dimanche 26 février 2006

1085 - Streicher : dirty old man

... Fondateur et éditeur de l'utra-antisémite "Stürmer", Julius Streicher est un antisémite si pathologique qu'il embarrasse fréquemment les leaders nazis eux-mêmes, qui l'écartent rapidement du Pouvoir, le déchoient dès 1940 de tous ses titres et fonctions officiels, et l'assignent à résidence.

L'intéressé ne doit en vérité son salut physique qu'à l'indéfectible fidélité de Hitler envers ses partisans de la première heure : Streicher a en effet adhéré au NSDAP dès 1922, et pris part au "putsch de la Brasserie" de 1923.

Dans tous les sens du terme, Streicher est un sale type, une crapule raciste, un véritable "dirty old man",... mais assurément pas un "grand criminel" ou un "comploteur contre la Paix".

De fait, malgré toute l'antipathie qu'inspire le personnage, le Tribunal de Nuremberg n'a d'autre choix que de l'exonérer des accusations de "complot", de "crimes contre la paix" et même de "crimes de guerre". On comprend mal, dès lors, pourquoi il est néanmoins reconnu coupable de "crimes contre l'Humanité", et condamné à mort pour cette raison.

"Le fait pour Streicher d'inciter au meurtre et à l'extermination, à une époque où les Juifs dans l'Est étaient massacrés dans des conditions inqualifiables, constitue manifestement la persécution pour des raisons politiques et raciales en rapport avec des crimes de guerre au sens du Statut et un crime contre l'humanité", estime le Tribunal dans son jugement.

Cependant, comme le souligne Wieviorka, "Telford Taylor s'étonne qu'il fut condamné sans discussion à la peine de mort. Non que le procureur adjoint [américain] trouve cette peine inique; il s'étonne simplement qu'il ne soit pas mentionné dans le jugement qu'après 1940, Streicher vivait retiré dans sa ferme, que son journal, le Stürmer, alors son seul lien avec l'extérieur, ne tirât plus qu'à 15 000 exemplaires, qu'il n'avait aucun lien avec Himmler [responsable de la "Solution finale"] ni avec ceux qui, en Pologne ou en Union soviétique, perpétraient les crimes que le tribunal a longuement évoqué" (1)

A n'en point douter, seul le dégoût que Streicher inspire à ses juges a pu les conduire à une telle extrémité,... ce dont l'intéressé ne semble guère s'émouvoir. "Pourim, 1946 !" s'exclame même Streicher, faisant référence à cette célèbre fête juive, au moment où le bourreau lui passe la corde au cou...

(1) Wieviorka, page 166

Aucun commentaire: