samedi 8 août 2009

2344 - éviter la récidive

... Mitchell, Douhet, Trenchard et tant d’autres avaient tort : dans les démocraties et, a fortiori, dans les dictatures où le patriotisme est érigé en vertu cardinale et où le simple fait de ramasser un tract ennemi peut valoir condamnation à mort et exécution, il ne peut y avoir de révolte populaire ni d'appel décisif à la cessation des hostilités, et ce quel que soit le nombre de cadavres éparpillés sur les trottoirs.

Conçu comme moyen de précipiter une paix rapide, le bombardement stratégique des villes de la dictature est nécessairement voué à l'échec, faute d'une opinion publique davantage réceptive au message des bombes qu'à celui des fusils maniés par les différentes milices restées fidèles au régime.

Même sur le strict plan industriel, jamais les bombes larguées sans retenue sur Cologne, Berlin, Hambourg ou Tokyo ne sont parvenues - et c’est quand même un comble - à ralentir sérieusement la production industrielle d’armements, si ce n’est dans les dernières semaines du conflit ou dans des pays, comme le Japon, où rien n’avait été prévu pour délocaliser les usines dans des endroits (forêts, mines, tunnels, bunkers,…) moins exposés aux bombes

Mais les dites bombes ont créé une telle quantité de destructions, et un tel état d'épuisement général, qu'elles ont réussi à convaincre les populations vaincues de la réalité de leur défaite et de la folie de chercher à en tirer revanche.

Pour la majorité des Allemands, dont un certain caporal Hitler, l'armistice du 11novembre 1918 avait en effet été ressenti comme une humiliation et une trahison.

Invaincue sur le terrain, combattant encore à l'extérieur de ses frontières, et n'ayant pas eu à souffrir de destructions notables sur son sol, l'Allemagne toute entière ne s'était pas estimée vaincue, s’était cherchée des boucs émissaires – les Juifs et les communistes - et s'était empressée de repartir en guerre une génération plus tard afin de laver l’affront et réparer ce qu’elle considérait comme une injustice et une erreur historique.

En mai et en août 1945 en revanche, et tant en Allemagne qu’au Japon, le constat est implacable et parfaitement compris de tous : l'armée est battue, les villes détruites et le pays tout entier soumis à l'occupation de ses vainqueurs.

Contre toute attente, le bombardement stratégique des villes n'a pas empêché la guerre. Il n'en a probablement même pas hâté la fin.

Il a simplement évité qu'elle ne recommence 20 ans plus tard...

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