jeudi 13 août 2009

2349 - MAD

... Autrefois, c’était le chef de la tribu, le monarque de la Cité, et finalement le Parlement, qui décidait où et quand débutaient et se terminaient les guerres.

Mais lorsqu’elles sont montées sur des missiles intercontinentaux, ou transportées par des bombardiers à réaction, les armes nucléaires se moquent des conventions et de la bienséance.

Elles peuvent frapper à l’autre bout du monde en quelques minutes, en quelques heures au maximum, ce qui ne laisse évidemment pas le temps à de formidables analyses politiques ou à de profonds débats philosophiques. Et vu leur nombre et leur puissance de destruction quasi infinie, une guerre nucléaire a toutes les chances de débuter durant le sommeil des ministres, députés et sénateurs, et de s’achever bien avant leur réveil, par la disparition totale du genre humain

Paradoxalement, il en résulte un certain équilibre, qui est précisément celui de la terreur. En anglais, cela s’appelle la MAD, pour "Mutual Assured Destruction", ou "Destruction Mutuelle Assurée".

Mais en anglais, MAD veut aussi dire "fou", ce qui résume parfaitement le problème, attendu qu’il faudrait l’être complètement pour déclencher une guerre nucléaire dont tout le monde sait qu’elle ne ferait ni vainqueur ni vaincu mais uniquement des morts.

La sagesse commanderait sans doute aux militaires, mais aussi aux politiciens, de renoncer à une arme capable de transformer toute nouvelle guerre en véritable dernière guerre, et qui mettrait également un terme définitif à leur emploi et à tout espoir de promotion.

Mais l’arme atomique a cet avantage véritablement unique de rendre tous les pays égaux entre eux : même s’ils ne possèdent qu’un centième de la population de leurs puissants voisins, ou un millième de leur arsenal nucléaire, de petits pays comme la Corée du Nord, Israël, ou même la France, ont la capacité, au moins théorique, de leur infliger des dommages intolérables.

En réclamant, en 1958, une "Force de dissuasion nucléaire", le général de Gaulle ne fait en réalité que reprendre à son compte, en la modernisant, l’ancienne devise des fabricants d’armes, laquelle soutient que si Dieu a créé les hommes, c’est Samuel Colt qui les a rendus égaux.

"Dans dix ans, déclare-t-il, nous aurons de quoi tuer 80 millions de Russes. Eh bien je crois qu'on n'attaque pas volontiers des gens qui ont de quoi tuer 80 millions de Russes, même si on a soi-même de quoi tuer 800 millions de Français, à supposer qu'il y eût 800 millions de Français".

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