lundi 24 juin 2019

6063 - la bonne priorité

... Washington, 22 décembre 1941

En débarquant à Washington moins de deux semaines après la déclaration de guerre allemande, Churchill, le Premier Lord de la Mer Dudley Pound, ou encore l’Air Chief Marshal Charles Portal ont donc bien l’intention de défendre le point de vue - et les intérêts - de la Grande-Bretagne face à une opinion publique américaine qui préférerait - et de loin - en découdre prioritairement avec l'ennemi japonais, actuellement occupé à remporter victoire sur victoire dans le Pacifique, aux dépens des vies et des intérêts américains dans la région.

Heureusement pour lui, Churchill dispose de deux sérieux atouts dans sa manche.

Le premier, et non le moindre, ce sont les liens personnels qui l'unissent au Président Roosevelt, lequel, en apposant sa signature au bas de la Charte de l'Atlantique, le 14 août précédent, a encore rappelé l'attachement des États-Unis envers la Grande-Bretagne, un attachement qui, depuis 1939, s'est d'ailleurs traduit par de nombreux accords politiques et militaires, à commencer par la loi "Lend-Lease" ("Prêt-Bail") qui, le 11 mars 1941, a remplacé l'ancienne "Cash and Carry" ("Payez et Emportez"), et ainsi permis au Royaume-Uni, financièrement au bout du rouleau, de continuer à recevoir des fournitures made in USA... cette fois payables à crédit !

Le second, c'est l'attachement de l'État-major lui-même à l'option Atlantique : à quelques exceptions-près, les généraux américains estiment, à l’instar de leurs homologues britanniques, qu'une fois l'Allemagne vaincue, le Japon n'aura plus d'autre choix que de s'incliner à son tour.

De par sa nature insulaire, et ses ressources naturelles quasi-inexistantes, l’Empire du Soleil peut en effet être lentement asphyxié par un simple blocus maritime, alors que l'Allemagne, nation continentale et quasi-autarcique, devra en revanche être vaincue lors d'affrontements directs menés sur des champs de bataille terrestres.

Et en toute logique, cet argument recueille un écho particulièrement favorable au sein de l’US Army du général George Marshall, qui craint, si l'option Pacifique se voyait privilégiée, de voir l’US Navy de l’amiral Harold Rainsford Stark récolter tous les lauriers alors que lui-même et ses fantassins se retrouveraient sur le banc de touche, ou plus exactement à fond de cale….

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