mardi 23 novembre 2021

7025 - frapper le premier

… 19 juin 1944, 06h00

A l’aube du 19 juin, les appareils des deux camps commencent en tout cas à fouiller la mer à la recherche de leur adversaire, et à ce jeu-là du moins, ce sont les Japonais qui marquent les premiers points puisque, peu avant 06h00, un avion de reconnaissance parti de Guam parvient à repérer l’escadre américaine avant d’être abattu.

Sur les terrains japonais encore intacts, les pilotes se précipitent sur les rares appareils qui ont réussi à échapper au massacre des jours précédents, mais ce branle-bas désordonné n’échappe malheureusement pas aux radars américains,… ni aux chasseurs Hellcat du porte-avions léger Belleau Wood, lesquels ne tardent pas à abattre plus d’une trentaine d’avions nippons, tout en ne perdant eux-mêmes qu’un seul des leurs !

Mauvais début assurément, qui donne en fait le ton de toutes les passes d’armes qui vont suivre, car Ozawa, à présent à portée, entend bien profiter de la meilleure autonomie de ses avions pour lancer ses attaques avant que les Américains ne soient eux-mêmes en mesure de l’atteindre.

En 1941, face à un adversaire inexpérimenté, la manœuvre serait assurément payante, mais plus en 1944, et certainement pas face aux piquets-radars, c-à-d aux destroyers postés en avant-garde, loin devant les porte-avions, et dès lors en mesure de prévenir ces derniers de l’arrivée des escadrilles japonaises !

De fait, la première vague d’attaque, soit les 69 aéronefs qui ont décollé sur le coup de 08h30 est repérée 90 minutes plus tard, ce qui laisse aux porte-avions américains une bonne vingtaine de minutes pour expédier tous les chasseurs disponibles à leur rencontre

Le tir au pigeon, ou plutôt à la dinde, peut à présent commencer…

2 commentaires:

Anonyme a dit...

Bonjour, excellent exposé de la situation et des changements survenus en 3 ans de guerre du Pacifique: Il faut ajouter que durant ces trois ans les américains ont sorti de nouveaux avions, pas forcément plus maniables que les avions japonais en combat tournoyant , mais bien plus puissants, mieux armés et mieux protégés. Ils ont eu aussi l'occasion d'étudier plusieurs chasseurs "zéro" japonais (en particulier un récupéré en assez bon état lors des combats des îles aléoutiennes)et de mettre au point la tactique du "Hit and run" (ainsi dénommée d'après la tactique des miliciens de George Washington durant la Guerre d'Indépendance de 1775, abattre un"dos de homard",un soldat anglais au bel uniforme rouge, et s'en aller au plus vite).

Le "hit and run" aéronautique de 1944 consistait à avoir un avantage d'altitude avant l'engagement, à piquer sur l'adversaire avec une vitesse supérieure (le bon côté de la médaille d'un avion plus lourd et moins maniable), à tirer et à dégager sans chercher le combat tournoyant où le zéro était avantagé puis à s'enfuir en profitant de l'avantage de vitesse ainsi acquis. Avec les destroyers équipés de radars antiaériens en avant garde, les aviateurs américains avaient le temps de prendre de l'altitude et de se placer idéalement pour ce "tir aux pigeons" alors qu'en face les pilotes japonais étaient moins expérimentés et leurs appareils nettement plus vulnérables .
Il a même existé une ...publicité d'une compagnie pétrolière américaine qui détaillait en images le "hit and run" pour le grand public et laissait entendre que l'avantage de puissance des avions américains était dû à la qualité de son supercarburant...avec çà, l'automobiliste américain moyen , soumis à des restrictions d'essence pas vraiment sévères, pouvait se prendre pour un pilote de chasse en montant dans sa Ford ou sa Buick...

Anonyme a dit...

Dans ce blog il a été évoqué (à la fois dans le texte et dans les commentaires) la différence de qualité entre le carburant américain (l'Av Gas à 100 d'indice d'octane, additivé au plomb tétraéthyle) et le carburant japonais, qui était au mieux du 87 , ce qui posait des problèmes de cliquetis et de détonation...

Un détail intéressant c'est que l'adoption du 100 d'octane (carburant initialement hors de prix (25 dollars du Gallon contre 20 cents pour l'essence ordinaire) a été impulsée par nul autre que Jimmy Doolittle , le très casse cou pilote des courses sur circuit de pylônes qui réussit à survivre au "faiseur de veuves" qu'était l'avion de course Gee-Bee (qui, prétend-on inspira Polikarpov pour son chasseur I16).

Doolittle (dont vous aviez relaté le vol de représailles sur Tokyo pour lequel il "rempila" dans l'US air Force à 40 ans passés)n'était pas qu'un téméraire pilote de courses aériennes sorti d'un roman de Faulkner, c'était aussi un ingénieur de talent, titulaire du tout nouveau (pour l'époque) diplôme d'ingéniérie aéronautique du MIT .

La multi nationale Shell, qui sponsorait les avions de course au pylône, le recruta comme directeur de la branche "carburants aviation" lorsqu'il prit à la fois son congé de l'armée et sa retraite sportive. Doolittle s'évertua à trouver des solutions pour améliorer la qualité du carburant aviation (dopage à l'iso-octane, additifs anti-détonants ...etc) et grâce à ses contacts dans l'armée de l'air , convainquit l'état major d'adopter l'Avgas 100 comme carburant standard pour les avions de guerre américains...Le 100 d'octane n'était pas disponible au moment de la bataille de France mais il l'était au moment de la bataille d'Angleterre et la Shell , compagnie Anglo-hollandaise (à supposer que les multinationales aient une patrie autre que le saint pognon) fit d'ailleurs des affaires d'or en vendant son supercarburant miracle à la RAF qui en avait désespérement besoin Cf ces articles en référence https://www.hemmings.com/stories/article/jimmy-doolittle et https://sofrep.com/news/filler-up-how-high-octane-gasoline-saved-untold-allied-pilots-during-wwii/