vendredi 11 janvier 2008

1769 - l'éternel retour

... le 9 juillet 1944, de plus en plus inquiet face à l'avancée inexorable des Alliés, le Régent Horthy décida de "lâcher du lest", et d'interdire toute nouvelle déportation de Juifs hongrois, ce qui réduisit l'infatigable Adolf Eichmann au chômage technique, et même à l'alcoolisme et la dépression, faute de nouveaux Juifs à "évacuer".

Mais le 15 octobre, Horthy fut renversé par un coup d'État orchestré depuis Berlin. Le jour-même, Eichmann convoqua Rudolf Kastzner - notable juif qui avait lui aussi participé aux tractations "Juifs contre camions" du mois d'avril - et l'accueillit d'un triomphal "Je suis de retour !"

Mais comme l'avancée inexorable de l'armée rouge menaçait à présent Auschwitz, plusieurs dizaines de milliers de Juifs furent chassés de Budapest et plutôt déportés vers Vienne, à 200 kms de là, sans vivre, sous la neige,... et à pieds (!)

Ce ne fut en vérité que le prologue des nombreuses "Marches à la Mort" qui, dans les derniers mois de 1944 et jusqu'à la fin de la guerre allaient jeter sur les routes plus de 750 000 personnes - juives ou non - encore détenues dans les camps de concentration désormais à portée des armées soviétiques.

Dans des conditions abominables, sans nourriture, sans vêtements chauds, parfois pieds nus (!), mais toujours sous la conduite de leurs gardiens et gardiennes SS, ces malheureux allaient errer des semaines durant sur les routes gelées de l'hiver à la recherche d'un autre camp, dormant dans des granges, ou parfois en plein champ, achevées comme des bêtes sur le bord des routes. De 30 à 50 % d'entre eux y trouvèrent la mort.

L'Allemagne se désintégrait de partout. Les ordres n'arrivaient plus aux gardiens qui, s'ils ne savaient plus quelle direction prendre, comprenaient du moins que la guerre était perdue et n'ignoraient pas que le nouveau régime - quel qu'il soit - appelé à succéder au Troisième Reich ne leur serait pas favorable et risquait même de les traduire en Justice, pour crimes de guerre.

Dans ces conditions, la simple bon sens aurait voulu que les bourreaux fassent enfin preuve d'humanité, libèrent leurs captifs, cherchent par tous les moyens - et ne serait-ce que par intérêt personnel - à s'attirer leur sympathie.

Ce fut tout le contraire : dans tous les camps évacués, les détenus trop faibles pour marcher furent abandonnés à leur sort, ou carrément abattus sur place, et les autres continuellement poussés droit devant eux, jour après jour, dans des marches qui, souvent, ne les conduisaient nulle part sinon à la tombe...

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