lundi 28 novembre 2005

995 - "Dans cette soupe, ils jetaient une ou deux têtes de boeuf, avec les dents, les poils et les yeux"

... durant toute la guerre l'Allemagne nazie manqua cruellement d'une main d'oeuvre qu'elle s'obstina pourtant à faire assassiner par millions alors qu'elle aurait très bien pu servir dans ses usines.

Même lorsqu'elle était sélectionnée pour être mise à l'emploi plutôt qu'envoyée dans les usines de la Mort, la main d'oeuvre concentrationnaire juive était à ce point maltraitée et sous-alimentée que sa productivité - déjà fort réduite par principe - devenait carrément insignifiante.

Ainsi, au Flughafenlager ("camp de l'aéroport") de Lublin, le SS Albert Fischer vit son collègue Dietrich "battre le [travailleur] Juif si longtemps qu'il gisait évanoui sur le sol. Là dessus, Dietrich ordonna aux autres juifs de le déshabiller complètement et de lui verser de l'eau sur la tête. Quand le Juif a repris connaissance, Dietrich s'est emparé des mains du Juif qui avait déféqué par terre, les a plongées dans les excréments et l'a forcé à manger ses excréments (...) Le soir, Fischer apprit que le travailleur juif en question était mort"

"Le pain était dur et à peine mangeable", raconta une travailleuse juive. "A midi, il y avait une soupe que nous appelions la soupe de sable : ils la faisaient avec des pommes de terre et des carottes qu'ils ne s'étaient pas donnés la peine de nettoyer. Dans cette soupe, ils jetaient une ou deux têtes de boeuf, avec les dents, les poils et les yeux"

Tout Juif trop affaibli par la sous-alimentation, la maladie ou les coups, et donc rendu incapable de travailler, était naturellement abattu sur le champ, ou envoyé au camp d'extermination de Majdanek.

Comme le souligne Goldhagen, "tout Juif surpris à dérober ne serait-ce que des épluchures de pommes de terre ou des sous-vêtements usagés était aussitôt réputé "saboteur" et abattu. Accepter, malgré la règle, un morceau de pain donné librement par un Allemand ou un Polonais de rencontre était aussi du "sabotage". (...) Puisque ces actes étaient interdits, les coupables méritaient la peine de mort, selon différentes méthodes, en fonction de l'humeur des Allemands : s'ils avaient envie de la décharge émotive que procure un coup de pistolet, ils abattaient le Juif sur-le-champ; s'ils préféraient voir la chair et les os éclater sous le fouet ou le gourdin, ils le battaient à mort; s'il leur fallait quelque chose de plus solennel, ils choisissaient la pendaison

(...) Toute erreur dans le travail ou une cadence un peu trop lente étaient punies soit de "légers" coups de fouet, soit de l'affectation à une corvée de punition, soit, si le SS, homme ou femme, avait envie d'exercice, par cinquante coups de fouet sur le corps dénudé. On pouvait aussi être tué sur-le-champ. De plus, les Juifs savaient qu'ils risquaient à tout moment d'être envoyés à la chambre à gaz de Majdanek, et le simple fait d'attirer l'attention d'un garde pouvait y suffire"

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