mardi 5 mars 2019

5952 - le Yavuz Sultan Selim

Le Goeben (à droite) devenu Yavuz, dans le Bosphore, vers 1915
... 16 aout 1914

En apprenant l'action, ou plutôt l'inaction, de Troubridge, Churchill fulmine, de même d'ailleurs que l'Amirauté et la quasi-totalité de l'opinion publique britannique.

Immédiatement rappelé à Londres, Troubridge est expédié devant une court-martiale, qui finira certes par l'acquitter mais ne rétablira jamais sa réputation, en particulier aux yeux de Churchill qui, dans les décennies ultérieures, citera à plusieurs reprises cet incident comme "une des pires infamies jamais commises par un officier de Sa Majesté" (1)

L'Empire ottoman est neutre mais néanmoins gardienne des détroits et contrainte par les traités de ne laisser transiter aucun navire de guerre étranger par les Dardanelles jusqu'en Mer de Marmara, puis de la Mer de Marmara jusqu'à la Mer Noire par le Bosphore.

Le Droit international impose également à tout navire belligérant trouvant refuge dans un port neutre d'en ressortir avant 48 heures, sous peine d'y être interné, et désarmé, jusqu'à la fin du conflit.

Le problème, c'est que depuis la confiscation de leurs deux dreadnought par les Britanniques, les Ottomans sont on ne peut plus mal disposés à leur égard… et donc on ne peut plus enclins à se livrer, avec l’accord des Allemands, à un incroyable tour de passe-passe : transférer à présent les Goeben et Breslau, mais aussi leurs équipages allemands,… à leur propre marine (!) qui, du coup, va ainsi récupérer grâce à l’Allemagne une bonne partie de la puissance navale qu’elle avait dû abandonner en Grande-Bretagne quelques jours plus tôt !

Le 16 aout, les Goeben et Breslau deviennent donc très officiellement ottomans sous le nom de Yavuz Sultan Selim et Midilli

Et comme en turc aussi la vengeance est un plat qui se mange froid, l’affaire n’est pas encore terminée !

(1) le 25 mai 1941, après avoir appris la destruction du croiseur de bataille Hood par le cuirassé Bismarck, et surtout l'abandon, par le Prince of Wales endommagé, de la bataille contre le Bismarck, Churchill mentionnera cette nouvelle comme "la pire chose depuis que Troubridge a fait demi-tour face au Goeben en 1914"

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