mercredi 16 août 2006

1256 - le triomphe de sa volonté

... aucun chef d'État moderne n'avait cumulé autant de Pouvoir qu'Adolf Hitler.

Même le tout aussi autocratique Joseph Staline, à la lumière de ses échecs lors des premières semaines de la guerre, avait prudemment délégué le commandement opérationnel de l'armée à de véritables officiers d'État-major, comme Joukov, et s'était contenté de dessiner les grandes lignes des opérations, ainsi que d'assumer la direction politique du pays.

En soi, et contrairement à une opinion aujourd'hui largement répandue, Hitler n'était dénué ni de flair ni de talent militaire, mais il ne pouvait tout assumer en même temps, et ne comprenait pas grand-chose aux réalités du terrain, considérant que tous les obstacles pouvaient être abattus par le seul "triomphe de la volonté".

Dans une telle logique, il n'était certes plus question de retraite. "La volonté fanatique de défendre le sol sur lequel se tiennent les troupes doit être insufflée aux hommes, y compris par les moyens les plus rudes", écrivit-il le 20 décembre. "La retraite de Napoléon dont on parle menace de devenir réalité. Il ne doit donc y avoir de retrait que lorsqu'une position est préparée à l'arrière".

Mais lorsqu'il n'existait d'autre solution que le repli, Hitler reprenait à son compte la logique stalinienne de la terre brûlée. "Chaque morceau de territoire que l'on est contraint d'abandonner à l'ennemi doit être rendu autant que possible inutilisable. Chaque habitation doit être incendiée et détruite sans considération pour la population afin de priver l'ennemi de tout abri possible" (1)

A Guderian qui le suppliait d'autoriser le retrait de la IIème armée de panzers menacée d'encerclement, Hitler répliqua que les hommes n'avaient qu'à creuser des trous et tenir chaque mètre de terrain. Et lorsque Guderian lui demanda comment creuser des trous dans un sol gelé jusqu'à 1,5 mètres de profondeur, Hitler déclara qu'ils n'avaient qu'à faire des cratères avec des obus, comme dans les Flandres, lors de la Première Guerre mondiale.

En vain Guderian lui fit-il observer que le sol des Flandres, en hiver, n'était en rien comparable à celui de la Russie : Hitler ne voulut rien entendre. "Vous devriez, lui dit-il, prendre davantage de recul. Croyez-moi, les choses paraissent plus claires quand on les examine de plus loin" (2)

Six jours plus tard, Guderian était limogé - ce ne serait pas la dernière fois - tout comme, dans les semaines qui suivirent, les généraux Förster, von Sponeck, Hoepner ou von Leeb...

(1) Kershaw, pp 664-665
(2) ibid, page 666

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