vendredi 22 juillet 2011

3059 - le gros absent

... les États-Unis - rappelons-le une fois encore - ne se sont jamais intéressés à la Corée

Et s'ils s'y sont finalement retrouvés pris dans une nouvelle guerre, c'est bien contre leur gré... mais aussi avec la ferme intention que celle-ci demeure limitée et point trop coûteuse, raison pour laquelle les armes expédiées sur le Front seront rarement à la fine pointe du Progrès, mais plutôt de "second choix" ou carrément sorties des hangars et des dépôts où elles se contentaient - comme les Vought "Corsair" et autres Boeing B-29 - d'accumuler la poussière depuis 1945.

Car en dépit des évidences, le Pentagone ne parviendra jamais à se convaincre que la Corée n'est pas un nouveau "Cheval de Troie", soit un piège tendu à l'Amérique afin qu'elle s'y précipite avec toutes ses forces et ses armes les plus modernes, laissant ainsi le véritable objectif de Staline - l'Europe occidentale - sans défense et à la merci de l'Armée rouge.

C'est cette hantise qui, plus que tout autre chose, explique pourquoi, durant trois ans, l'USAF va employer, dans le ciel coréen, des B-29 tous rescapés de la guerre précédente et conserver, à des milliers de kilomètres de là, des Convair B-36 - et même quelques Boeing B-47 à réaction (1) - pourtant beaucoup plus performants.

Avec son immense envergure, ses six moteurs à hélice - auxquels on va rapidement ajouter quatre réacteurs ! - le B-36 est évidemment bien plus difficile à entretenir et à mettre en œuvre que le "petit" quadrimoteur B-29, mais c'est aussi un avion rare (moins de 400 exemplaires produits... dix fois moins que le B-29), et surtout, le seul bombardier américain alors en mesure, du moins en théorie, de délivrer n'importe quelle charge nucléaire en n'importe quel point de l'URSS, ce qui le rend bien trop précieux pour être employé en Corée... et le condamne donc à terminer sa carrière à la ferraille et sans jamais avoir participé au moindre combat (2)...

(1) le Boeing B-47, premier bombardier à réaction de l'USAF, entra en service en 1947. Mais la volonté de le maintenir "en réserve", et aussi de constants problèmes de fiabilité, en interdirent l'utilisation en Corée.
(2) fin 1952, quelques RB-36D de reconnaissance, basés au Japon, opérèrent néanmoins quelques vols pour photographier des objectifs en Chine et en URSS

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