... dans le camp américain, la victoire de Leyte, aussi indiscutable soit-elle, est pourtant loin de combler les attentes de l'État-major et, surtout, celles de l'opinion publique.
Traumatisée par la résistance suicidaire des soldats japonais, et par les attaques kamikazes qui ne cessent de se déchaîner contre la Flotte, celle-ci se demande plus que jamais quand cette maudite guerre va se terminer et combien d'époux, de frères ou de fiancés devront encore verser leur sang avant de voir la bannière étoilée flotter sur la capitale japonaise.
Si plus personne au pays ne doute de la victoire finale, de plus en plus de voix s'élèvent en revanche contre la lenteur des opérations et les actions de chefs qui, bien que victorieux, auraient pu, pense-t-on, "faire davantage".
"Bull" Halsey est naturellement au centre des critiques : sa Troisième Flotte a certes balayé les Japonais de la surface de l'Océan, mais ses multiples errements ont inutilement coûté la vie à de nombreux marins américains et ont condamné la Navy a se contenter d'un succès alors qu'elle aurait pu obtenir un triomphe.
Pour ne rien arranger, le Typhon Cobra, que tout le monde a très vite rebaptisé "Typhon Halsey" a encore assombri un peu plus le portrait d'un chef chez qui l'impétuosité et le mauvais caractère obscurcissent trop souvent le jugement.
Le 18 décembre, une bonne partie de la Flotte s'est en effet retrouvée au beau milieu d'un typhon qu'Halsey, pourtant prévenu mais réticent à interrompre ses opérations aux Philippines, a mis trop longtemps à éviter. Résultat : trois destroyers coulés, une centaine d'avions engloutis et près de 800 marins noyés sous les flots en furie... soit davantage de morts et de destructions que n'en avait subi la Navy lors de la Bataille de Leyte !
Mais MacArthur n'est pas épargné non plus, dont la victoire a pris bien plus de temps, et mobilisé bien plus de moyens, que prévu. Et d'aucuns commencent à se demander si la reconquête des Philippines, loin de précipiter la chute du Japon, ne va pas en réalité en retarder la fin.
Ils n'ont encore rien vu...
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