mardi 21 novembre 2023

7745 - la spirale infernale

Paris, Place Vendôme, 25 juin 1916, de quelle guerre parle-t-on ?
... pendant quatre ans, dans leurs villes pourtant parfois situées à seulement quelques dizaines de km du Front, de la boue et de la boucherie des tranchées, les civils ont mené une vie finalement paisible et agréable.

Et s'il n'y avait eu le rationnement et la pénurie de certains biens pour le leur rappeler, ils auraient eu du mal, autant à Paris qu'à Londres ou Berlin, à admettre que leurs pays étaient bel et bien engagés dans une guerre qui, en 1914, et rien qu'en France, coûtait la bagatelle de 2 000 soldats... par jour !

Dans leurs villes, les dits civils ont donc tranquillement continué à vaquer à leurs petites affaires, à se rendre au théâtre ou au cinéma et, surtout,... à produire les armes qui, quelques dizaines ou centaines de kilomètres plus loin, ont servi à décimer les combattants.

Et même lorsque la saignée a finalement contraint les différents gouvernements à expédier au Front de plus en plus d'ouvriers des usines d'armements, ceux-ci y ont aussitôt été remplacés par leurs épouses et fiancées, lesquelles, sans en avoir véritablement conscience, ont inlassablement et fort patriotiquement poursuivi la fabrication des balles et des obus... qui ont fauché par milliers les maris et promis des épouses et des fiancées du camp d'en face !

Sans l'avoir voulu, chaque belligérant s'est ainsi enfermé dans une spirale infernale, en se dévorant lui-même, une moitié de la population étant occupée à produire dans les villes les armes permettant à l'autre moitié de la population de continuer à lutter, et à mourir, dans les tranchées.

Et avec les gaz de combat, les mitrailleuses lourdes, et les canons à longue portée, la Mort est devenue si efficace qu'elle a pendant quatre ans interdit toute progression décisive vers les villes adverses, c-à-d vers la seule chose qui aurait pu mettre fin au conflit, en privant l'adversaire de ses usines, et donc de ses armes...

2 commentaires:

Anonyme a dit...

Bonjour!
Ce blog est très intéressant, la présentation insiste sur la quiétude des civils des capitales à Paris(mais c'était pareil à Berlin et en Angleterre) ...

Ceci dit ce n'est pas que la guerre était plus civilisée et plus chevaleresque en 14-18 ..mais c'est que les moyens techniques de taper sur les populations civiles manquaient.

A Paris, un monoplan Taube a bombardé Notre dame dès 1914 (avec des grosses grenades à main est sans rien faire que d'écorner quelques statues) , puis ensuite , vers 1917 il y a eu des bombardements aériens avec des avions plus lourds qui ont causé quelques dizaines de morts et bien entendu les dégâts humains et matériels (limités) des "canons d Paris" (la Grosse Bertha et Max-le-long) avec un coup au but sur une église des quartiers chics pleine à craquer.

En Angleterre il y a eu les bombardements avec les très vulnérables zeppelins sur les ports de la côte Est, et les dégâts plus importants des bombardements navals de l'escadre de Von Spee (le Times a fustigé l'inaction des Lords de l'Amirauté face aux "tueurs de bébés") qui cherchait à faire sortir de sa tanière les navires de guerre anglais pour livrer bataille en mer du Nord...

La volonté de nuire aux civils était donc bien là ...mais les moyens ...pas vraiment.

Le plus farcesque c'est l'action de D' Annunzio et de son escadrille de biplans SVA sur Vienne , Capitale de l'Empire Austro-Hongrois: Il sait pertinemment (et le haut état major aussi et même le Général Douhet , malgré ses prophéties) que la douzaine de cages à poules volantes à long rayon d'action , même somptueusement décorés avec le Lion ailé vénitien de Saint Marc, ne feront pas beaucoup de dégâts ou de morts...

D'Annunzio, maître ès illusions lyriques, opte alors pour la Propagande et la guerre psychologique: Les avions emporteront... des tracts sur papier vert-blanc-rouge . Celui de D'Annunzio emporte un poème épique en italien quasi intraduisible en allemand ou en magyar, et les autres un texte du journaliste Ugo Ojetti (celui là est bilingue) jugé plus efficace par l'Etat Major qui commence par :"Viennois, nous pourrions vous larguer des bombes à la tonne...bla bla bla...mais nous préférons vous larguer les rois couleurs de la liberté et (en substance) nous vous annonçons que votre camp a perdu la guerre malgré les privations alimentaires (alors même que le front du Piave est une boucherie orchestrée par le Général Cadorna où des centaines de milliers d'Italiens laissent leur peau , face à l'armement plus efficace des austro-hongrois).

A cette époque , Malgré Douhet et les efforts de Mr Caproni, les bombardiers italiens ont au maximum 700 kilos de Charge Utile de bombes, et encore, à court rayon d'action...le tract prend un peu les désirs de Douhet pour des réalités.

Un bombardier plus convaincant est crée ensuite par les anglais (mais en 1918), le Vickers Vimy, qui peut porter un poil plus de bombes et qui a surtout un long rayon d'action...peu utilisé au combat il sera surtout célèbre pour le vol transatlantique (De Terre Neuve ne Irlande) avec aux commandes les intrépides aviateurs Alcock et Brown

Anonyme a dit...

Petit détail:
Les allemands avaient des industries de guerre dont les usines étaient à portée des canons de l'ALVF (l'artillerie lourde française) et les allemands étaient en mesure de canonner les installations des aciéries du Creusot....mais rien de tout celà ne se produisit, il y avait une sorte de gentleman's agréement entre les marchands de canons et les hauts gradés des deux bords pour continuer à produire de quoi massacrer à tours de bras ...