mardi 27 octobre 2020

6544 - repli ou débandade

Colonne allemande abandonnée sur une route près de Moscou, 5 décembre 1941
... 16 décembre 1941

Dans une guerre, la frontière qui sépare le repli stratégique de la pure et simple débandade tient souvent à peu de choses.

Malgré son extrême répugnance à abandonner un terrain si chèrement conquis, et à accepter les arguments de ses généraux qui le supplient d'autoriser la retraite, Hitler comprend néanmoins que l'armée allemande, paralysée par le froid et épuisée par six mois de campagne meurtrière, n'a pas les moyens de tenir le Front face à la centaine de divisions rassemblées par Joukov. 

Reste qu’il faut à tout prix éviter une nouvelle Berezina, à savoir cette terrible Retraite de Russie qui avait vu Napoléon perdre son armée et bientôt son trône dans un repli qui s'était rapidement transformé en déroute lorsque, contraints d'abandonner armes et matériel, privés de tout abri dans la steppe, mourant de faim et de froid, constamment harcelés par les Russes, les soldats de la Grande armée étaient morts par dizaines de milliers (1)

Aux considérations de prestige personnel et de fierté nationale s'ajoutent donc une authentique dimension stratégique : permettre à la Wehrmacht de retraiter dans l'hiver russe, c’est aussi courir le risque de la perdre complètement !

Au sein de l'État-major, certains voient même la guerre définitivement perdue, et les tanks russes, que rien ne semble pouvoir arrêter, déjà aux portes de Berlin !

Totalement abattu, le maréchal von Bock, dont les troupes ont déjà reculé de plus de 100 km, écrit le 13 décembre qu'il faut laisser à Hitler lui-même le soin de décider si son Groupe d’Armées Centre doit tenter de se maintenir sur place, ou alors continuer à battre en retraite, le risque de le voir s’effondrer complètement étant, selon lui, le même dans les deux cas !

C'est Guderian qui, le 16 décembre, reçoit la réponse du Führer : "Par l'engagement personnel du commandant, des commandants subalternes et des officiers, il fallait obliger les troupes à une résistance fanatique sur leurs positions, sans tenir compte de l'ennemi qui enfonçait les flancs ou l'arrière (...) Il ne saurait être question de retrait. Hormis en certains endroits où il y a eu pénétration profonde de l'ennemi" (2)

Des milliers de soldats allemands vont maintenant payer cette décision de leur sang...


(1) au total, la Campagne de Russie coûta la vie à quelques 300 000 soldats français
(2) Kershaw, pp 661-662

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