... s'il est des avions médiocres parce que respectant un médiocre cahier des charges, il est d'autres d'exceptionnels parce que précisément conçus en dehors de tout cahier des charges.
Le De Havilland "Mosquito" est de ceux-là.
C'est en 1936 que les ingénieurs de De Havilland proposèrent un bombardier non seulement construit en bois, mais ne comptant que sur sa vitesse pour se défendre.
Face aux technocrates et autres "spécialistes" ne jurant que par des "forteresses volantes" métalliques et abondamment pourvues de tourelles et de mitrailleuses, la proposition ne recueillit que sarcasmes. Tout au plus concéda-t-on au constructeur le droit d'en fabriquer une cinquantaine d'exemplaires pour la reconnaissance-photo, qui furent par ailleurs décommandés à trois reprises après l'évacuation de Dunkerque.
Le "Mosquito" aurait dû voler début 1939. Son prototype n'effectua son premier vol que fin 1940, piloté par le propre fils du constructeur. A la stupéfaction des officiels, ce bimoteur en contreplaqué, muni des mêmes Rolls-Royce "Merlin" que le Spitfire, vola 30kms/h plus vite que ce dernier, pourtant deux fois plus léger (!)
Et cet avion que personne ne désirait devint rapidement un des plus importants succès de l'industrie britannique. Accepté comme simple avion de reconnaissance, il devint chasseur de nuit lorsqu'on s'avisa qu'il y avait suffisamment de place dans le nez pour y loger la bagatelle de quatre canons de 20mm, quatre mitrailleuses de 7.7mm et même un radar... Il fut aussi bombardier, chasseur-bombardier, éclaireur, marqueur de cibles et avion-torpilleur. Il fut adopté par les Canadiens, les Australiens, les Américains, les Chinois et même les Israéliens, après la guerre.
Munis de réservoirs supplémentaires, et agissant principalement comme corsaires, isolés ou en petits groupes, les Mosquito sillonnèrent l'Europe entière, photographiant, mitraillant ou bombardant tout ce qui leur passait sous les ailes.
Construite à près de 8 000 exemplaires alors qu'on n'avait prévu de n'en fabriquer que 50 (!), la "merveille en bois" fut aussi, jusqu'à l'apparition du Messerschmitt 262 à réaction, à ce point invulnérable à tout ce que la Luftwaffe pouvait lui opposer que celle-ci exigea de Focke-Wulf qu'il lui construise une réplique.
Copie presque conforme du "Mosquito", et également construit en contreplaqué, le Focke-Wulf Ta-154 "Moskito" volait presque aussi bien et s'apprêtait à entrer en service jusqu'à ce jour du 28 juin 1944, lorsque le second prototype se désintégra en plein vol.
Après examen de l'épave, il apparut que les colles sur lesquelles il avait fallu se rabattre après la destruction de l'usine Tego par les Britanniques comportaient des acides qui rongeaient tout simplement le bois. La carrière du "Moskito" allemand n'alla pas plus loin...
1 commentaire:
Bonjour ,
blog comme toujours instructif. Ici le texte parle de contreplaqué pour le mosquito, je crois que ce n'est pas tout à fait exact, en fait il s'agit d'une technique un peu différente, le bois moulé. Le contreplaqué est fabriqué en feuilles plates et ne peut se cintrer que suivant un seul axe (formes géométriquement développables, comme une portion de cylindre).
Le Mosquito était fait avec des bandes minces de placage de bois collées et agrafées une par une (en contrecroisant les fibres) sur un mannequin, puis temporairement habillées d'une couverture de caoutchouc . ensuite on passait le tout dans une autoclave ,une étuve hermétique spéciale, qui durcissait parfaitement la colle. cette technique permettait la réalisation de pièces courbées suivant plusieurs axes , ou courbures complexes , comme une portion de sphère, donnant toute liberté pour concevoir des formes aérodynamiquement parfaites .
Dans les années 50 les outillages de production ont été recyclés pour produire des petits voiliers de course type dériveur léger par la société Fairey Marine comme le célèbre 505, le firefly ou l'Albacore, qui bénéficiaient d'uncertain avantages sur leurs équivalents fabriqués en contreplaqué normal , qui impose des contraintes de forme et des angles vifs sur la coque (la construction à bouchain vif en langage de marin)
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