à s'orienter, à travers la végétation.

En quelques minutes, des dizaines puis des centaines d'hommes se retrouvent complètement perdus dans la jungle, coupés les uns des autres et surtout de leur commandement.

L'attaque japonaise vient - littéralement - de tomber à l'eau...

vendredi 30 décembre 2022

7429 - un premier carnage

Les arcasses des chars légers, à l'embouchure de la Matanikau, octobre 1942
... embouchure de la Matanikau, Guadalcanal, 23 octobre 1942

Au crépuscule du 23, dans l'ignorance de ce nouveau changement d'horaire, tanks et fantassins se lancent donc à l'attaque... pour être aussitôt cueillis par des dizaines d'obusiers, de mitrailleuses et de canons anti-tanks américains.

Sur le Front européen, le canon M3 de 37mm est tout juste bon à écorner la peinture d'un char Tiger, mais dans le Pacifique, contre les chars légers japonais et leur blindage en fer blanc, l'arme fait des ravages : en quelques minutes, l'intégralité des tanks n'est plus que ferraille calcinée.

Et les fantassins nippons ne sont pas plus heureux : fauchés par rangs entiers à la mitrailleuse, et écrasés par des centaines d'obus, ces derniers n'ont finalement d'autre choix que de refluer par où ils sont venus.

Ce n'est pas une bataille, mais un massacre, et surtout un massacre à sens unique qui, malheureusement pour le Soleil Levant, préfigure la suite des évènements.

Les échos du carnage ne troublent pourtant pas Sumiyoshi, et encore moins  Hyakutake, qui semble ne toujours pas réaliser qu'il n'est plus en Chine et confronté aux pitoyables soldats démotivés et sous-équipés de Tchang Kaï-chek.

Comme si rien ne s'était passé, l'attaque principale, et celle de diversion, vont donc être lancées le lendemain, donc conformément au plan initial, et avec le soutien de divers bâtiments de la Marine impériale, mais aussi d'appareils partis de Rabaul et même des porte-avions Junyō et Hiyō (1), signe qu'à Truk, l'amiral Yamamoto - nous y reviendrons - est bien résolu à en finir une fois pour toutes...

(1) nés paquebots, les Junyō et Hiyō avaient été convertis en porte-avions peu avant la guerre

jeudi 29 décembre 2022

7428 - la Piste Maruyama

Patrouille de soldats américains près de la Matanikau, 19 octobre 1942
... cheminer et s'orienter dans une jungle n'est pas une chose facile, a fortiori lorsqu'on doit, en plus, pousser ou tirer un canon de campagne, un mortier ou de lourds équipements, ce pourquoi le 12 octobre, Maruyama a-t-il ordonné à ses pionniers de tracer une piste - la Piste Maruyama - courant de la Matanikau jusqu'au Sud de Henderson Field.

Travaillant comme des forçats, sous une humidité accablante, et prenant grand soin d'échapper aux reconnaissances aériennes américaines, ceux-ci ont fini par dégager un chemin vaguement praticable d'une vingtaine de km de long, que les premières unités japonaises commencent à emprunter à partir du 16.

Le 20, Maruyama lui-même atteint la Lunga. S'estimant à environ 6 km au Sud de l'aérodrome, et se donnant le temps de rassembler ses forces, il fixe le déclenchement de l'attaque pour la soirée du 22... avant de se rendre compte qu'il s'est totalement mépris sur sa position, et qu'il se trouve encore à près de 15 kn de Henderson Field !

Du coup, voilà donc l'attaque reportée à la soirée du 23... puis du 24, tant de nombreuses unités, encore occupées à patauger dans les marais et à se battre avec la végétation, manquent toujours à l'appel !

La nouvelle de ce deuxième report est donc transmise à Hyakutake et, à travers lui, à Sumiyoshi dont les troupes, comme nous l'avons vu, doivent lancer une attaque de diversion le long du littoral, à l'Est de la Matanikau.

Mais à cette époque qui précède l'invention du transistor, les communications japonaises sont aussi rudimentaires qu'aléatoires et, malheureusement pour eux, deux bataillons de Sumiyoshi, et surtout la dizaine de tanks péniblement acheminés sur place, ne sont pas informés de ce nouveau changement d'horaire...

mercredi 28 décembre 2022

7427 - deux voies possibles

Schéma de l'attaque japonaise : Sumiyoshi attaque vers l'Esrt et Maruyama depuis le Sud
... pour rallier Henderson Field depuis la rive ouest de la Matanikau, où Hyakutake a rassemblé ses forces, il n'existe que deux voies terrestres.

La plus simple, et la plus rapide, est de marcher plein Est en longeant la bande côtière, ce qui implique hélas de progresser à découvert, donc au vu et au su de  l'Aviation américaine, et surtout de s'affranchir de la longue ligne de défenses que les Américains, grâce aux renforts qu'ils ont eux-mêmes reçus, sont parvenus à établir jusqu'à la rive orientale de la Matanikau.

La seconde solution est de s'imposer un fort long et pénible détour à travers la jungle, jusqu'à ce qu'on soit en mesure de lancer une attaque depuis le Sud de l'aérodrome,... comme l'avait précisément fait Kawagushi lors de ses deux tentatives des 12 et 13 août.

Après réflexion, Hyakutake a décidé... de faire les deux en même temps ou, plus exactement, de lancer une vaste attaque de diversion à l'Est, au moyen des 3 000 hommes du général Tadashi Sumiyoshi, tandis que le corps de bataille principal, commandé par le général Masao Maruyama, et fort d'environ 10 000 hommes, traversera quant à lui la jungle et attaquera Henderson Field par le Sud.

Tactiquement, le plan a du sens, mais compte tenu de l'insigne faiblesse des moyens de communication japonais, il sera à l'évidence extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, de coordonner les initiatives de deux formations aussi largement séparées l'une de l'autre et manœuvrant dans deux directions différentes.

Surtout, la malheureuse expérience de Kawagushi a elle-même déjà prouvé à quel point il est difficile de s'orienter dans une jungle aussi dense et hostile que celle de Guadalcanal, puis de faire en sorte que chaque unité, épuisée par son interminable marche, se retrouve pile au bon moment et exactement à l'endroit prévu pour l'attaque !

La longue et tragique Histoire des guerres a également amplement démontré que tout plan de bataille qui n'accorde aucune place aux aléas et aux retards, et qui suppose au contraire que tout, en ce et y compris les réactions de l'adversaire, se déroulera tel que prévu, est pour ainsi dire condamné par avance à échouer.

Et c'est exactement ce qui va se produire...

mardi 27 décembre 2022

7426 - la constante de la sous-estimation

Patrouille de Marines sur la rivière Tenaru : la jungle, toujours la jungle...
... et Dieu sait que Vandergrift, à Guadalcanal, a besoin de tout le soutien, et de tous les renforts, disponibles !

Entre le 1er et le 17 octobre, pas moins de 15 000 soldats nippons ont en effet débarqué sur l'île. En y ajoutant les rescapés des semaines précédentes, dont beaucoup sont cependant en fort mauvais état, le général Hyakutake, qui a lui-même pris la tête des opérations, possède maintenant près de 20 000 hommes, soit trois fois plus que Kawagushi à la mi-septembre, et... vingt fois plus qu'Ichiki à la mi-août !

Mais le problème, c'est que le commandement japonais continue de sous-estimer  les effectifs de l'adversaire : s'il les évalue aujourd'hui "à environ 10 000 hommes", ces derniers, qui n'ont également cessé de recevoir des renforts, sont en réalité... 23 000, soit deux fois plus qu'au début du mois d'août !

Dans le camp japonais, chacun, Hyakutake le premier, continue de miser sur le "courage supérieur", pour ne pas dire le fanatisme, du soldat nippon, mais la longue et triste Histoire des guerres a néanmoins amplement démontré qu'à armes égales, l'assaillant, confronté à un adversaire retranché sur des positions défensives, et résolu à se battre, doit presque toujours disposer d'effectifs largement supérieurs à ce dernier s'il espère l'emporter.

Au début de la guerre, et que ce soit en Chine, en Birmanie, à Singapour ou encore aux Philippines, l'armée japonaise a certes à chaque fois triomphé d'ennemis supérieurs en nombre, et parfois largement, mais ces derniers étaient le plus souvent des soldats de seconde voire de troisième ligne, nullement préparés au combat, souvent démoralisés, mal commandés, privés de tout soutien aérien, et de toute manière très vite coupés de toute source de ravitaillement.

A Guadalcanal, Hyakutake et ses hommes vont en revanche devoir affronter un adversaire d'une toute autre nature, désormais aguerri, combatif, bien commandé, disposant de sa propre Aviation, d'une bonne quantité de canons, de munitions et même de tanks, et bientôt, en particulier grâce à Halsey, d'une logistique sans commune mesure avec la leur...

lundi 26 décembre 2022

7425 - le "style Halsey"

Halsey, prêtant officiellement serment comme commandant du COMSOPAC, novembre 1942
... Nouméa, 23 octobre 1942

Aussi doué soit-il, aucun entraîneur ne pourrait cependant gagner des matchs, ni a fortiori le championnat, en se fiant uniquement au moral des joueurs et des spectateurs, ce pourquoi il importe de renforcer l'équipe par tous les moyens possibles, en ce compris les moins usuels.

Mais il importe aussi, et dans un premier temps, de faire mieux connaissance avec les joueurs actuels, ainsi qu'avec les difficultés auxquels ils sont confrontés.

Le 23 octobre, à Nouméa, Halsey a donc convoqué le général Vandergrift, qui commande les Marines à Guadalcanal, et le contre-amiral Turner qui, comme nous l'avons vu, continue d'éprouver toutes les peines du monde à ravitailler ces derniers.

- "Pouvez-vous oui ou non tenir ?", demande subitement Halsey à Vandergift
- "Oui, mais j'ai besoin de plus de soutien que je n'en reçois !"
- "Rentrez à Guadalcanal, je vous promets de vous envoyer tout ce que j'ai"

A lui seul, ce dialogue résume le "style Halsey", qui va droit à l'essentiel et ne s'embarrasse d'aucune fioriture.

Mais la parole ne vaudrait rien si elle se ne traduisait pas ensuite en actes, ce pourquoi Halsey, grattant les fonds de tiroirs ici, annulant telle ou telle opération là-bas, va s'ingénier dans les jours suivants à réellement envoyer au général tous les moyens dont il dispose,... quitte à rompre radicalement avec les traditions les mieux établies

Ainsi, au commandant d'une division d'Infanterie fraîchement arrivée dans le Pacifique Sud et qui se déclare "prêt à aller n'importe où"... à condition néanmoins de se voir octroyer trois semaines pour décharger son matériel et préparer ses troupes, Halsey se contente de s'esclaffer avant de lui signifier "votre division part pour Guadalcanal demain..." (1)

(1) Wikovits, op cit. page 100

dimanche 25 décembre 2022

7424 - l'électrochoc

Halsey, à gauche, sur le Nassau, dans le port de Nouméa, 23 décembre 1942
... et comme souvent dans le monde merveilleux du football professionnel, l'annonce du remplacement de Ghormley par Halsey a un effet immédiat sinon sur le résultat du match, du moins sur le moral de l'équipe !

Et c'est particulièrement vrai à Guadalcanal "Je ne l'oublierai jamais", soulignera un lieutenant, "l'instant d'avant, nous étions trop affaiblis par la malaria pour ramper hors de nos trous; l'instant d'après nous courions dans tous les coins en hurlant comme des gamins (...) S'il n'en avait tenu qu'au moral, nous aurions gagné la guerre à l'instant !"

"L'effet sur les gens de la flotte et sur ceux à terre, à Guadalcanal, fut électrisant", commentera plus sobrement un correspondant de guerre. "Halsey a la réputation d'être l'amiral le plus combatif de la Navy" (1)

Même le général MacArthur, pourtant rival de la Navy, et en conséquence de Halsey luiu-même, ne tarit pas d'éloges, comparant l'intéressé à rien moins que "John Paul Jones (2), David Farragut (3) ou George Dewey (4)" et soulignant que Halsey, contrairement à tant d'autres marins, "n'est pas hanté en permanence par la crainte de perdre des bâtiments".

Mais si le moral est revenu au sein de l’équipe, et chez les spectateur aux États-Unis, reste néanmoins à ramener l’essentiel, c-à-d des victoires qui permettront un jour de remporter le titre…

(1) Wikovits, op cit, page 97
(2) héros de la Guerre d'Indépendance des États-Unis
(3) commandant-en-chef de la Navy durant la Guerre de Sécession
(4) vainqueur de la Bataille de Manille contre les forces espagnoles en 1898

samedi 24 décembre 2022

7423 - "Vous prendrez immédiatement le commandement de la Zone du Pacifique Sud et des Forces du Pacifique Sud"

Halsey, à gauche, et Vandergrift, à Nouméa, janvier 1943
... Nouméa, 18 octobre 1942

Nommé, à la mi-septembre, commandant-en-chef d'une Task Force articulée autour d'un porte-avions - l'Enterprise - condamné à demeurer au port pour plusieurs semaines encore, Halsey a décidé, histoire de se familiariser avec les changements qui se sont produits dans le Pacifique durant son absence, de profiter de son temps libre pour effectuer une sorte de "tournées des popotes".

Mais alors que son hydravion se prépare à décoller de l'île de Kanton (1) à destination de Guadalcanal, prochaine étape de son parcours, un télégramme de Nimitz lui enjoint de se dérouter immédiatement vers Nouméa, quartier-général du COMSOPAC.

Et rendu à Nouméa, alors que l'hydravion termine à peine son hydroplanage, Halsey a la surprise de voir qu’il est manifestement attendu avec impatience, puisqu’une baleinière se détache aussitôt du quai pour se diriger dans sa direction.

A bord de l'embarcation, le capitaine de pavillon de l'amiral Ghormley lui tend une enveloppe scellée, contenant... une autre enveloppe scellée, frappée d'un imposant tampon "Secret".

Le contenu de la missive tient pourtant en une seule phrase.

"Vous prendrez immédiatement le commandement de la Zone du Pacifique Sud et des Forces du Pacifique Sud. - Nimitz"

Ghormley, bien sûr, a déjà été avisé de son limogeage, mais bien que nécessairement malaisante - l'intéressé est un ancien camarade d'Académie et son remplacement précipité peut difficilement passer pour une promotion - la passation de pouvoirs qui s’ensuit s’effectue néanmoins en bonne intelligence, et laisse ensuite Halsey avec, comme il l’exprimera à son aide-de-camp, “la patate la plus chaude qu’ils m’aient jamais refilée”...

(1) aujourd'hui Abariringa, îles Phoenix

vendredi 23 décembre 2022

7422 - passer de la passerelle au bureau

Halsey, sur le cuirassé Missouri, en avril 1945
... car Halsey, jusqu’ici, n'a jamais brillé - et c’est un euphémisme ! - derrière un bureau !

C'est en effet un marin-né, qui n’aime rien tant que commander ses porte-avions à la mer, rôle dans lequel il excelle et pour lequel Nimitz l’a d’ailleurs rappelé après sa maladie.

A l'instar d'un Ulysses S. Grant, à qui le Président Lincoln avait finalement confié les rênes de l'Armée de l'Union, Halsey déteste la bureaucratie, la routine, les plans de bataille élaborés, mais aussi le manuel-du-parfait-soldat, et même celui du savoir-vivre : en juin 1940, promu responsable des porte-avions et forces aéronavales du Pacifique, son premier geste a été de faire disparaître des étagères la quasi-totalité des manuels d'opérations, dont beaucoup dataient il est vrai d'avant la 1ère G.M., puis de limoger, parfois brutalement, tous les subordonnés qui, à ses yeux, se montraient trop prudents, trop hésitants, ou qui ne faisaient tout simplement pas preuve de suffisamment d'initiative à son goût.

Pour Halsey, un commandant, sur son navire en mer, sera toujours mieux à même d'apprécier la situation, et de prendre les bonnes décisions, que son supérieur, dans son bureau à terre, et depuis le début de sa longue carrière, Halsey ne s'est jamais privé "d'interpréter", et parfois très largement, les ordres reçus,... et à aller bien au-delà de ce qu'ils stipulaient : en mai 1939, alors que ses ordres lui enjoignaient simplement de soutenir, avec ses porte-avions, un exercice de débarquement sur les plages de Californie, il a plutôt décidé d'envoyer ses aviateurs "bombarder" avant l'aube,... la base de l'Army Air Force qui, selon le scénario de l'exercice, devait en principe s'opposer quelques heures plus tard au dit débarquement !

Comment un tel homme pourra-t-il s’accommoder d’un poste, celui de commandant-en-chef d'un théâtre d'opérations aussi vaste que le Sud du Pacifique, qui le contraindra justement... à demeurer en permanence très loin des combats, et à ne voir la mer que depuis la fenêtre d'un bureau ?

A bon droit, Nimitz hésite, ajourne la réunion puis, dans la soirée, se décide finalement en faveur de Halsey.

Quelques heures plus tard, à Washington, l'amiral King entérine son choix. Le sort en est jeté : Ghormley est remplacé sine die par Halsey à la tête du COMSOPAC

Ne reste plus maintenant qu’à en informer Halsey lui-même !

jeudi 22 décembre 2022

7421 - trouver un nouvel entraîneur-chef

Halsey : une légende aussi adulée que décriée
... Pearl Harbor, 15 octobre 1942

Pour Nimitz, c’en est trop : dans l’après-midi du 15 octobre, lui-même et son État-major tombent d’accord pour se débarrasser une fois pour toutes de Ghormley, considéré comme le principal responsable du marasme qui règne au sein de "l’équipe".

Ceci dit, par quel autre "entraîneur-chef" le remplacer ?

Un nom, celui de William "Bull" Halsey revient sur toutes les lèvres 

Le 26 mai 1942, finalement terrassé par la dermatite aigüe qui l'accablait depuis des semaines, l'amiral Halsey, qui est à la Navy ce que le général Patton est à l'US Army, a dû être évacué du porte-avions Enterprise sur une civière, et conduit directement à l'hôpital, ce qui lui a fait rater la Bataille de Midway... qu'il aurait dû commander à la place de Fletcher.

Le 11 septembre, après plusieurs mois de traitements et de convalescence, il est néanmoins revenu à Pearl Harbor pour y reprendre officiellement le commandement de l'Enterprise - toujours en réparations après la Bataille des Salomon orientales - et de sa flottille d'accompagnement.

Contrairement à Ghormley, Halsey est assurément un homme pugnace et résolu à combattre l'ennemi coûte que coûte et en quelque endroit où il se trouve : sur la passerelle de l'Enterprise, le jour-même de l'attaque contre Pearl Harbor, il a publiquement déclaré "qu'à la fin de cette guerre, on ne parlerait plus japonais qu'en Enfer" et, jusqu'à ce que la maladie le retienne loin des combats, il a d'ailleurs tout fait pour mettre cette promesse en pratique, en particulier lors du désormais célèbre Raid sur Tokyo du 18 avril.

Reste que si Halsey apparait à beaucoup comme le candidat-miracle pour reprendre le commandement de la South Pacific Area et permettre à l'équipe américaine de remporter la victoire à Guadalcanal, il y a quand même un sérieux bémol...

mercredi 21 décembre 2022

7420 - dur lendemain de veille

Le Kongo, en 1931, après sa reconstruction en "cuirassé rapide"
... Guadalcanal, 12 octobre 1942

Mais pas question néanmoins de recourir aux monstrueuses pièces de 460mm du "super-cuirassé" Yamato !

Trop précieux pour être risqué au combat, ce dernier est donc sagement demeuré dans le Lagon de Truk, se contenant de regarder les deux "cuirassés rapides" Haruna et Kongo prendre la route de Guadalcanal.

Nés croiseurs de bataille, ces deux bâtiments, qui datent de la 1ère G.M. ont pour ainsi dire été entièrement reconstruits dans l'entre-deux-guerres, et s'ils ne portent "que" du 356mm, leurs dimensions plus "raisonnables", et leur vitesse de 30 nœuds, donc analogue à celle des croiseurs et destroyers, en font de parfaits outils pour des raids-éclair menés exclusivement de nuit, donc à l'abri des avions américains.

Enfin, avantage ô combien déterminant, leur perte éventuelle au combat ne représenterait pas, à la différence de celle du Yamato, un drame absolu pour la Marine impériale et le Japon tout entier.

Dans la nuit du 12 au 13 octobre, ces derniers se présentent donc devant Henderson Field, font pleuvoir un véritable déluge d'obus de gros calibre sur le terrain, y détruisent une quarantaine d'avions au sol,... puis reprennent tranquillement le chemin de leur base avant l'arrivée de l'aube.

Pour les soldats américains stationnés sur l'île et terrés dans leurs abris, la stupeur est totale : au lendemain de la victoire du Cap Espérance, comment des bâtiments de cette taille ont-ils pu s'approcher ainsi sans que personne ne les repère, semer la désolation, puis repartir sans être aucunement inquiétés ? Que fait la Navy ? Et que fait l'amiral Ghormley, à Nouméa, pour les sortir de ce cauchemar qui n'en finit pas ?

Pour Nimitz, c'est tout simplement la goutte de trop...

mardi 20 décembre 2022

7419 - la vitesse supérieure

Dauntless, à Henderson Field. Notez la rusticité des installations...
... depuis des semaines, les Américains de Guadalcanal étaient à la fois témoins et victimes impuissantes d'un constant et étrange ballet.

Chaque jour, une poignée d'appareils nippons partis de Rabaul venait déverser quelques tonnes de bombes sur leurs positions, tandis qu'une poignée de destroyers, parfois accompagnés de l'un ou l'autre croiseur, déversait quelques tonnes d'obus durant la nuit.

Mais bien que constant, l'effet de ce double pilonnage s'était cependant avéré extrêmement décevant pour les Japonais, en plus de s'avérer fort coûteux en hommes, en matériel et en carburant.

Leurs bombes légères et leurs obus de petit et moyen calibre ne pouvaient en effet causer de gros dommages et n'avaient du reste jamais entraîné la fermeture complète de l'aérodrome de Henderson Field, et donc l'arrêt du ravitaillement aérien américain et des opérations de la Cactus Air Force qui, après quelques réparations rapides et le remplacement de l'un ou l'autre avion détruit, avait continué ses vols comme si de rien n'était

Le seul mérite de ce harcèlement, néanmoins difficile à mesurer, était d'exercer une pression considérable sur les nerfs des soldats ainsi pris pour cibles, et constamment privés de sommeil.

Début octobre, Yamamoto a alors décidé de passer à la vitesse supérieure : en prévision, et en appui, de la nouvelle offensive terrestre prévue aux alentours du 20, il a autorisé le déploiement de cuirassés, dont les obus de gros calibre, pense-t-on, seront cette fois en mesure de provoquer des dégâts significatifs aux installations américaines...

lundi 19 décembre 2022

7418 - le "problème Ghormley"

Roberts Ghormley, en 1945
... la victoire américaine du Cap Espérance ne change donc rien à la situation sur le terrain, et pas davantage au "problème Ghormley"
 
A l'instar du célèbre général George B. McClellan qui, durant la Guerre de Sécession, reculait constamment le moment de passer à l'action tant il estimait ne jamais avoir assez de moyens pour le faire, Robert Ghormley estime lui aussi qu'il n'a pas assez de soldats, de navires, d'avions et d'approvisionnements pour remporter une quelconque victoire contre un ennemi dont il surestime par ailleurs largement les effectifs et les capacités.

Et comme ses brefs moments d'optimisme sont systématiquement suivis de longues et profondes périodes d'abattement, les moyens dont il dispose ne sont de toute manière accordés qu'avec la plus extrême prudence, pour ne pas dire à contre-coeur, aux combattants du Front, ce qui n'arrange évidemment pas le moral de ceux assiégés à Guadalcanal depuis maintenant près de deux mois, lesquels se demandent s'ils en sortiront un jour vivants, et surtout à quel jeu joue leur commandement-en-chef

Ghormley, nous l'avons dit, n'est pas un magicien : personne ne s'attend à ce qu'il fasse des miracles, et encore moins qu'il participe lui-même aux combats, fusil et grenade en main.

Mais son indécision, son pessimisme, son manque apparent d'empathie, et en particulier son refus de quitter son confortable Q.G. de Nouméa pour rendre visite, ne serait-ce que quelques heures, aux hommes qui risquent quotidiennement leur vie à Guadalcanal, n'en exercent pas moins une influence détestable sur la troupe, ce dont Nimitz, lors de sa visite du 29 septembre, s'est parfaitement rendu compte.

Pendant plus d'une semaine, l'intéressé a alors soupesé ses différentes options, sans véritablement découvrir le moyen qui lui permettrait d’améliorer la situation à Guadalcanal.

Mais c'est alors que les vieux cuirassés japonais sont entrés en scène...

dimanche 18 décembre 2022

7417 - le Cap de l'Espérance

La carcasse calcinée du croiseur Aoba. Notez la disparition de la 3ème tourelle avant
... Cap Espérance, Guadalcanal, 11 octobre 1942

Mais alors que Nimitz, à Pearl Harbor, rumine ses options, le convoi du contre-amiral Norman Scott, chargé des quelque 3 000 hommes du 164ème Régiment d'Infanterie s'approche lentement de Guadalcanal.

Faute de porte-avions, le dit convoi, rappelons-nous, n'est escorté que par quatre croiseurs et une demi-douzaine de destroyers qui, sur leur route, ont de fortes chances de rencontrer l'une ou l'autre flottille japonaise arrivant en sens inverse.

Et de fait, dans la nuit du 11 au 12 octobre, près du Cap Espérance, les Américains croisent celle du contre-amiral Aritomo Gotō - trois croiseurs lourds et deux destroyers - tout à la fois chargée de bombarder Henderson Field et de protéger à distance une autre flottille, celle du contre-amiral Takatsugu Jōjima - deux transporteurs d'hydravions et six destroyers - qui doit elle aussi livrer des renforts à Guadalcanal.

Combat de nuit, donc, soit le genre de combats où les Américains n'ont - et c'est un euphémisme - jamais brillé jusqu'ici.

Une fois de plus, la mêlée est extraordinairement confuse : à la lueur des projecteurs et des obus éclairants, chacun tire et lance des torpilles sur ce qu'il aperçoit - ou croit apercevoir - mais pour une fois, la réussite est du côté américain qui, au prix d'un destroyer coulé, et de deux croiseurs endommagés, envoient par le fond le croiseur Furutaka et le destroyer Fubuki, endommagent gravement le croiseur Aoba (qui, réduit à l'état d'épave calcinée, ne reprendra du service qu'en février 1943) et tuent le malheureux amiral Goto.

Victoire américaine donc, mais néanmoins très relative puisque, de son côté, Jōjima a réussi à débarquer les soldats qu'il transportait, ainsi que la quasi-totalité de leur matériel, lesquels se retrouveront bientôt opposés aux soldats, et au matériel, que Scott, de son côté décharge sans opposition le 13 octobre...

samedi 17 décembre 2022

7416 - "complètement défaitiste et quasiment désespéré" 

Nimitz, assis, et Ghormley, à sa gauche. Nouméa, 28 septembre 1942
… Nouméa, Nouvelle-Calédonie, 28 septembre 1942

A l’instar de ce qui se passe régulièrement dans le monde du football, les hauts responsables de la Navy, mais aussi de l’Armée et de l’Aviation, sont de plus en plus convaincus qu’un changement d’entraîneur s’impose au plus vite si l'on veut encore remporter la Bataille de Guadalcanal.

A Washington, le commandant-en-chef de la Navy, l'amiral Ernest King, qui n’a jamais pardonné à Ghormley sa conviction, exprimée dès le début du mois de juillet, selon laquelle la future invasion de Guadalcanal était condamnée à échouer (!), n’est pas loin de penser la même chose, mais ceci dit, Ghormley est-il réellement responsable de ce qui se passe ?, doit-on vraiment croire les reporters lorsqu’ils affirment que l’intéressé est "complètement défaitiste et quasiment désespéré" ?

Enfin, plus important encore, et toujours pour demeurer dans l’analogie footballistique, peut-on réellement espérer que son remplacement éventuel par un autre entraîneur améliorera le rendement global de l’équipe américaine, et lui permettra de remporter le titre à la fin du championnat ?

C’est pour le savoir que, le 28 septembre, Nimitz lui-même embarque dans un hydravion à destination de Nouméa, où il ne tarde pas à constater que, de fait, Ghormley ne contrôle pas grand-chose... et même pas les dizaines de cargos remplis de matériel de guerre qui attendent d’être déchargés dans le port !

Le lendemain, un autre vol l’amène à Guadalcanal, où Ghormley - faut-il le rappeler - n’a toujours pas mis les pieds (!), mais où Vandergrift et ses hommes, bien que résolus à continuer la lutte, ne se gênent pas de lui faire savoir tout le mal qu’ils pensent "de ces commandants qui ont bien trop peur de risquer leurs bâtiments"… contrairement à leurs homologues japonais qui, eux, ne se privent pas de venir régulièrement pilonner leurs positions.

Rentré à Pearl Harbor le 5 octobre, Nimitz est bien résolu à agir

Mais comment ?

vendredi 16 décembre 2022

7415 - ce qu'il faudrait à Guadalcanal...

Marines traversant la Matanikau, septembre 1942. Notez à nouveau l'omniprésence de la jungle
... en cette fin du mois de septembre, la situation des Américains, sans être désespérée, n'en est pas moins sérieuse.

Leur récente et cuisante défaite sur la Matanikau vient de leur rappeler que les Japonais sont loin de s'avouer vaincus et que le sort des armes pourrait très bien basculer dans quelques jours ou quelques semaines, lorsque les traversées du Tokyo Express, que personne ne semble en mesure d'arrêter, auront débarqué suffisamment de soldats nippons sur l'île.

Après plus de six semaines de combats contre les Japonais mais aussi, et peut-être surtout, contre la chaleur, l'humidité, les pluies diluviennes, les insectes et quantités de maladies, plus aucun soldat ne se hasarde à pronostiquer le jour où il pourra enfin rentrer chez lui, et si possible intact.

Guadalcanal est tout bonnement entré dans la détestable routine d'une guerre d'attrition dont personne n'entrevoit la fin, et où tout est toujours à recommencer.

Dans ce genre de guerre, le moral des combattants s'avère aussi essentiel que difficile à maintenir, et c'est particulièrement vrai pour les Américains qui, simples conscrits et bons citoyens d'une riche démocratie, n'ont pas l'habitude de pareilles conditions de vie mais peuvent en revanche s'offrir le luxe de nourrir de nombreux états d'âme, de se questionner ouvertement sur la conduite de la guerre et le talent militaire de leurs généraux,... et d'en faire part aux journalistes et à leurs parents et compatriotes au pays

Ce qu’il faudrait à Guadalcanal, a d'ailleurs reconnu le général d'Aviation Henry "Hap" Arnold, "ce sont de nouveaux chefs qui connaissent et comprennent la guerre moderne; des hommes qui sont agressifs et qui n’ont pas peur de perdre leurs navires", allusion à peine voilée au commandant-en-chef de la South Pacific Area, le vice-amiral Robert Ghormley...

jeudi 15 décembre 2022

7414 - échec sur la Matanikau

Marines évacués de la Pointe Cruz, 27 septembre 1942
... rivière Matanikau, Guadalcanal, 27 septembre 1942

Revenons en effet à Guadalcanal, où les Américains, après leur victoire d'Edson's Ridge et quelques jours de repos bien mérités, ont finalement décidé de se lancer à la poursuite des troupes du général Kawaguchi, en pleine retraite vers la rivière Matanikau, où ils entendent se regrouper et recouvrer des forces avant de repartir à l'attaque.

Militairement parlant, l'opération a du sens et devrait du reste permettre de retarder de quelques jours, voire de quelques semaines, l'inévitable retour des soldats nippons.

Le problème, c'est que la dite opération est largement improvisée, pour ne pas dire bâclée, qu'elle va se dérouler sur un terrain hostile et largement inconnu, et surtout contre un ennemi que chacun a un peu trop facilement enterré.

Et de fait, une succession d'escarmouches, qui débutent dès le 23 septembre, finissent par provoquer l'encerclement, le 26, de trois compagnies de Marines près de la Pointe Cruz, lesquelles sont péniblement extirpées, sous la mitraille, de leur fâcheuse position par des péniches de débarquement soutenues par le destroyer Monssen (1)

Bilan : près d'une quarantaine de morts côté américain et, surtout, échec total d'une opération (2) qui, loin d'affaiblir les Japonais, les a au contraire sérieusement ragaillardi...

(1) le Monssen sera coulé le 13 novembre, lors de la Bataille navale de Guadalcanal
(2) une deuxième opération, menée une dizaine de jours plus tard, et à peu près au même endroit, contre des unités japonaises fraîchement débarquées, eut en revanche davantage de succès, sans pour autant réussir à dissuader les Japonais de lancer, comme ils l'avaient prévu, leur nouvelle offensive à la fin du mois

mercredi 14 décembre 2022

7413 - quand la chance passe

Cargos américains, à Nouméa, en 1942
... pour la Marine impériale, la disparition du Wasp est une nouvelle et importante victoire : que la Flotte combinée sorte maintenant en force du Lagon de Truk, et elle quasiment assurée de ne rencontrer aucun navire ennemi jusqu'à Guadalcanal !

Mais les Japonais, une fois de plus, laissent passer leur chance et se contentent d'organiser de nouvelles traversées du Tokyo Express jusqu'à l'île, en vue de l'attaque qui doit y être lancée aux alentours du 20 octobre.

Et les Américains sont bien en peine de les arrêter !

De jour, et par temps clair, les appareils de la Cactus Air Force sont certes en mesure d'empêcher leur venue, mais la nuit, ces derniers jouissent d'une confortable impunité, à peine troublée par la présence éventuelle de l'un ou l'autre PT Boat, ces petites vedettes lance-torpilles opérant depuis Tulagi et qui sont les seuls bâtiments que la Navy, depuis le désastre de Savo, est encore disposée à risquer de nuit dans les parages de Guadalcanal, tant la supériorité nippone en matière de combats nocturne s'avère flagrante !

Mais puisque les Japonais ne cessent d'envoyer des troupes à Guadalcanal, les Américains n'ont d'autre choix que de les imiter : fin septembre, surmontant ses éternelles réticences, le vice-amiral Ghormley, qui n'a toujours pas quitté son confortable Q.G. de Nouméa, va ainsi accepter l'envoi des quelque 3 000 hommes du 164ème Régiment d'Infanterie, qui se morfondaient en Nouvelle-Calédonie.

Faute de porte-avions, le convoi qui les transportera, et dont l'arrivée est prévue pour le 13 octobre, ne sera cependant escorté que par quatre croiseurs et une demi-douzaine de destroyers, confiés au contre-amiral Norman Scott.

Ce n'est guère,... et d'autant moins qu'ils risquent de rencontrer sur leur route l'un ou l'autre convoi japonais venant en sens inverse.

Mais n'anticipons pas...

mardi 13 décembre 2022

7412 - au tour du Wasp

Le Wasp, ravagé par les explosions, 15 septembre 1942
... 280 km au sud-est de l’île San Cristobal, 15 septembre 1942, 14h45

Reste qu'en dépit de ses nombreuses carences, et des considérables difficultés qu'elle rencontre, la montée en puissance japonaise est indéniable et de plus en plus inquiétante pour le commandement américain qui désespère de trouver le moyen d'y mettre un terme.

Et l'affaire n'est pas prêt de s'arranger car le 15, soit au lendemain-même de la victoire d'Edson's Ridge, c'est au tour du porte-avions Wasp de tomber sous les torpilles d'un sous-marin japonais alors qu'en compagnie du Hornet et du cuirassé North Carolina il était occupé à escorter un convoi un renforts et de ravitaillement vers Guadalcanal !

Coup de maître ! Trois torpilles du I-19 touchent en effet le Wasp, une quatrième le North Carolina, et une cinquième (!) le destroyer O'Brian !

Si le cuirassé s'en tire sans dommages sérieux, l'O'Brian, demeuré à flots mais atteint dans son intégrité structurelle, se brisera néanmoins en deux un mois plus tard, lors de son retour vers les États-Unis.

Mais le plus grave, c'est évidemment le Wasp : version économique, et à l'échelle 3/4, de l'Enterprise et du défunt Yoktown, le petit porte-avions américain ne bénéficie pas des mêmes protections que ses grands frères, en particulier contre les torpilles, et est donc irrémédiablement condamné.

Ravagé par les incendies et les explosions, il est finalement abandonné à 15h20, puis achevé par les Américains eux-mêmes

Il n'y a plus qu'un seul porte-avions américain dans le Pacifique...

lundi 12 décembre 2022

7411 - la mort comme seule porte de sortie

Soldat américain à Edson's Ridge, septembre 1942 : "où est l'ennemi ?"
... systématiquement débarqués de nuit, par petits groupes, un peu partout sur le rivage, les nouveaux arrivants ont évidemment bien du mal à s'orienter et à progresser dans la jungle jusqu'à leurs différents points de regroupement, puis à se reformer en unités réellement aptes au combat.

Sur le papier, ils pourraient en principe s'appuyer sur les survivants des semaines précédentes dont certains, rappelons-nous, sont même tapis dans la jungle depuis le débarquement américain du 7 août (!), mais - troisième problème - la grande majorité de ceux-ci, parce qu'occupés à mourir de faim, de maladie ou de blessures diverses que personne n'est en mesure de soigner, s'avère souvent bien incapable d'aider qui que ce soit !

Et c'est notamment le cas des hommes du général Kawaguchi qui, après leur échec du 14 septembre, ont reçu ordre de retraiter vers l'Ouest, et plus précisément vers la rivière Matanikau et le village de Kokumbona, une marche d'une dizaine de km à travers une jungle épaisse qui va exiger... cinq jours d'efforts (!) à ces hommes épuisés et contraints de porter leurs camarades blessés, sans réaliser que ces derniers n'ont en réalité aucune chance d'en sortir vivants !

Car là où le soldat américain, dans les mêmes circonstances, bénéficie d'un hôpital de campagne bien équipé, puis d'une évacuation sanitaire par avion, le soldat japonais, privé de soins et de médicaments, est simplement prié d'accepter son sort avec stoïcisme, pour la plus grande Gloire du pays et de son Empereur-dieu.

Dit autrement, c'est chaque fois en repartant d'une page quasiment blanche que le commandement japonais est obligé de planifier ses nouvelles attaques, et alors que les vétérans américains ont l'assurance d'être relevés à plus ou moins brève échéance, et la possibilité de s'en aller ensuite instruire les nouvelles recrues dans un camp d'entraînement aux États-Unis, les vétérans japonais de Guadalcanal, eux, n'ont d'autre issue que de mourir sur l'île sans avoir eu le loisir de transmettre leur expérience à qui que ce soit...

dimanche 11 décembre 2022

7410 - on n'est jamais si bien servi que par soi-même...

Soldats japonais embarquant sur un navire du Tokyo Express, 1942
... car - premier problème - les Américains sont eux aussi bien décidés à envoyer des renforts à Guadalcanal !

Le 18, l'arrivée d'un petit convoi escorté permet ainsi le débarquement de la 7ème Marines et du 1er Bataillon de la 11ème, accompagnés d'une bonne centaine de véhicules et de plusieurs tonnes d'approvisionnements divers.

A la fin du mois d'octobre, Vandergrift disposera dès lors de près de 24 000 hommes,... soit plus du double de son effectif initial, ainsi que d'un bataillon de chars légers, et de quatre bataillons d'Artillerie au complet.

Ensuite - second mais assurément plus important problème - l'essentiel de la logistique japonaise repose encore et toujours sur de simples destroyers... avec tous les inconvénients et limitations que cela implique et qui contraignent d'ailleurs le commandement nippon à reporter au 20 octobre une nouvelle attaque qui - on n'est jamais si bien servi que par soi-même - sera cette fois menée par le propre commandant de la 17ème Armée, soit le général Hyakutake en personne.

"Dans la nuit du 15 au 16 septembre, le 1er Bataillon du 4ème Régiment d'Infanterie fut acheminé par destroyers (...). Dans la nuit du 3 octobre, une importante opération du Tokyo Express débarqua le commandant de la 2ème Division, le lieutenant général Maruyama et quatre obusiers de 150 mm. Dans la nuit du 4 au 5 octobre, 750 autres hommes furent acheminés par destroyers.

(...) Le Tokyo Express roulait maintenant à plein régime. Dans la nuit du 8 au 9 octobre, (...) un porte-hydravions livra deux canons de 100 mm. La nuit suivante, un croiseur léger et sept destroyers amenèrent près de 1 200 hommes, dont le commandant de la 17ème, le général Hyakutake (1)

(1) Stille, op cit

samedi 10 décembre 2022

7409 - l'inévitable montée en puissance

Soldat américain, à Edson's Ridge, après la bataille : et maintenant, on fait quoi ?
... Rabaul, 15 septembre 1942

Au Q.G. de la 17ème Armée japonaise, à Rabaul, la défaite d'Edson's Ridge est naturellement accueillie avec consternation par le général Hyakutake et son État-major.

Si l'échec d'Ichiki, un mois auparavant, pouvait facilement s'expliquer par un excès de précipitation et un manque flagrant de personnel, on avait tout de même espéré, et autant à Rabaul qu'à Truk ou à Tokyo, qu'avec une bonne préparation et, surtout, six fois plus d'hommes - dont seulement la moitié, il est vrai, ont été en mesure de participer aux combats - Kawaguchi réussirait quant à lui à l'emporter et à bouter les Américains hors de Guadalcanal.

Or à l'évidence, les dits Américains sont non seulement plus pugnaces mais également bien plus nombreux qu'on ne l'avait estimé jusque-là, ce qui, puisqu'il n'est aucunement question de renoncer, implique inévitablement... d'expédier sur l'île un nouveau contingent autrement plus important !

"Pour la première fois, la véritable ampleur de l'offensive américaine s'imposa aux yeux de tous, tout comme la nécessité d'engager des forces beaucoup plus conséquentes.

Toute la 2ème Division, et une partie de la 38ème, soit 17 500 hommes et 176 canons, étaient désormais destinées à Guadalcanal. Et l'affaire était même jugée si grave que la 17ème Armée arrêta son offensive à travers la Nouvelle-Guinée pour se concentrer [désormais] sur Guadalcanal" (1)

Militairement parlant, cette décision a assurément du sens, mais reste maintenant à la concrétiser sur le terrain, ce qui, malheureusement, ne va pas de soi...


(1) Stille, op cit

vendredi 9 décembre 2022

7408 - mieux, mais pas encore assez

La 2èeme Bataille d'Edson's Ridge : les Japonais parviennent aux abords de l'aérodrome avant d'être repousssés
... Guadalcanal, 14 septembre 1942

Car l'aube, une fois de plus, est arrivée, mettant un terme à cette seconde offensive mais aussi aux derniers espoir de Kawaguchi qui, ayant épuisé ses ressources, n'a, une fois de plus, d'autre choix que de retraiter dans la jungle, se contentant, au cours des deux nuits suivantes, de lancer des attaques nocturnes sans conviction, que les Marines repoussent à chaque fois sans difficulté.

Au bilan final, la Bataille d'Edson's Ridge se solde donc par un nouveau succès américain qui, au prix de quelques 300 morts ou blessés, ont tenu leurs positions et infligé des pertes au moins quatre fois supérieures à leurs adversaires,

Contrairement à Ichiki qui, lors de ses deux tentatives des 19 et 20 aout, avait foncé tête baissée, quasiment sans réfléchir, et avec très peu de moyens, Kawagushi avait quant à lui pris le temps d'analyser soigneusement la situation et de réunir des forces autrement plus conséquentes mais néanmoins toujours insuffisantes pour espérer l'emporter contre les Américains qui, même s'ils avaient été totalement submergés à Edson's Ridge, disposaient, sur les arrières de la crête, de réserves importantes, de nombreuses pièces d'Artillerie, et surtout d'une poignée de tanks contre lesquels les Japonais se seraient de toute manière retrouvés impuissants.
 
Dans l'immédiat, les Japonais survivants ont retrouvé le couvert de la jungle, et s'efforcent du moins de vivre un jour de plus.

"Les vaincus les plus valides portaient dans la jungle les brancards des blessés. D’autres marchaient en clopinant. Les mouches et les insectes tournaient autour d’eux. De certains, déjà atteints par la gangrène, émanait une odeur fétide. La retraite fut un calvaire. Les morts furent abandonnés sous les tentes trempées, dans la boue, au milieu des lianes derrière lesquelles des iguanes et des crocodiles guettaient leur proie" (1)

(1) Hérubel, op cit

jeudi 8 décembre 2022

7407 - dans la fureur de la nuit

Edson's Ridge, une bataille menée au corps-à-corps, dans la chaleur et la fureur de la nuit
... Edson's Ridge, Guadalcanal, 13 septembre 1942, 18h30

Dès 18h30, les affrontements reprennent donc entre la rivière Lunga et la crête.

Simples escarmouches et préludes à l'attaque principale qui, conformément à la coutume, débute par le traditionnel pilonnage de l'artillerie navale, mené par une demi-douzaine de destroyers aux environs de 21h00.

Cette fois, les Japonais sont mieux préparés et l'affaire autrement plus sérieuse !

Combattant à un contre quatre, et parfois au corps-à-corps, les Marines se voient petit à petit contraints de reculer sous la pression de leurs adversaires, qui s'efforcent de les déborder sur les deux côtés de la crête.

Heureusement pour eux, l'Artillerie, cette "Mère des Batailles", donne à présent de la voix, sous la forme des quelques obusiers de 105mm que Vandergrift - rappelons-nous - a fait positionner à l'arrière de la crête.

A leur tour écrasés sous les obus, les Japonais fléchissent mais ne rompent pas encore : "une compagnie du 2ème Bataillon, 4ème Régiment d'Infanterie pénétra la ligne des Marines et atteignit la partie nord-est de la crête. Le summum de leur attaque se produisit vers 05h30, lorsque 50 à 60 hommes de la dernière compagnie de ce bataillon atteignit le bord de "Fighter One" (un aérodrome satellite à l'est de Henderson) et investit brièvement le campement de l'unité de Génie qui s'y trouvait.

Ceci marqua la fin de la seconde tentative japonaise pour s'emparer de Henderson Field" (1)

(1) Stille, op cit

mercredi 7 décembre 2022

7406 - l'heure du repli stratégique

Canon de campagne américain, à Guadalcanal, notez là encore l'omniprésence de la jungle
... Edson's Ridge, Guadalcanal, 13 septembre 1942, 05h30

Et si la nuit est le meilleur allié du soldat japonais, l'arrivée de l'aube ne manque jamais de venir secourir le soldat américain !

De fait, dès les premières lueurs du jour, les inévitables appareils de la Cactus Air Force font leur réapparition dans le ciel et entreprennent de mitrailler et de bombarder le Sud de la crête.

A 05h30, réalisant la futilité de poursuivre son effort dans pareilles conditions, Kawaguchi n'a d'autre choix que d'ordonner une retraite générale vers le couvert de la jungle avec, néanmoins, la ferme intention d'y regrouper ses forces afin de repartir à l'attaque dès la nuit suivante qui, du moins l'espère-t-il, lui offrira davantage de réussite. 

Repli stratégique japonais, donc, qui, pour autant, n'enlève rien au succès des Américains, lesquels, bien que combattant à un contre quatre, ont réussi à tenir l'essentiel de leurs positions.

Mais s'ils n'ont subi que des pertes légères dans cet affrontement, ils n'en commencent pas moins à manquer de munitions alors que Vandergrift, de son côté, craignant toujours une attaque depuis le rivage, demeure réticent à envoyer des renforts sur la crête, ne consentant tout au plus qu'à positionner une petite force de réserve et quelques canons à l'arrière de celle-ci.

Sur la crête-même, les Marines profitent fiévreusement des dernières heures de l'après-midi pour raccourcir leur ligne de défenses et les améliorer autant qu'il est possible avant que le retour de l'obscurité ne favorise à nouveau leurs adversaires...

mardi 6 décembre 2022

7405 - la confusion

Marines américain, à Edson's Ridge. Notez la proximité de la jungle
... la première victime de la bataille, a-t-on coutume de dire, est toujours le plan de la bataille, et l'attaque japonaise du 12 au 13 septembre sur Edson's Ridge constitue l'illustration parfaite de cette maxime.

"Ce qui s'ensuivit (...) fut une série d'actions confuses menées par de petites unités, actions qui n'offraient aucune ressemblance avec le plan initial conçu par Kawaguchi.

L'affaire avait déjà mal commencé lorsque deux des trois bataillons du corps principal n'arrivèrent qu'après 20h00 heures sur leurs zones de rassemblement, et Kawaguchi ne fut jamais en mesure d'assurer le contrôle total de son attaque.

Au lieu de s'en prendre à la crête proprement dite, l'attaque dériva vers la gauche, dans la zone située entre la crête et la rivière Lunga. (...) Seuls deux bataillons furent au contact des Marines cette nuit-là (...) Même le groupe de commandement de Kawaguchi s'avéra incapable de naviguer dans la jungle. Au moment où les commandants de bataillon réussirent à rétablir le contrôle, il faisait déjà presque jour.

(...) La même infortune ruina les efforts des deux formations opérant sur les ailes. A droite, le Bataillon Kuma s'était retrouvé sur une zone de rassemblement bien trop à l'est et ne fut dès lors jamais en mesure d'entrer au contact avec les Américains. Sur la gauche, le 2ème bataillon du 4ème Régiment d'Infanterie connut un sort semblable et n'arriva pas se déplacer assez vite pour participer à l'attaque du 12 septembre.

Toute l'attaque japonaise avait échoué" (1)

(1) Stille, op cit

lundi 5 décembre 2022

7404 - le coup d'envoi

Edson's Ridge, une crête caractéristique, débouchant sur l'aérodrome et le littoral
... Edson's Ridge, Guadalcanal, 12 septembre 1942, 21h30

Au matin du 12, alors que les hommes du colonel Edson se sont installés sur la crête, ou plus exactement sur les trois collines qui couronnent celle-ci, les troupes du général Kawagushi s'approchent lentement par le Sud.

"Leur progression à travers la jungle constituait une affaire ardue. De gros efforts avaient été entrepris pour éviter toute détection par les Airs. [Mais] s'orienter dans la jungle s'avéra difficile et, à un moment donné, l'un des bataillons de Kawaguchi se perdit et ne réapparut que le 12 septembre" (1)

Dans la journée, conformément au plan prévu, des bombardiers partis de Rabaul font leur apparition au-dessus de Guadalcanal mais, au lieu de s'en prendre à l'aérodrome, comme c'est la coutume depuis plusieurs semaines, les appareils préfèrent larguer leur chargement sur la crête, preuve, s'il en était encore besoin, que c'est bel et bien là que Kawaguchi a l'intention de lancer son attaque.

Voilà les Marines prévenus, et de fait, à 21h30, alors que la nuit est déjà tombée, ce sont à présent le croiseur Sendai et trois destroyers nippons qui se mettent en devoir de faire pleuvoir les obus, en n'occasionnant néanmoins que des pertes et des dégâts insignifiants.

Kawagushi peut à présent mener la charge, mais le problème, c'est que ses soldats sont épuisés par leur pénible cheminement à travers la jungle et, surtout, encore bien trop dispersés pour être en mesure de coordonner leurs efforts de manière efficace...

(1) Stille, op cit.

dimanche 4 décembre 2022

7403 - drôle de repos

Edson's Ridge : une "crête sanglante" d'un km de long, parallèle à la rivière Lunga et débouchant sur Henderson Field
... Edson's Ridge, Guadalcanal, 11 septembre 1942

Car non contents d'avoir détruit ou incendié une bonne partie de la nourriture, des munitions et des approvisionnements japonais si péniblement acheminés sur l'île, les raiders du colonel Edson, ont mis la main, juste avant de rembarquer, sur divers documents qui laissent penser que Kawaguchi dispose d'au moins 3 000 hommes,... et surtout qu'il se prépare à attaquer les positions américaines par une étroite crête d'un kilomètre de long, parallèle à la rivière Lunga, qui surplombe l'aérodrome de Henderson Field et offre une voie d'accès naturelle à celui-ci

Vandergritf, rapidement mis au courant, n'y croit pourtant pas, d'abord parce qu'il demeure convaincu que son adversaire attaquera directement depuis le rivage,... comme lui-même l'a fait un mois auparavant, et ensuite parce qu'il ne dispose de toute manière pas de suffisamment d'hommes pour occuper la dite crête, et surtout pour la tenir en cas d'offensive japonaise majeure

Mais Edson s'obstine et puisque ses hommes, de toute façon, ont bien besoin de repos, c'est sur cette crête - qu'on appellera bientôt la Crête Edson (1) - qu'on va les mettre... au repos !

Étrange repos en vérité puisque c'est bel et bien là, sur cette même crête, que les Japonais ont surnommé mukade gata, c-à-d "mille-pattes" en raison de sa forme, que Kawagushi a décidé de faire porter l'essentiel de son effort !

Le 11 septembre, les quelque 800 hommes d'Edson se déploient donc sur celle-ci, et s'y mettent en position de défense, sans trop savoir néanmoins à quoi s'attendre...

(1) cette crête est également connue sous le nom de Bloody Ridge, ou "Crête sanglante"

samedi 3 décembre 2022

7402 - de mal en pis...

Le McKean (APD-5) en aout 1942, notez la disparition de 2 des 4 cheminées d'origine
... Tasimboko (Guadalcanal), 8 septembre 1942

Nullement ébranlé par ce revers, pourtant ô combien prévisible, Kawaguchi demeure résolu à attaquer les positions américaines dans la nuit du 12 au 13 septembre.

Le 7, le gros de ses forces quitte donc le village de Tasimboko, où le général a établi sa base de ravitaillement, et, sous le couvert de la jungle, entreprend de marcher en direction de Lunga Point, à une quarantaine de km à l'Ouest, ne laissant qu'à environ 200 hommes le soin de garder le campement.

Mais - nouveau problème - les Américains ont appris l'existence du dit camp, et décidé d'y mener eux-mêmes un raid-éclair sous la forme d'une opération amphibie confiée au colonel Merritt Austin Edson, dont les quelque 800 hommes débarquent à l'aube du 8, grâce aux destroyers de transport Manley et McKean (1) et deux anciens thoniers convertis, tous aimablement fournis par la Navy !

Bien que totalement pris au dépourvu, les Japonais opposent néanmoins une résistance acharnée, mais sont incapables d'empêcher les Américains d'investir le camp et de le mettre aussitôt à sac, détruisant l'installation radio, éventrant les boîtes de conserve à la baïonnette, déchirant, et urinant, sur les sacs de riz, et incendiant tout ce qui peut l'être.

Et ce n'est pas encore le pire...

(1) les destroyers de transport, ou APD, sont d'anciens destroyers qui, à la différence de leurs adversaires japonais, ont été spécifiquement convertis pour le transport de troupes, abandonnant en particulier une bonne partie de leur machinerie et de leur armement au profit de quartiers pour les soldats et d'emplacements pour plusieurs barges de débarquement

vendredi 2 décembre 2022

7401 - mauvais début

Renforts japonais débarquant à Guadalcanal, septembre 1942, l'île de Savo en arrière-plan
... Guadalcanal, 05 septembre 1942

Kawaguchi, justement, a prévu d'utiliser les cinq bataillons dont il dispose - soit un peu plus de 6 000 hommes - pour lancer son offensive dans la nuit du 12 au 13 septembre.

La force principale, trois bataillons, placés sous son commandement direct, attaquera le périmètre américain par le Sud, appuyée, sur son aile droite, par le Bataillon Kuma, c-à-d le deuxième échelon du détachement du défunt colonel Ichiki, et, sur son aile gauche, par le Bataillon Oka, c-à-d le 2ème Bataillon du 124ème Régiment d'Infanterie.

Mais - premier problème déjà - le dit bataillon se voit sévèrement étrillé le 5 septembre !

Car désireux d'appuyer son action par quelques pièces d'artillerie lourdes qui ne pouvaient être transportées sur le pont de simples destroyers, Kawaguchi, passant outre aux objections de l'amiral Tanaka, a eu l'idée de recourir à de lentes et lourdes barges qui, comme l'avait prévu Tanaka, se retrouvent copieusement "traitées" par les appareils de la Cactus Air Force, forçant les soldats à se jeter à la mer et aborder où ils peuvent - y compris sur l'île de Savo ! - non sans avoir dû abandonner la plus grande partie de leurs armes et de leur équipement !

En pratique, et non content de déplorer de nombreuses pertes humaines, Kawaguchi ne pourra donc compter que sur sa seule artillerie légère ainsi que sur le soutien - malheureusement momentané - que lui offriront quelques bâtiments de la Marine impériale dans les minutes précédant l'attaque.

Mauvais début...

jeudi 1 décembre 2022

7400 - l'inévitable attaque

Le général Kawaguchi, à Guadalcanal
... bon gré mal gré, c'est donc sans soutien naval, avec les seuls moyens dont ils disposent et l'apport, mais uniquement durant la journée, d'une poignée d'avions, que les Marines de Guadalcanal vont devoir affronter une inévitable nouvelle attaque japonaise.

Mais ces Japonais, combien sont-ils exactement ?

On sait aujourd'hui que depuis la fin du mois d'août, les destroyers du Tokyo Express ont déposé quelque 5 000 combattants sur l'île, auxquels il convient toutefois d'ajouter ceux qui s'y trouvaient auparavant et qui ont réussi à survivre dans la jungle depuis le débarquement américain du 07 août.

L'un dans l'autre, on peut donc estimer qu'ils sont entre 6 000 et 7 000, soit une force autrement plus imposante que celle dont disposait le défunt colonel Ichiki lors de sa désastreuse attaque du 21 août.

Pourtant, curieusement, cette force ne semble nullement pressée d'en découdre !

Car, contrairement à son prédécesseur qui avait foncé tête baissée dans la mêlée quasiment après avoir débarqué (!), le général KiyotakeKawaguchi est un homme réfléchi et méthodique qui, depuis qu'il a lui-même posé les pieds sur l'île, le 31 août, prend le temps de regrouper ses troupes, d'analyser la situation, et d'élaborer un plan d'attaque dont il est néanmoins certain, à l'instar d'ichiki, qu'il lui apportera la victoire sur un plateau.

Pour les Marines, plongés dans l'incertitude, l'idéal serait donc de connaître l'étendue des moyens, et surtout les intentions, du général...