dimanche 30 avril 2006

1148 - Nuremberg après Nuremberg

... après Nuremberg, après le procès d'Eichmann à Jérusalem, après les centaines de procès du même ordre organisés dans toute l'Europe pour punir les criminels de guerre nazis, que reste-t-il des grands idéaux défendus par Robert Jackson lors de son discours inaugural ?

Probablement pas grand-chose.

Appliquée aux guerres, la Justice des Hommes, qu'elle soit internationale ou non, reste et restera sans doute pour longtemps encore celle du Vainqueur appliquée au Vaincu, qui pourra du moins profiter d'une meilleure défense et de meilleures garanties qu'il n'en bénéficiait autrefois. C'est sans doute un progrès considérable, mais ce n'est assurément pas suffisant.

Contrairement aux attentes, "l'internationalisation" de la Justice ne l'a pas non plus rendue plus efficace et moins politique pour la cause.

Comme le Procès Milosevic l'a démontré, ce sont toujours les vaincus - et pas les vainqueurs - qui comparaissent devant la "Justice internationale", ce qui, quelque part, donne tristement raison à Hitler lorsqu'il soulignait, "Que nous ayons raison ou tort, nous devons gagner. C'est la seule voie. Et elle est moralement juste et nécessaire. Et quand nous aurons gagné, qui nous demandera des comptes sur la méthode ?"

Du reste, et qu'on l'accepte ou non, on est bien forcé de constater qu'aujourd'hui encore, la plupart des criminels de guerre échappent tout bonnement à la Justice, quand ils ne bénéficient pas carrément d'une loi d'amnistie plénière, telle que la France l'accorda à l'ensemble de ses militaires engagés dans la guerre d'Algérie.

On a exécuté des célébrités comme Goering ou Eichmann, et des milliers d'anonymes. On en a condamné un nombre plus grand encore à des peines d'emprisonnement plus ou moins longues, mais la plupart ont échappé à toute sanction, et même à toute enquête, et sont tranquillement retournés à la vie civile.

A lui seul, Auschwitz aura englouti 1 100 000 âmes, dont 1 000 000 de Juifs. Mais "sur les quelque 6 500 SS qui ont travaillé à Auschwitz et qui auraient survécu à la guerre, environ 750 seulement ont jamais été condamnés" (1)

(1) Rees, pages 374-375

3 commentaires:

Anonyme a dit...

tout à fait vrai,
combien de nazis ont été "oubliés" ou carrément "amnistiés" sur l'hotel de la reconstruction, pour éviter de faire payer à l'Allemagne le même prix qu'en 1918?
Il est intéressant de voir que de nouvelles questions se posent à mesure que le temps passe et que l'héritage de cette guerre est très lourd pour les générations suivantes, et pas seulement allemandes (et Vichy?)

Anonyme a dit...

A la mort d'Hitler, Churchill a dit "on a tué le mauvais cochon". Derrière cette phrase, en 1945, se cache la crainte que Staline et l'Union Soviétique soient un péril plus grand que Hitler et le nazisme.
La guerre froide qui a suivi donne, au moins partiellement, raison à Churchill. Aujourd'hui encore la Russie est considérée comme une menace.
Quand les combats cessèrent en 1945, une certaine nervosité se manifesta entre les troupes soviétiques et alliées. Quelques combats eurent lieu, mais leur réalité fut occultée en vertu du politiquement correct. !! Quel beau sujet à traiter dans un nouveau thème.
Du côté allié anglo-américain, l'hypothèse d'une poursuite du conflit cette fois-ci contre l'URSS fut considérée comme préoccupante. Et si l'hypothèse se muait en réalité de terrain, il serait indispensable, oh ironie, de faire combattre l'armée allemande aux côtés des anglo-américains. Dans cette perspective, il fallait éviter de punir trop les allemands et il fallait aussi conserver suffisamment de cadres de l'armée (et de la SS) pour organiser les combats.
On peut chercher dans cette politique la relative mansuétude des autorités alliées vis-à-vis des criminels de guerre de "deuxième ou troisième niveau".
On aurait tout simplement eu besoin d'eux ...

Bo a dit...

A la mort d'Hitler, Churchill a dit "on a tué le mauvais cochon". Derrière cette phrase, en 1945, se cache la crainte que Staline et l'Union Soviétique soient un péril plus grand que Hitler et le nazisme.
La guerre froide qui a suivi donne, au moins partiellement, raison à Churchill. Aujourd'hui encore la Russie est considérée comme une menace.
Quand les combats cessèrent en 1945, une certaine nervosité se manifesta entre les troupes soviétiques et alliées. Quelques combats eurent lieu, mais leur réalité fut occultée en vertu du politiquement correct. !! Quel beau sujet à traiter dans un nouveau thème.
Du côté allié anglo-américain, l'hypothèse d'une poursuite du conflit cette fois-ci contre l'URSS fut considérée comme préoccupante. Et si l'hypothèse se muait en réalité de terrain, il serait indispensable, oh ironie, de faire combattre l'armée allemande aux côtés des anglo-américains. Dans cette perspective, il fallait éviter de punir trop les allemands et il fallait aussi conserver suffisamment de cadres de l'armée (et de la SS) pour organiser les combats.
On peut chercher dans cette politique la relative mansuétude des autorités alliées vis-à-vis des criminels de guerre de "deuxième ou troisième niveau".
On aurait tout simplement eu besoin d'eux ...