lundi 26 décembre 2016

5053 - sérieux ou pas ?

Eichmann, lors de son procès à Jérusalem : "Je n'ai fait qu'obéir aux ordres"
... plus de soixante-dix ans après les faits, cette étrange proposition "Juifs contre camions" continue de susciter l'incrédulité... et de diviser les historiens. 

La première question est évidemment de savoir si, dans cette affaire, Himmler était au courant ou, au contraire, si Eichmann s'est contenté d'agir seul et de sa propre initiative, sans en référer à son lointain supérieur.

S'il est difficile d'imaginer qu'un antisémite aussi rabique que le Reichsführer puisse accepter de se départir d'un million de Juifs alors-même qu'il s'est promis de les faire tous disparaître d'Europe, il est encore plus difficile de concevoir que dans un régime aussi dictatorial que le Troisième Reich, un simple lieutenant-colonel de la SS, par ailleurs en semi-disgrâce depuis la mort de Reinhard Heydrich, puisse échafauder de lui-même une opération dont l'envergure dépasse de très loin son niveau d'accréditation personnel ! 

On peut donc estimer qu'Himmler, ou à défaut un dignitaire nazi de très haut rang, a forcément dû, à un moment ou un autre, autoriser, et peut-être même rédiger, la proposition formulée par Eichmann à Joël Brand, mais ce point réglé, la dite proposition était-elle ou non sérieuse ? 

On a coutume de répondre à cette question par la négative : Himmler, affirme-t-on, ne pouvait ignorer que les Occidentaux, sur le point de gagner la guerre, n'accepterait jamais un échange certes humanitaire et qui, matériellement, ne leur aurait pas coûté grand-chose, mais qui, politiquement, se serait avéré désastreux pour eux puisque les Soviétiques l'auraient inévitablement considéré comme une trahison, voire même comme un casus belli

Dans ces conditions, et comme l'avait pressenti Anthony Eden, l'offre "Juifs contre camions" n'aurait en réalité visé qu'à exacerber, chez les Soviétiques, et en particulier chez Joseph Staline, le sentiment - historiquement démontré - que les Occidentaux, dans cette guerre, jouaient en vérité double-jeu et n'attendaient qu'une occasion pour se liguer contre l'URSS et aux cotés du Reich, en sorte que la meilleure conduite à tenir aurait finalement consisté pour eux, à prendre les devants, et donc à signer, avec ce même Reich, une paix séparée semblable à celle conclue, en mars 1918 (1), entre le Kaiser Guillaume II et le Tsar Nicolas II 

 (1) le Traité de Brest-Litovsk, signé le 03 mars 1918, avait mis fin à la guerre à l'Est

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