vendredi 25 décembre 2009

2483 - "En se jetant à la gorge du colosse russe, le Chancelier a sauvé l’Europe !"

… en France également, le déclenchement de l’Opération Barbarossa est accueilli avec des cris d’enthousiasme par les Collaborationnistes, au premier rang desquels on trouve Jacques Doriot qui, comme tant d’autres leaders de l’ultra-droite européenne, a débuté sa carrière politique à la gauche et même à l’extrême gauche de l’échiquier, puisqu’il fut chef de file des jeunesses communistes françaises, et un des membres les plus éminents du PCF avant d’en être brutalement exclu , en juin 1934.

Ulcéré, Doriot a ensuite créé son propre parti politique, le Parti Populaire Français (PPF), lequel a progressivement glissé de l’extrême-gauche à l’extrême droite à mesure que Doriot lui-même s’éloignait de Moscou pour se rapprocher de Berlin.

Condamné à vivoter dans l’ombre du Maréchal après l’armistice de 1940, Doriot va immédiatement réaliser le formidable potentiel que représente l’invasion de l’URSS pour lui-même et son parti.

En attaquant l’URSS, écrit Doriot, Hitler a fait preuve "d’une lucidité sans pareille" et a déjoué "avec une géniale rapidité dans la décision, le coup qui visait l’Europe" car, ajoute-t-il, "ce n’est pas l’Allemagne hitlérienne qui était menacée, mais toute l’Europe".

"En se jetant à la gorge du colosse russe, le Chancelier a sauvé l’Europe !" (2), renchérit Marcel Déat, concurrent direct de Doriot, et lui aussi issu de la gauche, en l’occurrence de la SFIO.

Pacifiste et neutraliste en 1939, Déat a tout fait pour empêcher la France de se ranger aux côtés de la Pologne et de déclarer la guerre à l’Allemagne ce qui, en toute logique, l’a rangé parmi les partisans de Pétain et Laval au lendemain de l’Armistice.

Mais Déat veut davantage. A la "Révolution Nationale" du Maréchal, il oppose donc une "Révolution Nationale-Socialiste" dont le nom veut tout dire et qui l’incite, en février 1941, a créer le Rassemblement National Populaire (RNP), ouvertement collaborationniste mais contraint lui aussi à faire de la figuration en raison de l’immense popularité personnelle de Pétain

Avec la moitié de son territoire national occupé par les troupes allemandes, et de nombreux ultra dans ses propres rangs, le gouvernement du dit Pétain n’a évidemment d’autre choix que de rompre ses relations diplomatiques avec Moscou, et de se débarrasser des diplomates soviétiques, contraints de quitter Vichy le 1er juillet 1941.

Pour Pétain, qui un an plus tôt avait refusé d’entrer en guerre contre l’Angleterre, il n’est cependant pas question d’aller plus loin et de déclarer la guerre à l’URSS, au grand dam des Collaborationnistes qui espéraient mieux mais ont déjà mis sur pieds une solution de rechange…

(1) Giolitto, op. cit., page 8
(2) ibid, page 9


1 commentaire:

Anonyme a dit...

Encore une fois, votre blog est remarquable, surtout en ce qui concerne sa dimension de vulgarisation.

Cela dit, cet article compte deux erreurs sémantiques, voire historiques.

La première : Jacques Doriot n'a certes pu quitter le PCF en 1934, puisqu'à cette époque, le F n'avait pas été ajouté. Le détail a son importance, politiquement, puisque le F sera rajouté en 1943 suite à la dissolution de l'Internationale, généralement interpretée comme un signe d'appaisement de Staline à ses alliés occidentaux en pleine guerre, alors qu'il réclame à corps et à cris l'ouverture d'un second front et qu'il profite par ailleurs grandement des livraisons de matériel allié. C'est aussi un signe qui permet de jauger la valeur du ralliement du PC français aux thèmes patriotiques, en pleine tentative de constituer un front uni de la Résistance entre des organisations aux motifs idéologiques antagonistes.

Seconde maladresse, l'adjectif de "gauchiste" appliqué à Doriot et Déat. Certes cela peut vouloir simplement dire "de gauche", mais en matière politique, et ce depuis des décennies, "gauchiste" est le terme utilisé pour qualifier les forces à gauche des communistes orthodoxes.