2260 - kolossal

... quand on le voit sur photos pour la première fois, quand, rendu incrédule, on en découvre ensuite les caractéristiques, on se dit que seule la folie furieuse, et la volonté de démontrer au monde entier que l'Allemagne, décidément, en avait une plus beaucoup grosse que les autres, peuvent expliquer la genèse, la fabrication et même la mise en service d'un canon géant de 1 350 tonnes (!) doté d'un tube de 33 mètres de long en calibre 800mm, et en mesure d'expédier à 40 kilomètres un projectile affichant le poids, lui aussi record, de 7 tonnes !

L'histoire de ce monstre, officiellement dénommé "80 cm Kanone (E) Schwerer Gustav", mais plus connu sous son diminutif de "Dora", commence en 1934, quand le nouveau Chancelier Adolf Hitler se prend à rêver d'une pièce d'artillerie cyclopéenne, capable d'écraser à distance, comme du carton, les fortifications de la Ligne Maginot.

Considérant la robustesse de celle-ci, il faut à l'évidence une pièce d'artillerie de très gros calibre, bien plus grosse donc que les Bertha de 420mm de la Première Guerre mondiale.

Si Rheinmetall est déjà occupée à concevoir un mortier géant en mesure de relever pareil défi, cette arme - le futur Karl de 600mm - ne pourra tirer qu'à 7 ou 8 kilomètres de distance, ce qui le placera donc sous la menace permanente de l'artillerie française laquelle, on s'en doute, fera l'impossible pour la réduire au silence.

L'idéal serait donc de disposer d'une pièce d'artillerie non seulement de très gros calibre, mais également de grande portée, c.-à-d. d'une version modernisée - et surdimensionnée - du défunt "Lange Max" de 1915.

Déjà créateur du "Lange Max", mais aussi du "Bertha" et de la quasi-totalité des canons lourds allemands, Krupp pense avoir trouvé la solution sous la forme d'une monstrueuse pièce de 800mm, que le Reich commande en deux exemplaires dès 1937.

Mais quand la Wehrmacht envahit et terrasse la France, au printemps 1940, le premier exemplaire du plus gros canon de l'Histoire n'est toujours pas terminé - pas plus d'ailleurs que le mortier Karl.

Il faut dire que le défi technique est - tout comme l'arme - carrément "kolossal"