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Mussolini et Petacci, après leur exécution |
… Giulino di Mezzegra, 28 avril 1945
Mais l’Italie ne serait pas l’Italie si la maîtresse de l’ex-Duce ne réussissait pas, toujours selon la version officielle, à retrouver l’endroit supposément secret et à le rejoindre !
Que faut-il faire de l’ex-Duce ? Le Comité de Libération Nationale a promis de le livrer vivant aux Américains, mais à présent, ses responsables hésitent : après 20 ans de Pouvoir, l’intéressé, qui n’a plus rien à perdre, est sans doute en mesure de faire bien des révélations, et surtout de dénoncer bien des gens qui ont largement tiré profit du fascisme mais qui sont toujours en poste et dont on aura besoin, demain, pour rebâtir l’Italie.
Alors, selon l’Histoire officielle, décision est plutôt prise de procéder à son exécution sans plus attendre,… sauf qu’en fait d’exécution, il s’agit plutôt d’un assassinat barbare : au matin du 28 avril, Mussolini et Petacci sont en effet alignés contre un mur du village de Giulino di Mezzegra et liquidés, après une première tentative avortée (1), à grandes rafales de pistolet-mitrailleur par un certain Comandante Valerio, de son (supposé) vrai nom Walter Audisio.
Mussolini, qui a régné sans partage sur l’Italie pendant plus d’une génération, qui a tenté de faire de celle-ci un nouvel Empire romain, et qui a fini par plonger la Nation tout entière dans la catastrophe et les heures les plus sombres de son Histoire a vécu, mais sa mort permet du moins au pays de renaître.
Telle est du moins la thèse officielle, endossée par l’intégralité de la classe politique italienne de l'époque, mais une thèse dont le déroulement, toujours mystérieux et souvent rocambolesque, continue, soixante-quinze ans après les faits, de soulever de nombreuses questions et d’alimenter de non moins nombreuses rumeurs, dont l’une en particulier attribue plutôt la mort de l’ex-Duce à un commando de l’Intelligence Service, dépêché sur place par un Winston Churchill fort peu désireux de voir certains détails de ses relations avec le dictateur exposés au public…
(1) le pistolet-mitrailleur du tueur se serait en effet enrayé au moment du tir, forçant alors ce dernier à emprunter l'arme d'un de ses complices
2 commentaires:
Bonjour!
Parler de barbarie est sans doute approprié, surtout en pensant à ce qui s'est passé le lendemain de l'exécution (la pendaison des cadavres par les pieds sous la marquise de la station service de la Piazza Loreto à Milan, symboliquement choisie en référence à un massacre de résistants commis à cet endroit par les brigades noires).
Parler d'assassinat est peut être moins exact: Walter Audisio, futur député , puis sénateur (dans le civil comptable à la chapellerie Borsalino ... ironie pour un homme qui...portra le chapeau) a toujours revendiqué son acte et déclaré avoir agi sur ordre "Au nom du peuple italien". Il a publié sa version des faits en un long article publié (en plusieurs épisodes comme un feuilleton !)dans l'Unita, le journal du Parti Communiste Italien.
Il s'agit , bien entendu d'une version des faits "officielle" et probablement arrangée (et contestée plus tard par certains partisans témoins de l'exécution) mais il a revendiqué l'affaire y compris devant un tribunal (un procès a été intenté dans les années 60 par la famille Petacci), a toujours utilisé le verbe giustiziare (exécuter, faire justice en italien)...et a finalement été relaxé lors du procès.
De toutes façons , la justice dans le contexte du solde des comptes de vingt ans de fascisme et deux ans de guerre civile ne pouvait être qu'expéditive.
L'exécution la plus tragicomique est celle d'Achille Starace , l'ex secrétaire général du parti fasciste tombé en disgrâce. Véritable "chien fidèle" ou "godillot" de Mussolini, il avait été à la manoeuvre pour embrigader la jeunesse et les ouvriers italiens dans des organisations de sport obligatoire et s'y était fait détester et ridiculiser.
Il n'était pas dansla colonne des hiérarques en fuite (il avait été disgracié et même temporairement mis en prison sous le régime de salo) , il faisait son footing quotidien dans les rues de Milan quand il fut arrêté par des partisans. Interrogé il dit bêtement qu'il "allait prendre un café" ...en fait de café , il fut sommairement jugé et fusillé avant d'être pendu avec les autres hiérarques , validant ainsi ce qu'avait dit de lui Galeazzo Ciano (gendre de Mussolini, exécuté lors des infâmes procès de Vérone) : "Les Italiens peuvent pardonner à quelqu'un qui leur a fait du mal mais jamais à quelqu'un qui leur a cassé les couilles". Sa propre fille Fanny déclara plus tard "Il ne respirait que sur ordre de Mussolini"....véridique mais atroce épitaphe .
Bonjour!et compliments sur votre blog
Sur les derniers jours de Mussolini, il existe un livre de l'historien Pierre Milza qui ne donne pas de version définitive mais évoque les hypothèses les plus sérieuses et s'appuie sur une bonne documentation et sur les ouvrages de l'historien italien de référence , Renzo de Felice.
Sur l'aspect légal (et en pondérant du fait que dans les périodes de troubles la légalité est plus "relative", voir les exécutions décrétées par le Comité de Salut Public de Robespierre durant la Révolution Française) , il ne fait guère de doute que la décision de tuer Mussolini émanait d'une autorité empreinte d'une relative légalité.
Le gouvernement d'Ivanoe Bonomi (qui a remplacé Pietro Badoglio) est l'émanation du CLN (comité National de Libération) , qui siège en Italie du Sud , libérée par les alliés; Bonomi et ses ministres ont officiellement délégué les pouvoirs en ce qui concerne la partie de l'Italie encore sous tutelle de la république de Salo et des allemands au CLNAI (Comitato Nazionale Liberazione Alta Italia, Comité National de Liberation de l'Italie du Nord).
Le CLNAI est forcément plus radical et plus engagé à gauche que le gouvernement Bonomi: Le nord de l'Italie est plus industriel, plus syndicalisé, l'Emilie Romagne est un bastion du PCI.
Le CLNAI regroupe les Communistes (Luigi Longo et Palmiro Togliatti) , les socialistes (Sandro Pertini) le Parti d'Action (ex Giustizia e Liberta, centre gauche) du très intègre professeur Ferrucio Parri et les démocrates Chrétiens (Enrico Mattei, futur dirigeant de l'ENI mort plus tard dans un attentat mystérieux liés aux conflits du pétrole)...Les partisans résistants du CLNAI ont tous été persécutés sous le fascisme et sont en guerre contre les fascistes de Salo...Ils ont pris la décision d'exécuter Mussolini "au nom du peuple italien" au cours d'une réunion de leur "Gouvernement provisoire de la Haute-Italie" et consigné la décision par écrit.
La mort de Clara Petacci est plus dérangeante...et les versions divergent, comme d'ailleurs pour les circonstances exactes de la mort de Mussolini malgré le récit "officiel" de Walter Audisio (alias Colonel valerio de son nom de Partisan) publiée dans le journal du PCI, L'Unita.
Soit elle se serait jetée dans la ligne de tir d'Audisio et de Pietro Moretti au moment de l'exécution, soit elle aurait été tuée par un partisan à la gâchette trop facile qui aurait perdu ses nerfs en l'entendant crier peu avant l'exécution.
Pour couronner le tout , des versions alternatives existent (dans un des cas un agent anglais incorporé chez les partisans, aidé de deux résistants, aurait agi sur l'ordre de Londres, pour éviter que soient divulguées les négociations Mussolini-Churchill de 1939...mais les archives anglaises étaient encore sous le boisseau lorsque Milza a écrit son livre en 2010).
Les américains eux voulaient prendre Mussolini vivant et le juger, un agent de l'OSS Valerian Lada Mockarski, lui aussi incorporé dans les mouvements de résistance était tout spécialement charger de le capturer: Lorsqu'il fut arrêté par les partisans (l'épisode de Dongo et Musso) , un plan d'urgence fut monté pour l'exfiltrer, avec l'aide de l'industriel Luigi Cardematori et le Général Raffaele Cadorna (fils du calamiteux général de la Guerre de 14-18)...Ce fut une course gagnée par les partisans de l'exécution grâce à la bonne organisation des réseaux de Résistance communistes de Luigi Longo...
La famille Petacci (qui avait perdu non seulement leur fille Claretta mais aussi son frère Marcello,déguisé en pseudo consul espagnol, fusillé à Dongo en compagnie des ministres de Salo et de Pavolini) intenta, à la fin des années 50, un procès à Walter Audisio et aux autres dirigeants du CLNAI directement en cause dans l'exécution, mais fut finalement déboutée au motif que les faits reprochés relevaient d'un acte de guerre
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