vendredi 22 novembre 2024

8112 - pourquoi ?

Lancaster crashé dans le Lincolshire, mars 1945. Un sur six mille cinq cents quadrimoteurs...

… d’une efficacité militaire fort douteuse, et extraordinairement coûteux en vies civiles, le bombardement des villes coûta également extrêmement cher aux différents belligérants.

En 1932, Stanley Baldwin avait pourtant déclaré à la Chambre des Communes, que "The bomber will always get through", "le bombardier passera toujours au-travers", mais à peine dix ans plus tard, chacun avait déjà compris qu’en pratique, les bombardiers passaient très difficilement à travers les défenses ennemies, repéraient tout aussi difficilement leurs cibles,… et subissaient trop souvent de lourdes pertes.

En 1945, au-dessus du Japon, la DCA et la chasse nippones, toutes deux exsangues, ne constituèrent il est vrai qu’une vague menace pour les équipages des B-29, mais il en fut hélas tout autrement pour les Allemands au-dessus de l’Angleterre et, surtout, pour les Anglo-Américains au-dessus de l’Allemagne.

De 1942 à 1945, à lui seul, le Bomber Command britannique perdit en effet la bagatelle de quelque… 6 500 quadrimoteurs dans le ciel d’Europe (!), de même que près de 3 500 bombardiers légers ou moyens, et déplora également la mort de plus de 55 000 aviateurs, soit un taux de pertes de 44% sur un effectif total d’environ 125 000 hommes (!), taux qui, de toute la guerre, ne fut dépassé que par les équipages des sous-marins allemands !

Lorsqu’on rapporte ces pertes aux résultats, ou plutôt à l’absence de résultats militaires ou politiques réellement significatifs, la seule question qui vient à l’esprit est évidemment pourquoi, dans ces conditions, Américains et, surtout, Britanniques continuèrent, pendant trois ans, jour après jour, nuit après nuit, à déverser des milliers, des dizaines de milliers, des centaines de milliers et, au bout du compte, près de deux millions de tonnes de bombes sur l’Allemagne !

Et les réponses sont toujours les mêmes : parce que les avions et les aviateurs étaient là, parce qu’ils avaient les uns et les autres coûté fort cher, parce qu’il fallait bien qu’ils servent à quelque chose; parce qu’on ne savait rien faire; et aussi, et peut-être surtout…

… parce qu’il y avait Arthur Harris

2 commentaires:

Anonyme a dit...

Bonjour! Vous citez un taux de pertes de 44% (personnel) pour les bombardiers stratégiques britanniques, c'est énorme, mais c'est très nettement inférieur à celui des U Boot allemands (75% à quelque choses près, tant pour les hommes que pour le matériel)...Participant à une compétition de voile à Kiel j'ai eu l'occasion de visiter le mémorial des sous-mariniers , un gros monument oppressant qui domine le port, on est frappé par l'interminable suite des plaques de bronze avec les noms des équipages (une plaque par sous-marin), ceci sur plusieurs étages de cet immense monument circulaire. Pourtant Doënitz, quoiqu'on puisse penser du personnage politique, n'était pas un "boucher" prodigue du sang de ses propres hommes, comme ont pu l'être Joffre, Nivelle ou Luigi Cadorna, Il retira les sous-marins de l'Atlantique Nord (pourtant stratégique au plus haut point) quand les progrès des armements ASM et, surtout, des décryptages d'Enigma par les casseurs de codes anglais eurent rendu la situation intenable...il en avait d'ailleurs un rappel qui le touchait personnellement (la perte de deux de ses fils en service commandé). En fait , les taux de pertes aussi effrayants sont, quelque soit l'arme et la guerre, la marque des "points chauds" militaires et stratégiques, les lieux et moments où le sort d'une guerre se décide et où les deux camps mettent tout leur poids dans la balance.
Harris (et Churchill) pensaient gagner la guerre avec les bombardements stratégiques des villes allemandes et Churchill a toujours dit que la bataille de l'Atlantique était le théâtre d'opérations qui lui causait le plus de sueurs froides..

Anonyme a dit...

Le repérage des cibles...Le talon d'Achille du Bomber Command, en raison principalement du conservatisme et de la tradition navale britannique . Pour se repérer, en pays ennemi et en pleine nuit , on fait comme faisait Nelson (ou presque) sur la dunette du HMS Victory du temps de Napoléon 1°.
Prendre le sextant, identifier l'astre -car c'est un point de nuit, bien plus enquiquinant qu'une visée méridienne - faire une visée dudit astre, empoigner sa table de logarithmes et ses éphémérides nautiques, poser ses chiffres au crayon sur la feuille de calcul et se lancer dans la construction de la droite de hauteur et du calcul de l'azimut (je caricature à peine).

A 300 ou 400 Km / h le point obtenu au bout de quelques minutes de calculs manuels est aussi frais que les nouvelles du journal d'avant-hier oublié dans un coin du bistrot.
Par dessus le marché , le sextant employé est un sextant d'aviation à bulle (l'horizon n'est pas le vrai mais un horizon artificiel confié...à un niveau à bulle de maçon car un horizon artificiel gyroscopique est une bête complexe , rare et coûteuse)

La plaisanterie durera assez longtemps , au grand désespoir de RV Jones et des savants britanniques qui , eux, ont eu à identifier et à brouiller les faisceaux de radioguidage allemands et savent très bien que leur pays est à la traîne ... En attendant les merveilles élucubrées par l'industrie électronique britannique (qui fonctionnent avec une logique et une ergonomie également très britannique) Radars OBOE, récépteurs Gee, détournement pur et simple par le Costal Command du système allemand Elektra Sonne (que la société British Marconi récupérera comme prise de guerre en 1945 en le baptisant CONSOL)...ben les aviateurs anglais se débrouillent, comme on dit vulgairement, avec le bite et le couteau et dans un tel contexte le tapis de bombes sur les grandes villes est infiniment plus facile que le bombardement de précision d'une installation militaire stratégique (par ailleurs hérissée de canons de DCA)