dimanche 26 septembre 2004

567 - toujours présent, jamais brillant

... s'il est des avions qui se rendirent célèbres par leurs performances, il en est d'autres qui le devinrent sinon par hasard, du moins parce qu'ils avaient le mérite d'être les seuls disponibles en temps et lieux.

Le Curtiss P40 est de ceux-là. Ses origines-mêmes se perdent pour ainsi dire dans la Nuit des Temps. Né P36, et avec un moteur en étoile, en 1935, il devint P40 et avec un moteur en ligne trois ans plus tard.

Plusieurs centaines de P36 furent livrés à la France avant l'armistice de 1940. Devenus "Hawk 75", ils s'y comportèrent mieux que les chasseurs de construction française, mais furent constamment surclassés par les Messerschmitt 109 allemands.

A lui seul, l'épisode français résume toute la carrière du P36-P40 et de ses multiples dénominations françaises, américaines ou britanniques : un avion solide mais de second rang, que l'on jugea plus sage de céder par milliers à l'Union soviétique, ou d'envoyer sur des théâtres d'opérations secondaires, comme le Moyen-Orient, la Birmanie ou la Chine, le plus souvent dans le cadre de l'appui des troupes au sol.

Et plutôt que de concevoir un avion entièrement nouveau, les ingénieurs et comptables de Curtiss préférèrent prolonger la vie d'un appareil fondamentalement dépassé mais qui avait le mérite d'être disponible et sans vice majeur.

Assurément rentable à court terme, cette politique hypothéqua l'avenir de Curtiss, qui cessa ses activités en 1950. Le plus étonnant, en définitive, fut le rôle que joua, et que joue encore, dans la mémoire collective cet appareil construit à plus de 16 000 exemplaires et exporté dans une vingtaine de pays.

Car s'il combattit sur tous les fronts et sous de multiples livrées, s'il ne fut pas le seul ni le premier avion à arborer une gueule de requin, le P40 fut d'abord et avant tout la monture des "Tigres Volants", de ces volontaires américains combattant en Chine, et que Chang Kai Chek rétribuait en or pour chaque avion japonais abattu.

Plus qu'à ses performances propres, c'est grâce à ces pilotes, et à un capot-moteur qui se prêtait particulièrement bien à cette forme particulière d'art guerrier que l'on appelle le "nose-art", que le P40 entra dans la légende...

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