vendredi 22 avril 2005

775 - la nature des dictatures

... Pour Trenchard, pour Douhet, pour Mitchell, pour les principaux théoriciens des années 1920, le bombardement stratégique des villes ne pouvait qu'arrêter la production de guerre et pousser les civils à exiger, et obtenir, une paix rapide.

Ainsi devait-il en être, en toute logique, dans les démocraties normales, où l'expression de la volonté des citoyens avides de Paix finirait bien par vaincre les bellicistes siégeant au gouvernement, sous peine de provoquer des insurrections comme celle qu'avait précisément connue l'Allemagne en 1918.

Mais le Japon, l'Allemagne et l'URSS de 1939 à 1945 ne sont pas des "démocraties normales", mais bien des dictatures absolues, capables de sacrifier sans sourciller des milliers de leurs soldats et des millions de leurs civils pour gagner la guerre, ou du moins ne pas la perdre.

Elles peuvent de surcroît s'appuyer sur un nombre considérable d'indicateurs et de délateurs, toujours prêts à aider une police qui, bien qu'omnipotente, ne peut surveiller tout le monde et être partout à fois.

En 1937 par exemple, la Gestapo ne dispose que de 126 officiers pour surveiller les agissements des 500 000 habitants de Düsseldorf, de 43 à Essen pour 650 000 habitants, et... de 22 à Würzburg, pour les 840 000 habitants de toute la basse Franconie (!) Impossible, dans ces conditions, de repérer les "éléments subversifs" en s'en remettant au seul flair des rares agents en place. La loi sur les "comportements malveillants" du 21 mars 1933 allait s'en charger, et être à l'origine d'une gigantesque vague de dénonciations, le plus souvent anonymes.

Partout dans le Reich, des centaines de milliers de dénonciations furent ainsi collectées. Dans les archives de la seule Gestapo de Düsseldorf, on retrouva après guerre 72 000 dossiers de dénonciation, sans compter les quelque 30 000 qui auraient disparu (!)

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