… à mesure que l’étau se resserre, la brutalité insensée des Japonais ne fait que croître.
Sachant leur dernière heure venue, ces derniers passent plus que jamais leurs nerfs sur les civils philippins, otages ou non, qui ont le malheur de se trouver sur leur passage.
Aux tueries gratuites, et aux viols massifs à cinq, dix ou vingt soldats s’ajoutent bientôt les mutilations et actes de barbarie tout aussi gratuits et massifs.
Ici, on décapite les hommes au sabre; là, on éventre les enfants et même les bébés à la baïonnette; ici, on coupe la langue, les seins ou les oreilles – et parfois tout à la fois - des femmes qu’on vient de violer; là, on enferme les prêtres dans des caves ou dans leurs églises qu’on arrose d’essence avant d’y mettre le feu et d’y lancer quelques grenades.
Rien de neuf en vérité : à Nankin, en 1937, cette même armée japonaise s’était déjà livrée aux mêmes activités au détriment des civils chinois, et sans même avoir l’excuse d’être acculée par un ennemi implacable et sur le point de triompher.
Mais au fond, que reprochent donc les Japonais à ces malheureux Philippins sans défense ? d’être catholiques et sur leur chemin, peut-être; d'abriter en leur sein des "terroristes" pro-américains, sans doute; mais aussi, et surtout, d’appartenir à une ethnie inférieure, qui a refusé d’entrer dans la "Sphère de Coprospérité de la Grande Asie" si "généreusement" offerte par Tokyo et qui, suprême outrage, a préféré se rallier à ses anciens maîtres, soit aux colonisateurs occidentaux.
On ne peut comprendre Nankin, on ne peut comprendre Manille, et plus généralement on ne peut comprendre la Guerre du Pacifique, si on n’intègre pas dans son raisonnement l’extraordinaire sentiment de supériorité raciale que les dirigeants, mais aussi le peuple japonais dans son ensemble, entretient alors en Asie, à l’instar des dirigeants allemands, et du peuple allemand, en Europe, au même moment.
Pour les Japonais, comme pour les Allemands, les autres peuples ne sont là que pour les servir, les distraire, leur fournir gratuitement le blé, le pétrole, les matières premières, la main d’œuvre, et naturellement les femmes-de-réconfort dont ils ont besoin. Et pour périr dans les pires souffrances s'ils ont l'audace de se rebeller contre leur sort.
Et c’est dans la stricte application de ce principe que les portes de l’enfer se sont ouvertes à Manille en ce mois de février 1945, comme elles s’étaient ouvertes à Varsovie six mois plus tôt…
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