2220 - la nécessité des compromis

... en vérité, la "Loi des rendements décroissants" appliquée à l'Armement souffre de l’étrange paradoxe d’être aussi facilement compréhensible par le quidam ordinaire que régulièrement oubliée, voire niée, par les protagonistes de tous les conflits armés.

Mais pour appréhender cette Loi, il importe au préalable de bien comprendre qu'une arme est toujours le résultat d'un compromis entre des qualités souvent contradictoires et les défauts inséparables de ces qualités.

Par exemple, celui qui souhaite un canon capable d'expédier un projectile à grande distance veut également que le dit canon reste facile à déplacer d'un endroit à un autre; celui qui réclame un nouveau bombardier plus rapide le rêve aussi économique et facile à entretenir que l'ancien; et celui qui conçoit un tank l'imagine à la fois puissamment armé, fortement blindé et extrêmement rapide.

Hélas, la réalité est souvent toute autre : le canon à longue portée est aussi pesant qu'encombrant; le nouveau bombardier est plus rapide mais aussi bien coûteux et complexe que son prédécesseur; et même l'ingénieur le plus doué finit par se rendre compte que rien ne sortira de sa planche à dessins s'il ne se résigne pas à sacrifier la puissance de feu, le blindage ou la vitesse.

Compromis obligatoire, l'arme nouvelle doit également représenter un avantage décisif sur celle qu'elle entend remplacer - le canon est bien plus performant que la catapulte, et le chasseur à réaction que le chasseur à hélice - mais cela ne signifie nullement qu'elle ne soit pas améliorable, et parfois largement.

En abandonnant le bronze au profit du fer, l'épée gagne dramatiquement en solidité et en efficacité; en adoptant l'obus en remplacement du boulet, le canon reprend l'ascendant sur la cuirasse; en fiabilisant ses composantes mécaniques, le tank parvient enfin à tenir ses promesses

Hélas, le mieux finit toujours par devenir l'ennemi du bien...