... l'apparition des Bertha de 420mm avait piqué au vif l'orgueil des militaires français qui, dés les premiers jours de la guerre, ne cessèrent de réclamer de semblables armes.
Une analyse objective aurait sans doute démontré que ces mortiers géants offraient finalement plus d'inconvénients que d'avantages mais, dans la lutte à mort que se livrait à présent la France et l'Allemagne, si l'armée allemande possédait de gros canons en mesure d'expédier des projectiles de 800 kilos à 10 kilomètres, alors l'armée française se devait nécessairement d'en obtenir d'encore plus gros, capables d'envoyer encore plus loin des obus encore plus lourds.
C'est en vertu de cette imparable logique qu'en janvier 1916, l'ALVF passe donc commande à Schneider pour deux obusiers géants sur voie ferrée, au calibre 520mm, censés offrir une portée de 16 kilomètres à un obus de 1 200 kilos ce qui, dans les deux cas, revient à battre les Allemands de 50 % !
Si on y ajoute le fait que le canon et sa plateforme ferroviaire affichent également près de 300 tonnes sur la bascule, on peut considérer que la France va bientôt disposer du plus gros et du plus puissant canon du monde.
Hélas, et en dépit de la priorité qui lui est accordée, l'étude, la mise au point et la fabrication de ces monstres - fort peu poétiquement baptisés "520 modèle 1916" - s'avèrent beaucoup plus coûteuses, beaucoup plus pénibles et beaucoup plus longues que prévu, en sorte que le premier exemplaire ne peut être livré qu'en novembre 1917, et le second en mars 1918.
Encore faut-il à présent les tester, ce qui est fait au cours des mois suivants. Hélas, en juillet, le canon numéro 1, qui participe à des essais en Bretagne, est pulvérisé dès le cinquième tir par un obus qui explose à l'intérieur du tube.
Quatre mois plus tard, c'est au tour de l'armistice de briser les rêves de gloire des artilleurs français, en sorte que la guerre se termine sans qu'un seul de ces canons géants soi-disant indispensables ait eu le temps d'entrer en service.
Prudemment remisée en 1919, la pièce numéro 2 sort de l'oubli vingt ans plus tard, au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. Mais il est décidément dit que le "520 modèle 1916" ne combattra jamais le moindre soldat allemand, puisque le canon et sa plateforme ferroviaire, renvoyés chez Schneider pour remise en état, y sont finalement capturés pas la Wehmarcht en juin 1940 sans avoir eu le temps de tirer un seul obus.
Devenu allemand, l'obusier géant prend alors le chemin de l'URSS à la fin de l'automne 1941, afin de soutenir l'offensive allemande sur Leningrad. Mais le 5 janvier 1942, une nouvelle explosion prématurée d'un obus à l'intérieur du tube met un terme définitif à la longue et pitoyable carrière du plus gros canon français de tous les temps...
1 commentaire:
cette course aux armements entre France et Allemagne figure déjà dans...Jules Verne (les 500 Millions de la Bégum) en profitant d'un fabuleux héritage, un ingénieur français construit une cité idéale dans un coin des états unis tandis que le second héritier , un allemand crée juste à côté une aciérie modèle ...et une fabrique de canons avec des obus asphyxiants (déjà la guerre des gaz), la guerre entre les deux villes manque d'éclater, mais Schultze, l'allemand qui a tout du blofeld de James Bond est victime de sa propre invention et finit asphyxié dans son laboratoire étanche qui devient son tombeau....mélo à souhait.
Le livre date de 1879 (en plein esprit de revanche de la guerre de 1870) mais Jules Verne n'a pas tant que çà forcé son génie anticipateur...la "revanche" était une idée qui était dans toutes les têtes en France après la fin du second empire.
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