... c'est peu dire que la mise en service du Deutschland, en avril 1933, avait bouleversé les chancelleries, et déclenché une véritable course au réarmement naval.
Officiellement donnés pour 10 000 tonnes, soit la limite maximale autorisée par les traités, mais en réalité bien plus lourds (1), le Deutschland et ses futurs frères Admiral Scheer et Admiral Graf Spee, se voulaient en effet le meilleur des deux mondes, c-à-d plus rapides, à 28 noeuds, que les cuirassés alors en service et, avec leurs six canons de 280mm, infiniment mieux armés que tous les croiseurs légers et lourds contemporains, lesquels se contentaient respectivement de pièces de 155 ou 203mm (2).
Conscients qu'ils ne parviendraient jamais, en repartant de zéro, à rivaliser en quantité de navires avec la Grande-Bretagne, les États-Unis ou même la France, les responsables de la Reichsmarine (3) avaient eu l'idée de se doter d'une simple flotte de "raiders", c-à-d de navires de surface destinés prioritairement, si pas exclusivement, à l'attaque des navires marchands ennemis, à l'image de ce qu'avait fait l'Emden lors de la guerre précédente.
Sur le papier, le raisonnement ne manquait pas de pertinence : en cas de nouvelle guerre, la Grande-Bretagne, principal ennemi désigné, ne pourrait en effet survivre sans une constante noria de cargos charriant matériels, nourriture et matières premières en provenance de ses colonies ou des États-Unis.
Ces lents et patauds navires constitueraient des proies faciles pour des raiders rapides et puissamment armés car même si les Britanniques, comme ils l'avaient fait lors de la guerre précédente, se décidaient à les faire naviguer en convois, les dits convois devraient se contenter de la protection soit de cuirassés, soit de croiseurs, c-à-d de navires que les Deutschland surclasseraient tantôt en vitesse, tantôt en puissance de feu.
A vrai dire, et toujours sur le papier, il n'existait qu'une poignée de vieux croiseurs de bataille britanniques ou japonais capables de l'emporter sur les Deutschland dans ces deux domaines à la fois, et ces rares bâtiments ne pourraient à l'évidence être partout en même temps.
Voilà pour la théorie...
(1) à pleine charge, les bâtiments de la classe Deutschland avoisinaient les 15 000 tonnes
(2) rappelons que c'était le calibre de l'artillerie, et pas le tonnage du bâtiment, qui faisait alors la distinction entre les croiseurs "légers" et les croiseurs "lourds".
(3) devenue Kriegsmarine en 1935
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