mercredi 18 février 2004

346 - l'attaque de Port-Arthur

... Dans la nuit du 8 février 1904, sans la moindre déclaration de guerre (tactique qui sera reprise 37 ans plus tard, avec le succès que l'on sait, contre la flotte américaine du Pacifique), les forces de l'amiral Togo attaquèrent l'escadre russe dans son mouillage de Port Arthur, afin de faciliter le débarquement des troupes nippones, qui attaquèrent bientôt la grande base navale à revers, et la canonnèrent par voie de terre, ce que les Russes n'avaient manifestement pas prévu.

37 ans plus tard, à Singapour - ville fortifiée dont les canons ne pointent également que vers la mer, les Anglais découvriront eux aussi que les guerres ne se déroulent pas toujours comme prévu, et que l'ennemi ne surgit pas obligatoirement de l'endroit où on l'attend...

L'Histoire n'est jamais qu'un éternel recommencement.

Après plusieurs mois d'escarmouches et de fortunes diverses, le blocus de Port Arthur est achevé à l'été 1904, et la flotte russe (ou plutôt ce qu'il en reste) condamnée à ne plus quitter la rade et à attendre, plusieurs mois durant, des renforts qu'elle ne verra jamais arriver.

Sans doute eut-il été préférable d'arrêter les frais et de chercher une issue honorable au conflit. Du reste, à cette époque déjà, l'Amérique de Théodore Roosevelt avait multiplié les contacts en ce sens.

Mais c'était compter sans l'entêtement personnel du Tsar Nicolas II et de ses conseillers, peu désireux de perdre la face devant les "petits hommes jaunes", devant ce peuple de parvenus à peine sortis du Moyen Âge.

Le Tsar refusa donc de négocier, et décida au contraire d'envoyer des renforts à Port Arthur. Le chemin de fer se chargea d'acheminer les forces terrestres, en pure perte : plusieurs batailles terrestres particulièrement sanglantes se déroulèrent dès le mois d'avril 1904, et s'échelonnèrent pendant près d'un an.

Cependant, il importait avant tout de briser le blocus maritime, et donc d'expédier le plus rapidement possible une flotte de navires de guerre au secours des assiégés.

Celle de la Mer Noire était géographiquement la plus proche, mais le Traité de Londres de 1870 lui interdisait de franchir les Dardanelles.

Restait l'escadre de la Baltique, devenue officiellement, sous le commandement du vice-amiral Rojesvensky, la "deuxième escadre du Pacifique", et à qui il "suffisait" -si l'on peut dire - de faire franchir, dans des conditions dantesques, une distance égale aux trois-quarts du tour du monde, pour s'en aller glaner, au terme d'un périple de sept mois (!), une mort misérable face à des canonniers japonais parfaitement reposés et qui guettaient son arrivée depuis plusieurs semaines...

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Bonjour, excellent blog, comme toujours documenbté et instructif.

Il faut dire que la chute de Port Arthur avait tout d'un désastre annincé..en partie à cause des apétits colonialistes et financiers de l'entourage immédiat de Nicolas II souverain par ailleurs assez "mou du genou".
Le proconsul russe à Port Arthur était l'amiral Alexeieff, fils bâtard du tsar Alexandre II,donc "oncle de la main gauche" de Nicolas II, notoirement temporisateur et entouré d'une clique d'affairistes qui faisaient fortune, notamment dans le commerce du bois.

Il entra en grave conflit avec le Général Kouropatkine et n'avait pas vraiment non plus d'atomes crochus avec l'excellent marin et entraîneur d'hommes qu'était Makaroff.

Problème, des sommes énormes prévues pour l'équipement du port militaire de Port Arthur furent détournées par ce lobby colonial pour construire le port de commerce de Dalny (actuellement Dalian) . du coup l'excellente rade de Port arthur ne fut que médiocrement équipée en arsenaux, cales sèches, chantiers navals et autres bassins de radoub.

Les russes , qui achetaient (grâce aux emprunts) des navires de guerre "sur étagère" auprès des chantiers navals français et américains (dont les fabrications étaient quelque peu inférieures à celles du complexe militaro industriel anglais ,allié privilégié du Japon) ne s'étaient, du coup, pas donné les moyens de les radouber correctement .

Cela handicapera terriblement Makaroff lorsqu'il faudra remettre en état de combattre les navires de guerre (dont le Césarévitch, construit à Toulon) après les attaques surprise de l'Amiral Togo.
Les équipages russes étaient souvent constitués de paysans ou de soldats reconvertis en marins par oukase impérial et n'ayant guère de tradition maritime ancienne.

Les japonais avaient suivi une démarche exactement inverse : Ils avaient contracté Emile Bertin (grand ingénieur de la Marine Nationale) pour construire le plus vite possible des navires au japon même après avoir commencé par créer des arsenaux bien équipés qui permettront à Togo de réparer en un temps record ses navires fatigués par le blocus de Port Arthur et disposer d'une flotte au mieux de sa forme pour exécuter à Tsushima la flottte de Rojestvensky dont les carènes couvertes de bernicles et d'algues, propulsées par des machines épuisées par un demi tour du monde dégueulaient leurs tubes de chaudières et bringuebalaient des bielles...

Après tout Nicoals II méritait bien les critiques aussi mordantes que légitimes de Lénine et de Trotsky (mais aussi d'autres , moins exttrémistes) et la guerre de 1904-1905 a été le premier clou de son cercueil.