jeudi 27 décembre 2018

5784 - Sfakia, ultime espoir

... on imagine sans peine le désarroi et l'amertume de ceux qui, après avoir tant peiné pour rejoindre Sfakia, et y avoir attendu pendant plusieurs jours, et sous les bombardements sporadiques de la Luftwaffe, une place sur un navire d'évacuation, voient finalement le dernier de ceux-ci partir sans eux.

A l'aube, les officiers encore présents - aucun n'a un grade supérieur à celui de lieutenant-colonel - rassemblent leurs hommes, désignent des endroits où les soldats doivent jeter leurs armes après les avoir brisées, puis attendent tranquillement l'arrivée des premières troupes allemandes.

Une cérémonie de capitulation, purement formelle, est alors organisée avant que ces 5 000 hommes, sous la conduite de leurs vainqueurs, n'entament, à pieds, l'interminable chemin du retour jusque Galatas et un camp de prisonniers hâtivement constitué.

"Un des pires épisodes de toute cette affaire", écrira un de ces infortunés, "c'est le sentiment que les officiers supérieurs avaient une valeur toute particulière, qu'ils avaient l'obligation de se sauver entre eux, qu'ils n'étaient en définitive pas personnellement concernés par le résultat des opérations qu'ils dirigeaient, qu'ils devaient simplement faire de leur mieux mais qu'ils auraient toujours la possibilité de recommencer une autre fois.

Même si elle n'est pas entièrement comparable, la tradition navale où le commandant est la dernière personne qui doit être sauvée du désastre, me semble peut-être la plus saine.

Il y eut quelques exceptions honorables, bien trop flagrantes dans leur rareté, mais pour l'essentiel, nous assistâmes bien moins à un sauve-qui-peut (1) qu'à une foutue et honteuse ruée pour la priorité, à la prétention selon laquelle le privilège de pouvoir s'en sortir devait être fondé sur le rang et la séniorité
(2)

(1) en français dans le texte
(2) Beevor, op cit

Aucun commentaire: