samedi 24 juillet 2010

2697 - le monde du silence

... si les accidents d'avions sont aujourd'hui aussi peu nombreux que fortement médiatisés, il n'en a pas toujours été ainsi.

A une époque pas si lointaine, rares étaient en effet les pilotes qui pouvaient se targuer de prendre leur retraite sans avoir jamais "cassé du bois" à une et même plusieurs reprises.

Les pannes mécaniques, et les accidents, faisaient partie d'une routine qu'on acceptait parce qu'il n'existait d'autre alternative que de ne pas voler du tout.

Et c'était encore plus vrai chez les pilotes de chasse, constamment confrontés à des avions évoluant en permanence à la limite de leurs possibilités, et même souvent au-delà.

Déjà limites en Temps de Paix, la fiabilité et la sécurité d'emploi de telles machines devenaient carrément accessoires en Temps de Guerre : à moins de 25 heures, la durée de vie d'un réacteur de Messerschmitt 262 pouvait sembler pathétique,... mais s'avérait néanmoins supérieure à l'espérance de vie moyenne de son pilote !

En matière d'accidents comme de pertes au combat, le fatalisme était donc de règle : "on y arrivait ou on n'y arrivait pas", et si l'accident ne faisait pas de victime, l'avion détruit n'intéressait finalement que les comptables, par nature gens discrets qui se contentaient simplement d'inscrire la perte dans une entrée anonyme d'un grand registre que personne ne lisait jamais.

S'il y avait mort d'homme, en revanche, la tendance du Commandement était plutôt d'attribuer l'accident à l'ennemi, car comment avouer au père, à l'épouse ou la fiancée que le pilote tué l'avait été parce s'il s'était égaré au-dessus de l'océan, parce qu'il avait oublié de sortir le train d'atterrissage, parce qu'il avait basculé l'alimentation du moteur sur un réservoir vide, ou parce que le dit moteur avait rendu l'âme faute d'un entretien adéquat ?

Dans toutes les aviations du monde, sur tous les théâtres d'opérations, seules les pertes au combat intéressaient la Presse, et pouvaient valoir citations et même médailles.

La maladresse, l'incompétence, ou tout simplement la malchance, appartenaient quant à elles au monde du silence...

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