vendredi 5 juin 2009

2280 - le poids, c'est pas bien...

... c'est moins l'analyse objective de leurs résultats que la réduction drastique des crédits militaires, aussitôt après l'Armistice, qui va - provisoirement - mettre les chars lourds en sommeil.

Demi-sommeil seulement dans la mesure où intérêts politiques et économiques se conjuguent pour fabriquer et mettre en service, bien qu'en petites séries, divers mammouths hérissés de canons et de mitrailleuses, et pour la plupart dessinés et commandés durant la guerre, à commencer par une centaine de Mark VIII "Liberty" anglo-americano-français, lesquels reprennent le concept et la forme des modèles précédents,... en leur ajoutant deux mètres de plus en longueur (désormais près de 11 mètres), une dizaine de tonnes sur la balance (environ 40 au total), ainsi qu'un véritable moteur d'avion - en l'occurrence un V12 Liberty de 300 CV

A peine moins longs (10,27 mètres), mais encore plus hauts (4 mètres), et surtout beaucoup plus lourds (70 tonnes !) les 10 chars 2C français de 1918 possèdent la grâce et l'élégance de wagons de chemin de fer, ainsi que, sans doute pour les meubler un peu, deux tourelles, un canon de 75mm quatre mitrailleuses légères, 12 ou 13 hommes d'équipage et deux moteurs Mercedes de 180 CV chacun (ou deux Maybach de 250 CV)

Tout aussi monstrueux, mais plus tardifs, les T-35 russes de 1933 alignent pour leur part pas moins de cinq (!) tourelles, trois canons (un 75mm dans la tourelle centrale et un 45mm dans deux tourelles diagonales), six mitrailleuses (dont une dans chacune des deux autres tourelles diagonales) et un équipage de 11 personnes, le tout pour un poids de 50 tonnes qui apparaît comme la seule chose à peu près raisonnable de l'ensemble.

Quelles que soient leurs origines et leurs caractéristiques particulières, ces trois tanks - et tous leurs homologues construits peu ou prou selon les mêmes recettes - partagent cependant le même défaut fondamental : la multiplicité des armes et des hommes d'équipage indispensables à leur fonctionnement, impose non seulement une silhouette haute et massive - donc très vulnérable aux tirs ennemis - mais surtout un blindage fort mince si l'on veut maintenir le poids de l'ensemble dans les limites du raisonnable et celles d'un moteur constamment au bord de l'infarctus.

Malgré ses 40 tonnes, le blindage maximum du Mark VIII ne dépasse pas 16mm d'épaisseur, celui du T35 atteint à peine 30mm pour un poids total de 50 tonnes, et celui du 2C 45mm pour 70 tonnes... alors que, par comparaison, un fort modeste et minuscule char léger comme le M3A1 "Stuart" américain de 1941 dispose d'un blindage maximal de 50mm pour un poids inférieur à 15 tonnes !

En conséquence, bien que fort impressionnants en apparence, ces colosses s'avèrent en réalité désespérément fragiles : ainsi, tous les T-35 russes employés lors de la guerre russo-finlandaise de 1940 tomberont en panne ou seront mis hors service par l'artillerie finlandaise; les Français n'oseront pas employer leurs 2C au combat... si ce n'est, en 1939, dans des court-métrages de propagande contre de faux bunkers allemands; et les Américains préféreront, en 1932, revendre leurs Mark VIII aux Canadiens, lesquels ne les utiliseront que pour l'entraînement...

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