4461 - "La couverture de chasse pour le mercredi 10 ne sera pas, je répète, ne sera pas disponible"

... 08 décembre, 23h00

Après avoir viré à l'est, le Prince of Wales précédant le Repulse de quelque 800 mètres, les six bâtiments remontent bientôt vers le nord. et le Golfe de Thaïlande, à environ 17 nœuds.

Si officiers et marins ressentent parfois une bien légitime appréhension, voire même, diront plus tard de nombreux survivants, "un mauvais pressentiment" à l'égard du combat à venir, tous n'en partagent pas moins la conviction ô combien répandue selon laquelle leurs futurs adversaires japonais - marins ou aviateurs - sont des combattants "inférieurs", et certainement très inférieurs aux allemands.

"Selon la croyance populaire, les Japonais n'étaient que des sous-fifres (...) Leurs bâtiments étaient supposés être vieux et bien trop lourds du haut, donc susceptibles de chavirer s'ils tiraient une bordée complète, et leurs avions étaient encore plus lents que nos vieux Swordfish, alors de quoi aurions-nous dû avoir peur (...) Après tout, ceci était le croiseur de bataille Repulse, et eux n'étaient que des Japs (...) On parlait beaucoup des requins entre nous, et on rigolait en se disant qu'ils allaient bientôt faire un festin de Japs (...) On ne réalisait pas vraiment à quoi on allait faire face, si ce n'est à des "bridés"" (1)

Mais sur la passerelle du Prince of Wales, un message radio reçu de Singapour peu après 23h00 vient pourtant de semer le trouble.

"La RAF espère être en mesure de lancer une reconnaissance de la côte près de Singora à l'aube du mercredi 10. La couverture de chasse [demandée] pour le mercredi 10 ne sera pas, je répète, ne sera pas disponible. Les Japonais ont d'importantes forces de bombardement basées au sud de l'Indochine et probablement aussi en Thaïlande. Le Commandement en chef pour l'Extrême Orient a demandé au général MacArthur de mener dès que possible une attaque sur les aérodromes indochinois avec ses bombardiers à long rayon d'action (2). L'aérodrome de Kota Bharu a été évacué et nous semblons perdre pied sur les autres aérodromes du nord en raison de l'activité aérienne ennemie"

(1) témoignages cités par Mahoney/Middlebrook, op cit
(2) plus de la moitié des B-17 en question avait cependant déjà été détruite aux Philippines par l'aviation japonaise...