mardi 14 août 2007

1619 - l'enfer du mythe

... si la vitesse élevée du 262 lui permettait d'échapper sans trop de mal aux chasseurs d'escorte alliés, elle constituait plutôt un handicap face aux bombardiers qu'il devait détruire.

Volant presque trois fois plus vite que sa cible, le pilote du 262 ne disposait en effet que d'une seconde ou deux pour viser, tirer, et dégager en catastrophe. Il fallait donc des yeux de lynx et des réflexes fulgurants, dont ne disposaient pas la plupart des jeunes pilotes.

Bien que très puissant, l'armement lui-même n'était pas exempt de défauts : les quatre canons de 30mm s'enrayaient très facilement lors des manoeuvres brutales, et leur portée utile ne dépassait pas 300 mètres. On avait bien tenté de les remplacer par un seul canon antichar de 50mm, mais ce dernier s'enrayait encore plus vite, souvent dès le premier obus tiré.

Les réacteurs continuaient pour leur part de faire preuve d'un manque de fiabilité désespérant. Leur durée de vie ne dépassait pas 25 heures... dans le meilleur des cas. En vol, on ne savait jamais si l'un des deux, ou les deux à la fois, n'allait pas tomber en panne, et contraindre à un atterrissage précipité.

Même lorsqu'ils fonctionnaient normalement, les phases de décollage et d'atterrissage constituaient un calvaire. La poussée insuffisante imposait une distance de décollage interminable, et rendait l'avion très vulnérable à basse vitesse. Au retour, la charge alaire élevée exigeait une approche fort longue. Si le pilote tentait de remettre les gaz, il s'écoulait une éternité avant que l'avion recommence à accélérer. Du reste, toute remise des gaz un peu brutale se traduisait par l'extinction du réacteur, qu'il était impossible de redémarrer.

Les pilotes alliés, qui connaissaient les détestables caractéristiques du 262 à basse vitesse et basse altitude, avaient naturellement pris l'habitude de rôder autour des aérodromes allemands et d'attendre tranquillement leur heure, ou plus exactement le décollage ou l'atterrissage d'un 262, qu'ils pouvaient alors cueillir sans autre souci que la Flak qui protégeait les aérodromes.

En résumé, si le 262 préfigurait incontestablement la voie de l'Avenir, sa mise en service s'était faite bien trop tôt, et de manière par trop bâclée. Les Britanniques et les Américains, qui travaillaient sur des machines semblables, étaient évidemment confrontés aux mêmes problèmes, mais procédaient plus lentement, et de manière plus réfléchie.

Eux, évidemment, avaient tout leur temps, et aucune obligation de faire un miracle...

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