dimanche 19 décembre 2010

2844 - prêts, mais pas trop...

... Remagen, 6 mars 1945

A plus de 50 ans, le capitaine Karl Friesenhahn pensait avoir trouvé sinon la paix, du moins une confortable sinécure lorsqu'il avait reçu le commandement du Pont de Remagen.

Mais en ce début de mars 1945, la guerre a néanmoins fini par le rattraper, sous la forme d'une directive de l'État-major, lui enjoignant de préparer le dynamitage.

Malgré le manque de moyens, Friesenhahn et sa petite équipe d'artificiers se sont aussitôt attelés à la tâche avec une rigueur toute germanique, mais la question de savoir qui donnera l'ordre, et quand cet ordre sera donné, demeure entière.

L'idéal bien sûr serait de ne prendre aucun risque et de déclencher l'explosion toutes affaires cessantes.

Mais il y a les réfugiés et les débris de la 15ème Armée, qui ont besoin de ce pont pour se mettre à l'abri de l'autre côté du Rhin, et il y a aussi Hitler, qui depuis l'attentat raté du 20 juillet ne fait plus confiance à personne et entend prendre lui-même toutes les décisions.

Surtout, le Führer se plaît plus que jamais à entretenir de nombreuses chimères,... à commencer par celle de repartir à l'offensive à l'Ouest, ce qui impliquerait évidemment de retraverser le Rhin dans l'autre sens, et donc de disposer de ponts encore intacts.

Encore faut-il également prendre en compte le risque d'un accident : depuis le début du conflit, plusieurs ouvrages d'Art ont en effet disparu prématurément suite à une explosion des charges provoquée par l'erreur d'un artificier, un incendie, ou l'impact direct d'un obus sur les charges de démolition. Et à Liège, le 31 août 1939, on a même vu la foudre expédier au paradis de la ferraille le Pont du Val-Benoît préventivement miné par l'armée belge (1)

L'un dans l'autre, Frisenhahn et ses hommes se sont donc contentés de placer les explosifs sans les raccorder au système électrique de mise à feu, un système néanmoins testé plusieurs fois par jour, et protégé par un épais tube métallique qui court sur toute la longueur du tablier.

Par sécurité, ils ont également installé un dispositif de secours totalement indépendant, constitué de charges actionnées quant à elles par un classique système pyrotechnique.

Des charges qui n'ont cependant pas encore été mises en place...

(1) cet accident spectaculaire, qui s'était produit juste avant le passage du train Liège-Luxembourg, avait fait une centaine de morts et de blessés.

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