… car à l'été 1944, quand Halsey reprit un commandement à la mer - celui de la Troisième Flotte - il se retrouva aussitôt plongé dans une guerre radicalement différente de celle qu'il avait connue en 1942.
Dopée par son industrie, et aussi par du carburant en quantités inépuisables, la Navy disposait désormais d'une supériorité matérielle écrasante sur son adversaire, quant à elle épuisée par une très longue attrition, et désespérément à court d’essence.
Ce n’était plus une guerre de raids, que l’on menait par désespoir, au moyen de petites flottilles très mobiles ne comprenant qu’un ou deux porte-avions et quelques croiseurs, et frappant à la vitesse de l’éclair avant de s’en retourner tout aussi vite au port : c’était désormais une guerre de (re)conquête, mobilisant une véritable armada de plusieurs centaines de bâtiments de tout type, que l’on déplaçait lentement, tel un cirque monstrueux, d’île en île et d’archipel en archipel, mais qu’il fallait ravitailler et protéger en permanence, et dont il fallait également coordonner et prévoir les mouvements des semaines et même des mois à l’avance.
Ce n’était plus guerre d’instinct et de guetteurs n’ayant pour seuls atouts que de bons yeux et une paire de jumelles, mais bien une guerre technologique, que l’on menait désormais bien au-delà de l’horizon, et donc sans jamais apercevoir le moindre navire ennemi, et ce grâce à des radars et des calculateurs de tirs constamment couvés par des équipes de techniciens hautement spécialisés se relayant dans les entrailles des bâtiments.
Dit autrement, c’était une guerre qui convenait à présent bien mieux à des intellectuels aussi calmes et patients que Spruance, qu’à des boxeurs aussi agressifs et impulsifs que Halsey, lequel, lorsque confronté à l’obligation de protéger des cargos et des opérations de débarquement nécessairement fort longues, ne pensait en fait qu’à s’y soustraire au plus vite afin de courir à nouveau sus à l’ennemi avec tous ses bâtiments de combat.
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