8997 - cuirassés contre terrains d'aviation

Le Howe, en janvier 1945, ou pourquoi ne pas utiliser les énormes canons d'un cuirassé contre des terrains d'aviation...

… Sakishima Gunto, 04 mai 1945, 06h05

Après cette parenthèse, revenons à présent à la British Pacifc Fleet, que nous avons abandonnée à Leyte le 27 avril 1945, après avoir appris, à son grand soulagement, qu’elle pourrait s’en retourner combattre au large d’Okinawa aux côtés de la 5ème Flotte américaine plutôt que de se voir reléguée du côté de Bornéo avec la 7ème Flotte.

A la fin du mois, remis en état et réapprovisionnés grâce, une fois encore, au soutien logistique des Américains, les cuirassés King George V et Howe, les porte-avions Indefatigable, Indomitable, Victorious et Formidable ont donc repris, en compagnie de cinq croiseurs et d’une quinzaine de destroyers, la route de Sakishima Gunto où les Japonais, conformément à leur détestable habitude, se tiennent déjà prêts à réparer une fois encore de nuit les terrains que les Britanniques ne vont une fois encore pas manquer de bombarder de jour !

Mais cette fois du moins, les Britanniques sont résolus à innover : après avoir assisté, sur le coup de 06h05, au départ des vagues de chasseurs et de bombardiers destinés aux aérodromes, les cuirassés et croiseurs vont en effet se séparer de la formation et, escortés par six destroyers, vont eux-mêmes prendre la direction des dits terrains afin de les écraser sous leurs obus de 356, 152 et 133mm, une opération - rappelons-nous - déjà envisagée fin mars, mais au bout du compte annulée en raison de l’arrivée d’une tempête.

Pilonner des terrains d’aviation au moyen de gros canons de marine n’est pas une mauvaise idée en soi, et ce n’est pas non plus une idée totalement inédite puisque les Japonais, pour ne parler que d’eux, l’ont plusieurs fois mise en pratique à Guadalcanal (1), en 1942, contre le terrain américain de Henderson Field.

Cerise sur le sundae, c’est aussi une idée qui aura le mérite d’occuper enfin les servants de l’artillerie principale des cuirassés et croiseurs qui, il faut bien le dire, n’ont strictement rien eu à faire, et rien à se mettre sous les canons, depuis des mois.

L’ennui, c’est qu’en agissant ainsi, on va inévitablement priver les porte-avions d’un considérable soutien anti-aérien, puisque ces derniers ne pourront plus compter, pour leur défense, que sur leur propre artillerie et celle d’une poignée de destroyers, ainsi que sur la couverture de chasseurs qui n’ont jamais particulièrement brillé dans cet exercice…

(1) Sur la Campagne de Guadalcanal : Saviez-vous que… Watchtower