samedi 21 février 2009

2176 - "la psychonévrose n'est pas un problème dans l'armée russe"

... Mutatis mutandis, les défaillances vécues par les soldats américains dans le Cotentin se retrouvaient également parmi les soldats britanniques et canadiens, quant à eux toujours immobilisés devant Caen, et ce même si leurs généraux étaient beaucoup moins enclins que les généraux américains à les reconnaître comme cas psychiatriques, préférant, par tradition, les attribuer à la simple lâcheté et au manque de "force morale",... que le renforcement de la célèbre discipline britannique suffirait à endiguer.

Les résultats obtenus par les médecins et psychiatres américains s'avérant finalement bien meilleurs, et leurs propres ressources humaines n'étant pas davantage inépuisables, Britanniques et Canadiens n'eurent au bout du compte pas d'autre choix que de s'aligner sur leurs alliés d'outre-Atlantique, et de mettre en œuvre les mêmes programmes de dépistage et de traitement des soldats défaillants, lesquels, pour la seule 3ème Division d'Infanterie britannique représentaient pas moins de 20 % des malades et blessés.

Nonobstant, l'étroitesse de la frontière séparant la véritable défaillance médicale de la simple simulation opportuniste ne facilitait pas la tâche des psychiatres,... et continuait d'apporter de l'eau au moulin des généraux qui, quelle que soit leur nationalité, persistaient dans l'antique rhétorique d'un appel à l'Honneur et au  Devoir du soldat,... puissamment secondé par la menace de châtiments corporels pouvant aller jusqu'à la Mort.

De manière pour le moins directe et brutale, le général Hawley résumait ce point de vue, encore fréquent au sein des armées alliées.

"Une certaine proportion de soldats existe qui est plus effrayée par l'ennemi et de ce que l'ennemi peut lui faire que par le fait d'être considérée comme un pleutre. Néanmoins, une peur encore plus puissante peut être inspirée (...) Si chaque soldat savait qu'il peut être exécuté pour couardise, tirage au flanc ou automutilation, la grande majorité des mauviettes choisirait l'issue la plus favorable - combattre l'ennemi (...) La simple vérité, c'est que, assisté, encouragé et embrouillé par trop de théorie psychiatrique, notre ministère de la Guerre et nos chefs n'ont pas abordé le problème de façon réaliste (...) Il y a un fait qu'aucun neuropsychiatre ne peut expliquer : la psychonévrose n'est pas un problème dans l'armée russe. Les Russes punissent la psychonévrose par la Mort"
(1)

De fait, au moment-même où les médecins et psychiatres alliés s'efforçaient à grands frais de soigner déserteurs et soldats apeurés, dans l'espoir de pouvoir un jour les renvoyer au combat, les officiers et généraux russes, et dans une moindre mesure allemands, soignaient les leurs à grands renforts de pelotons d'exécution.

Mais quelle que soit l'option retenue, la véritable guérison ne pouvait être obtenue que par une victoire décisive sur l'adversaire, laquelle, pour les Alliés engagés en Normandie, passait nécessairement par une percée dans le Cotentin ou alors devant Caen, où Britanniques et Canadiens piétinaient pour leur part depuis le 6 juin...

(1) ibid, pages 308-309

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