samedi 20 février 2010

2540 - "sans égard au désir des intéressés de retourner ou non en Russie"

... à la Conférence de Téhéran, fin 1943, Churchill a exprimé sa préoccupation à l'égard des prisonniers de guerre occidentaux

Bon nombre de ceux-ci sont en effet détenus dans des camps qui, à l'instar du célèbre Stalag Luft III (1) sont situés dans des zones qui seront plus que probablement libérées par l'Armée rouge et non par les forces anglo-américaines.

Staline ne risque-t-il pas - et c'est d'ailleurs ce qui va arriver - de se servir de ces centaines de milliers de Britanniques, Américains ou Français comme monnaie d'échange, afin d'obtenir le rapatriement des citoyens soviétiques qui, ayant ou non œuvré au profit du Reich, ont quant à eux toutes les chances de se retrouver dans des territoires sous administration occidentale ?

Vu le lourd passif de l'URSS en matière de Droits de l'Homme, et aussi le sort réservé par les Soviétiques aux prisonniers de guerre allemands (2), qui doivent tous "expier leurs crimes" d'une manière ou d'une autre, il ne faut pas grand effort d'imagination pour deviner celui qui sera réservé aux citoyens soviétiques - et a fortiori à ceux d'entre eux ayant pris les armes au profit de l'Allemagne - s'ils retombent entre les mains de Staline.

Comme on ne peut pas non plus compter sur la candeur de ces derniers, leur rapatriement sera donc forcé, ce que reconnaît le Département d'État américain dés septembre 1944, en soulignant que le dit rapatriement sera effectué "sans égard au désir des intéressés de retourner ou non en Russie" (3)

En conséquence, dés la mi-avril 1945, les Alliés occidentaux vont se mettre à rassembler, puis à expulser manu militari vers l'URSS, tous les "citoyens soviétiques", en ce et y compris les ressortissants des États baltes qui n'ont pourtant été "soviétiques" que moins d'un an, soit d'août 1940 à juillet 1941 !

Pour faire bonne mesure, on va également y ajouter les binationaux (par exemple les Russes titulaires d'un passeport français ou britannique) et, bien entendu, les femmes et les enfants, avant d"expédier le tout par wagons entiers vers l'URSS et, souvent, une mort certaine...

(1) immortalisé en 1963 par le film "La Grande Évasion"
(2) sur quelque 3 millions de soldats allemands faits prisonniers par les Russes, seule la moitié revit l'Allemagne en vie, dix ans plus tard

(3) Ailsby, op. cit., pages 181-182

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