mercredi 10 juillet 2024

7977 - pas de miracle...

Le grand As américain  Francis Gabreski : 28 victoires seulement, toutes sur P-47
... il y a d’abord le fait que 91 des 104 Experten officiellement crédités de plus de 100 victoires en combat aérien ont acquis la plupart voire la totalité de celles-ci sur le Front de l'Est, c-à-d face à des adversaire soviétiques qui, au moins jusqu’à la fin de 1943, étaient aussi pléthoriques que qualitativement inférieurs, ce qui explique d’ailleurs pourquoi la quasi-totalité des Experten - en ce compris Hartmann lui-même - qui se retrouvèrent ensuite mutés à l'Ouest, avant ou après le Débarquement de Normandie, se firent descendre au moins une fois par des pilotes autrement mieux entraînés et équipés que ceux qu'ils avaient l'habitude d'affronter.

Il y a ensuite le fait que, faute de relève, la Luftwaffe s’est rapidement vue contrainte de maintenir au Front, et jusqu'à leur disparition ou épuisement complet, tous ses pilotes chevronnés, alors que, chez les Alliés, ceux-ci étaient régulièrement renvoyés à l'arrière, ou carrément mutés au pays comme instructeurs.

Volant bien plus souvent que leurs adversaires, les pilotes allemands avaient évidemment bien davantage d'occasions de se tailler un palmarès enviable : les 352 victoires créditées à Hartmann ont en effet été obtenues en quelque 1 500 missions de combat, alors que les 62 de Kojedoub, les 33 de Clostermann ou encore les 28 de Gabreski, l’ont été en respectivement 330, 432 et 166 sorties seulement.

De plus, dès 1943, la plupart des pilotes et des escadrilles de chasse alliés se virent affectés à des missions de chasse-bombardement,... et dès lors priés de s’en prendre prioritairement aux ponts, aux trains, ou aux concentrations de troupes ennemies plutôt qu’aux Me-109 et autres Fw-190 allemands qui, dans le même temps, et de leur côté, pouvaient librement continuer à affronter les chasseurs et bombardiers alliés dans le ciel

Il y a aussi, et on l’oublie systématiquement, le fait que, dès 1942, les pilotes allemands furent presque toujours contraints de combattre en infériorité numérique : volant en moyenne à un contre cinq (!) chacun d’entre-eux était donc quasi-assuré d'apercevoir un avion allié dès qu'il prenait l'air, ce qui augmentait bien évidemment ses chances de remporter une victoire, mais aussi, en corollaire,  celles de se faire lui-même descendre...
 

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Le « mystère » des scores extraordinaires des experten.
Il n’y a bien entendu pas de réponse unique à cette situation …
D’abord, la Luftwaffe disposait de pilotes de tout premier choix, des hommes habiles, bien entrainés, agressifs et courageux.
Ensuite, pendant quasiment toute la durée du conflit, la Luftwaffe a aligné des appareils excellents et qui sont longtemps restés supérieurs à ceux des alliés (exemple FW 190 versus Spitfire Mk V).
Si on examine les parcours des top scorers allemands, on constate que la majorité d’entre eux ont acquis leurs victoires sur le front de l’Est, face à une aviation soviétique mal équipée, surtout au début, et mal commandée.
Puis il y avait la doctrine d’emploi. Dans la RAF et l’USAAF, les pilotes combattaient selon des « Tours d’opérations ». Selon le nombre de missions effectuées ou de « points » attribués, le pilote avait droit à une période de repos avant de revenir au combat, ou il devenait instructeur.
La Luftwaffe maintenait ses pilotes au combat quasiment sans interruption, un congé de 15 jours de temps en temps, sans tenir compte de la fatigue, des blessures … mais donnait ainsi aux « as » la possibilité de participer à de très nombreux combats. Pour accumuler les victoires, il faut combattre souvent … et survivre.
Il faut aussi considérer qu’il y avait différentes manières d’aborder les combats aériens. Typiquement, un Leader de la RAF ou de l’USAAF conduit sa formation et veille à l’accomplissement de la mission.
Dans la Luftwaffe, le Leader a trop souvent pour objectif d’augmenter son score personnel. Il vole avec 2 ou 3 pilotes en couverture, et, ainsi protégé, s’occupe de chercher un adversaire endommagé, isolé ou peu attentif pour l’abattre et remonter se mettre à l’abri.
Au final, ces deux approches donnèrent des résultats très différents ; la Luftwaffe obtint un relativement faible nombre d’experten ayant beaucoup de victoires (réelles). Les alliés pour leur part n’ont pas eu d’as crédité d’un grand nombre de victoires, mais leurs pilotes « standard » étaient bien formés et entrainés, et ont connu un meilleur taux de survie.
Enfin, il y a les surestimations voulues et énormes des victoires qu’ils auraient remportées. C’est un phénomène commun à toutes les forces aériennes, mais les allemands l’ont porté à un point étonnant. Ils avaient besoin de héros, pour montrer leur efficacité, leur invincibilité … et les pilotes de chasse étaient les meilleurs héros qu’ils pouvaient avoir. Mais ils devaient avoir des victoires … et s’ils n’en avaient pas assez, ils ont travesti la vérité. Mais le pire, c’est qu’ils ont crû à leurs propres mensonges.
Pendant la Bataille d’Angleterre, les pilotes allemands revendiquaient des victoires fantaisistes prétendument obtenues sur les appareils de la RAF. Et ils en obtenaient l’homologation, sans filtrage ni confirmation.
Confiants dans ces chiffres, les allemands s’attendaient à voir la résistance britannique s’effondrer, faute d’appareils. Si elle manquait de pilotes, la RAF avait tous les appareils dont elle avait besoin, et ses chasseurs étaient toujours présents au rendez-vous. Alors, la Luftwaffe a préféré affirmer que la Grande Bretagne avait des capacités de production cachées. C’était vrai, mais ça n’expliquait pas tout.
Et en Russie, même les Commodores d’Escadre falsifiaient les scores, déjà énormes en soi, pour mettre leur groupe sur le devant de la scène. Cela s’est su et a été dénoncé, mais les résultats individuels ont été maintenus. Les 100 premiers top scorers allemands se sont vus attribuer au total quelques 10.000 victoires, stupéfiant ! Si ça avait été vrai, ils auraient gagné la guerre. Sur ce front, le calcul des scores réels des experten est très aléatoire, car les pertes aériennes réelles des Soviétiques ne sont pas connues.
Par contre, sur le front de l’Ouest – mieux documenté -, les scores des pilotes de chasse de la Luftwaffe étaient exagérés de plus ou moins 300% ce qui signifie que pour 10 appareils alliés perdus en combat aérien, les pilotes de la Luftwaffe recevaient entre 30 et 35 homologations.