mardi 31 janvier 2006

1059 - et pourtant, elle vole...

... en décidant d'abandonner le programme du bombardier XB-35 à hélices, l'USAAF avait néanmoins permis à Northrop d'achever la construction de la quinzaine d'exemplaires de présérie, qui serviraient de bancs d'essais volants avant d'être progressivement convertis en version YB-49 à réaction.

Débutés en juin 1946, les essais des XB-35 se poursuivirent jusqu'en 1948. S'ils permirent d'accumuler une expérience considérable sur le comportement des ailes volantes, ils confirmèrent également leur instabilité congénitale et l'inadéquation complète des moteurs Pratt & Whitney aux XB-35, sur lesquels ils vibraient et surchauffaient excessivement.

Débutée dès juin 1945, la conversion de deux exemplaires de XB-35 à hélices en YB-49 à réaction prit bien plus de temps que prévu. Le premier vol n'eut en effet lieu qu'en octobre 1947. Il avait en effet fallu adapter tant bien que mal une structure qui, initialement prévue pour quatre moteurs à hélices, n'était pas dessinée - ni dimensionnée - pour recevoir huit moteurs à réaction, leurs prises d'air et - surtout - leurs énormes réservoirs de carburant.

A plus de 800 kms/h, la vitesse maximale de la version à réaction effectuait un bon de près de 200 kms/h sur la version à hélices. Mais la consommation bien plus élevée des réacteurs réduisait du même coup l'autonomie de plus de 50%, passant d'environ 12 000 à moins de 5 000 kms (!) Dans ces conditions, il n'était plus possible de présenter le YB-49 comme "bombardier transatlantique". Bien que jugées considérables en 1941, ses capacités d'emport le rétrogradaient d'ailleurs au rang de "bombardier moyen" en 1947, fort loin de celles du futur Boeing B52.

Dit autrement, la merveilleuse aile volante Northrop avait été rattrapée par les progrès réalisés sur les avions conventionnels, sans que soit pour autant résolus les problèmes de stabilité qui accablaient le programme depuis le début. Il aurait fallu concevoir un tout nouvel avion, avec des réservoirs véritablement adaptés à la consommation gargantuesque des réacteurs de l'époque. L'Air Force, déjà engagée dans le programme des futurs bombardiers B-47 et B-52, n'en avait pas les moyens. L'écrasement du second prototype, le 5 juin 1948, ne fit rien pour arranger les choses.

Les responsables de l'Air Force avaient tout simplement perdu la foi dans les ailes volantes, ainsi que dans les capacités de Northrop à en faire un jour des machines véritablement opérationnelles. La conversion des derniers XB-35 à hélices en YB-49 à réaction fut annulée, et les avions survivants envoyés à la ferraille les uns après les autres. Le 15 mai 1950, le programme fut définitivement enterré. Le même jour, le premier prototype fut entièrement détruit par un incendie provoqué par un accident sur l'aire de parking de la base d'Edwards.

Cette fois, c'était vraiment la fin, et plus personne n'entendit parler des ailes volantes pendant plus d'une génération, jusqu'à ce que les progrès de l'électronique embarquée permettent enfin à leur lointain héritier - le bombardier furtif B-2 - de réaliser leurs promesses...

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