mardi 29 août 2006

1269 - le "problème Hitler"

... Un chef doit savoir s'écarter du plan de bataille pour saisir l'opportunité lorsqu'elle se présente sur le terrain. Mais il doit aussi se donner le temps de concrétiser celle-ci avant de courir un nouveau lièvre.

Quoi qu'on ait prétendu par la suite, Hitler avait bel et bien le sens de l'opportunité - sa carrière politique en témoigne - mais celui-ci demeurait bien plus intuitif que rationnel, et manquait singulièrement de constance.

Déjà, au cours de l'été et de l'automne 1941, le Führer était personnellement intervenu pour modifier les axes d'attaque au gré de ses "intuitions", avec des conséquences souvent dommageables. Son auto-promotion au titre de commandant-en-chef des armées, le 19 décembre 1941, ne devait qu'aggraver cette tendance.

Ainsi, plutôt que de laisser la XIème armée de Manstein soutenir l'offensive de Paulus dans le Caucase - comme il l'avait lui-même décidé en juin - il décida un mois plus tard, aussitôt Sébastopol tombée,... de démanteler la XIème armée et de confier à Manstein le soin de s'emparer de Leningrad,... 2 000 kms plus loin. Et quand Manstein fut enfin prêt à passer à l'offensive, l'encerclement de la VIème armée de Paulus à Stalingrad poussa Hitler à envoyer ce même Manstein à sa rescousse - mais n'anticipons pas.

La grande offensive vers le Caucase devait débuter le 28 juin 1942. Le 19, cependant, un petit Fieseler-Storch fut abattu derrière les lignes soviétiques. A l'intérieur de l'épave, les Russes récupérèrent les plans complets de l'opération, qu'un officier allemand imprudent avait emporté avec lui, au mépris de toutes les consignes de sécurité. Hitler écumait d'autant plus qu'il était cette fois hors de question de modifier les plans opérationnels, commme on l'avait fait lors d'un incident similaire survenu en Belgique, deux ans auparavant (1)

Heureusement, la paranoïa de Staline ne le disputait qu'à celle de Hitler : lorsqu'il entra en possession des documents, le Petit Père des Peuples était tellement convaincu d'assister à une nouvelle offensive sur Moscou qu'il ne vit en eux qu'une grossière tentative des Allemands pour le pousser à dégarnir les défenses de la ville. Le plan de défense soviétique ne fut donc pas modifié, ce qui permit aux Allemands de lancer leur offensive comme prévu, le 28 juin...

(1) le 10 janvier 1940, un avion de liaison allemand qui s'était égaré en Belgique dut effectuer un atterrissage forcé à Mechelen. La première mouture du plan d'invasion - ou "plan jaune" - tomba aux mains des Belges, qui la communiquèrent aux services de renseignement français

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