vendredi 24 septembre 2010

2758 - un caprice de jardinier

... si l'obsession japonaise de combattre aux Philippines jusqu'au bout, et surtout jusqu'à la mort, si cette obsession peut à bon droit être qualifiée d'irrationnelle, que penser de celle des Américains de les en déloger quel qu'en soit le prix ?

Mais au fond, s'agit-il vraiment d'une obsession américaine ou alors seulement de celle de MacArthur ?

A Hawaï, en juillet 1944, ce dernier avait sans doute raison de brandir la menace que représentaient encore les quelque 300 000 soldats japonais présents aux Philippines si, comme le préconisaient King et Nimitz, on se contentait plutôt de laisser cet archipel de côté afin de foncer directement sur le Japon.

Sur les plans économiques et stratégiques, l'utilité de s'emparer de Leyte ne souffrait aucune discussion. Et de fait, une fois celle-ci acquise, et la Marine impériale annihilée, le trafic maritime entre la métropole japonaise et les Indes néerlandaises avait chuté de manière dramatique, passant de quelque 700 000 tonnes en septembre 1944 à seulement... 2 000 tonnes en décembre !

Leyte redevenue américaine, la reconquête de Manille, capitale des Philippines, s'imposait ensuite comme une obligation politique à l'égard des Philippins et en particulier de ceux qui, parmi eux, combattaient aux côtés des États-Unis, certains depuis 1941.

Et en faisant jouer l'argument patriotique, on pouvait également justifier la reconquête de Bataan et de Corregidor, où les États-Unis avaient été vaincus et humiliés trois ans auparavant.

Mais une fois tous ces objectifs remplis, à quoi bon continuer à mobiliser des centaines de navires et d'avions, et pas moins de 17 divisions d'Infanterie (!), pour pourchasser, jusque dans les recoins les plus éloignés, quelques dizaines de milliers de soldats japonais désormais privés de tout ravitaillement et donc condamnés à mener une guérilla anonyme et sans espoir...

A quoi bon, comme à Fort Drum, déployer de gros moyens et de véritables trésors d'ingéniosité pour annihiler jusqu'au dernier des combattants certes ennemis mais qui, dans l'état de dénuement où ils sont rendus, ne peuvent plus faire grand-mal ?

En avril 1945, le centre de gravité de la Guerre du Pacifique s'est de toute manière déplacé vers le Nord, vers Okinawa d'abord, vers le Japon ensuite, et la Bataille des Philippines ne représente plus, à ce titre, qu'un coûteux caprice colonial, ou plus exactement le caprice d'un seul homme, Douglas Mac Arthur, qui, ayant toujours considéré les Philippines comme son jardin privé, est plus que jamais résolu à employer toute la puissance américaine pour en déloger les derniers intrus...

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