... moins de 10 000 avions en 1941,16 000 en 1942, 26 000 en 1943, 40 000 en 1944 : la production aéronautique volait de records en records alors que, dans le même temps, les villes et centre industriels de la Grande Allemagne étaient soumis à des bombardements de plus en plus intensifs, faisant des centaines de milliers de morts (!)
Sur base de ces chiffres bruts, la condamnation du bombardement stratégique s'imposerait d'elle-même si, dans les faits, la réalité ne s'avérait beaucoup plus contrastée.
Tout d'abord - et on l'oublie trop souvent - les chiffres officiels étaient systématiquement gonflés de multiples manières et pour de multiples raisons, plus ou moins liées à la crainte d'une mutation sur le Front de l'Est.
De plus, si les bombardements alliés ne stoppèrent nullement la production, ils eurent néanmoins pour principal effet de contraindre les industriels allemands à décentraliser les fabrications, à recourir massivement à la sous-traitance, et à délocaliser les usines d'un bout à l'autre de l'Allemagne, dans des tunnels ferroviaires, au fond de mines de sel, voire même en pleine forêt.
Cette délocalisation systématique eut évidemment des effets désastreux sur la qualité de fabrication, la coordination des multiples sites de production, la régularité de leurs approvisionnements et, enfin, sur l'acheminement des avions vers le front, par des ponts, des routes ou des voies ferrées régulièrement bombardés.
De plus, nul ne sait combien d'avions *supplémentaires* l'industrie allemande aurait pu produire si elle avait été en mesure de continuer à les fabriquer dans ses usines habituelles, plutôt que de se voir contrainte de déménager celles-ci, dans des conditions souvent improvisées.
Pourtant, ces diverses nuances passent encore, comme le font trop d'historiens-comptables, à côté de l'essentiel, parce qu'elles éludent une question finalement toute simple : qu'est-ce qu'un "avion" ?
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