2292 - l'emballement

... au-delà de leurs qualités et défauts respectifs, Tiger et Panther demeurent tributaires des capacités de l'Industrie allemande à les produire en série.

Or, malgré tous les efforts du Ministre de l'Armement Albert Speer, et l'emploi de centaines de milliers de travailleurs-esclaves, le nombre de tanks, mais aussi de canons, d'avions ou de camions fabriqués par le Reich est et restera toujours inférieur à celui des Alliés occidentaux et soviétiques.

L'unique manière de sortir de cette impasse serait de concevoir et de fabriquer un tank, un canon ou un avion "miracle", c-à-d une arme dont la supériorité serait telle qu'elle compenserait le fait de ne pouvoir être produite qu'à un moins grand nombre d'exemplaires.

S'agissant du tank, le gigantisme apparaît comme la seule issue possible ce qui, de facto, va ouvrir un véritable boulevard aux rendements décroissants.

A 55 tonnes, le Tiger I de 1942 est déjà trop lourd pour son moteur, sa transmission et les ponts de l'époque. Le chasseur de chars Elefant, dû à Ferdinand Porsche, lui ajoute 10 cm de blindage supplémentaire à l'avant... mais aussi 10 tonnes de plus et une transmission électrique aussi sophistiquée que fragile qui, in fine, le rendent encore massif, pataud et vulnérable sur le champ de bataille.

En 1944, le Tiger II, également dû à Henschel, flirte avec les 70 tonnes, qui ne le rendent que marginalement supérieur à son aîné mais ont surtout pour effet de tuer littéralement le malheureux moteur Maybach lequel, ayant à déplacer 25 tonnes de plus que dans le Panther, doit constamment tourner à plein régime, avec les effets que l'on devine sur sa fiabilité et sa consommation.

Et ce n'est pas fini puisque le JagdTiger, construit sur le même châssis et avec le même moteur va bientôt revendiquer 72 tonnes, du fait d'un blindage atteignant cette fois 25 cm à l'avant (!) et d'un imposant canon de 128mm, implanté dans une casemate massive, culminant non seulement à une hauteur de 3,6 mètres, mais exerçant de surcroit des contraintes intolérables sur la transmission attendu que, faute de tourelle, la seule manière d'orienter le canon à gauche ou à droite consiste à faire riper le tank tout entier sur ses chenilles

Sur le papier, le JagdTiger est et restera incontestablement le plus gros et plus puissant tank mis en service - quoique brièvement et à moins de 90 exemplaires - lors de la 2ème G.M.

Mais ce sera aussi, du fait de sa taille et sa lenteur, un des plus vulnérables à l'Aviation, et probablement un des plus fragiles, puisque la plupart d'entre eux succomberont tout bonnement à une panne moteur ou une rupture de transmission...