... Avec la Paix, et l'effroyable bilan des pertes humaines, vint la volonté de savoir comment "on en était arrivé là", comment des individus finalement très ordinaires, adorant leur femme et leurs enfants, avaient pu partir à la conquête du Monde, bâtir des camps d'extermination , et envoyer des millions de personnes à la Mort.Cherchant à déchiffrer les mystères du "suivisme allemand", qui avait vu pays entier, en ce compris les communistes les plus convaincus, renoncer à la démocratie pour se tenir derrière son Führer jusqu'à la fin , les experts du SHAEF interrogèrent plus de 300 généraux allemands capturés. Dans les conclusions de leur rapport on peut lire:
"Ces généraux approuvent tout acte qui réussit. Le succès est bon. Ce qui ne réussit pas est mauvais. Il était, par exemple, mauvais de persécuter les Juifs avant la guerre car cela a dressé les Anglo-américains contre l'Allemagne. Il aurait été bon d'ajourner la campagne antijuive pour ne la commencer que lorsque l'Allemagne aurait eu gagné la guerre".
Le général Blumentritt ajoutait même que si les nazis n'avaient pas persécuté les Juifs dès 1933, des savants tels qu'Einstein "auraient pu aider l'Allemagne à produire de meilleures armes", et même à finaliser la bombe atomique, étudiée à l'Institut Kaiser Wilhelm de Berlin.
De même, "il était mauvais de bombarder l'Angleterre en 1940. Si l'on s'en était abstenu, la Grande-Bretagne se serait jointe à Hitler dans la guerre contre la Russie. Il était mauvais de traiter les Russes et les Polonais comme du bétail, car maintenant, ils vont traiter les Allemands de la même façon (...) Il ne s'agit pas là de déclarations isolées de généraux pronazis, mais des réflexions de presque tous ces hommes. Qu'il soit moralement inadmissible d'exterminer une race ou de massacrer les prisonniers leur apparaît à peine. La seule horreur qu'ils ressentent à l'endroit des crimes allemands est qu'ils pourraient eux-mêmes, par quelque monstrueuse injustice, en être accusés par les Alliés"
Cette fuite devant toute responsabilité, cette revendication du statut de victime injustement poursuivie, était aussi le fait de la population civile, qui ne cessait de parler des bombardements alliés mais se réfugiait dans un silence buté dès qu'on lui rappelait que c'était la Luftwaffe qui, à Guernica, Varsovie ou Rotterdam, avait inauguré la logique du bombardement des villes.
Et lorsque, par extraordinaire, ils consentaient enfin à reconnaître la réalité de l'horreur nationale-socialiste, ils en rendaient "la direction", "les chefs", et in fine "Le Führer", pour seuls responsables. Eux n'étaient coupables de rien. Ils avaient été "belogen und betrogen", trahis et trompés.
Et comment leur en faire reproche quand, à des milliers de kilomètres de là, à l'autre bout du monde, d'autres "trahis et trompés" préparaient également une défense identique...
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