jeudi 1 décembre 2011

3191 - l'épitaphe de la journée

... comme tant d’autres, "Dutch" Keiser a quitté Kunu-ri dans l’après-midi et, comme tant d’autres, sa Jeep s’est retrouvée immobilisée à maintes occasions, et prise sous le feu des Chinois que rien, pas même le napalm des chasseurs-bombardiers, ne parvient à museler.

A mi-chemin, juste avant cet endroit que les Américains ont surnommé "la Passe" tant il est étroit et s’enfonce profondément en plein cœur d’une colline, sa Jeep s’est arrêtée une fois de plus.

Déjà sous le choc de la perte de son propre garde du corps, tué quelques minutes auparavant, le général est machinalement descendu de la voiture, comme s’il cherchait à vivre physiquement l’ampleur du désastre.

Un désastre dont il n’est pas le seul responsable, mais un désastre que ses ordres ont assurément précipité.

Alors qu’il marchait sur un des nombreux cadavres qui jonchaient la route, le cadavre s’est subitement rebellé. "Foutu fils de pute !" s’est-il écrié. "Mon ami, je suis désolé" a simplement rétorqué le général avant de poursuivre son chemin sans prêter davantage d’attention à ce soldat qui n’avait pas encore réalisé qu’il était déjà mort et que personne, pas même un général, ne pouvait plus rien pour lui

Ces cinq mots du général Keiser, commandant d’une 2ème Division d'Infanterie qui en moins de 24 heures a cessé d’exister, ces cinq mots furent, comme le souligne David Halbertstam, "l’épitaphe de la journée" (1)

(1) ibid, page 455

Aucun commentaire: