jeudi 31 mars 2005

753 - le "Maître du bombardement"


















... pour optimiser les destructions, et garantir un bombardement à saturation sur l'objectif visé, il est préférable de ne pas laisser chaque pilote décider lui-même du moment où il lancera ses bombes.

Dépendamment de l'importance du raid, un ou plusieurs "Master Bomber" donne donc à l'ensemble de sa formation l'ordre de larguer les bombes à son signal, et aussitôt après qu'il a lui-même repéré la cible.

Chez les Américains, le signal prend la forme de fumigènes lancé par l'avion de tête. Si le leader de la formation est abattu ou contraint à faire demi-tour, il est aussitôt remplacé dans son rôle de "Master Bomber" par un autre appareil du groupe.

En théorie, cette méthode, qui enlève à chaque bombardier individuel l'initiative du largage, garantit la concentration maximale des bombes sur la plus petite surface possible, et minimise donc les risques de "dommages collatéraux" sur les maisons ou les bâtiments avoisinants la cible.

En pratique, tout dépend évidemment du talent du "Master Bomber" lui-même, de son habileté à repérer l'objectif au milieu des nuages, des flammes ou de la fumée,... ou de sa propre volonté de survivre en ne s'aventurant pas trop près d'une cible âprement défendue.

Larguées trop tôt, trop tard, ou carrément à côté, les bombes aplatissent forcément un quartier ouvrier, une église, un monument historique, qui ne faisait pas partie de la mission mais se trouvait tout simplement au mauvais endroit au mauvais moment...

mercredi 30 mars 2005

752 - les Pathfinders

... repérer la ville qui se cache dans la nuit, et y marquer les zones à bombarder, est le travail des éclaireurs. Construit entièrement en bois, ultra-rapide et insaisissable, le bimoteur De Havilland "Mosquito" - avion dont personne ne voulait au début de la guerre - est la monture préférée des "Pathfinders" britanniques, celle avec laquelle ils sillonnent continuellement l'Allemagne à la recherche de villes à détruire, suivis à quelques minutes par des flottes de plusieurs centaines de bombardiers, chargés d'incinérer la ville ainsi identifiée.

Pour délimiter la cible à détruire, le Pathfinder largue des marqueurs colorés - qui sont autant de petites bombes incendiaires - sur lesquels les bombardiers se repèrent avant de larguer leurs propres bombes. Les couleurs et les formes du marquage eux-mêmes varient à chaque raid, car il s'agit d'empêcher l'ennemi d'allumer des leurres au milieu des forêts ou en plein champ.

Une fois le raid lancé, et les incendies amorcés, le Pathfinder se doit de rester à proximité immédiate du bûcher. Il faut en effet renouveler fréquemment les marqueurs. Chaque nouvelle vague de bombardiers largue en effet de plus en plus tôt, dès qu'elle aperçoit les flammes qui font rage. A mesure que le raid se prolonge, la cible a donc tendance à "avancer". Quand on allume un incendie à Berlin, on finit presque, si on n'y prend garde, par bombarder Bruxelles.

A mesure que la cité se consume, le Pathfinder passe et repasse donc à plusieurs reprises au dessus du brasier, y ajoutant ses petites flammes rouges, jaunes ou vertes. Si le raid dure suffisamment longtemps, et si les circonstances sont favorables, l'incendie se transforme en tempête de feu que plus rien ni personne ne peut éteindre, qui absorbe tout l'oxygène, fait monter la température à plus de mille degrés et pulvérise les maisons de pierre comme si elles étaient de carton.

Le bitume des rues fond et piège implacablement ceux qui ont eu l'inconscience de s'y aventurer en tentant de fuir les caves et les abris, transformés en fours crématoires...

mardi 29 mars 2005

751 - Shrage Musik

... la nuit, le ventre et les ailes du bombardier, pourtant obligatoirement peints en noir, se dessinent à la lueur des incendies et constituent une véritable provocation pour le chasseur de nuit en maraude.

Aussi peu protégé soit-il par rapport à ses cousins B17 et B24 américains, le Lancaster, comme tous les gros bombardiers britanniques, est néanmoins défendu par trois tourelles implantées respectivement dans le nez, sur le dos, et à la queue de l'avion.

Rien n'a été prévu en revanche pour protéger l'appareil contre les attaques menées par le bas. Une tourelle ventrale - fort semblable à celle qui équipe les appareils américains - a bien été installée sur les prototypes,... puis démontée sur les avions de série, pour gagner du poids et augmenter le tonnage de bombes transportées.

Les ingénieurs britanniques sont en effet convaincus qu'aucun chasseur allemand n'est capable, de nuit, de mener une attaque de bas en haut sans s'écraser nécessairement sur sa cible.

Les ingénieurs allemands vont leur donner tort, en installant, sur le dos de leurs chasseurs de nuit, une paire de canons de 20 ou 30mm tirant sous un angle de 60 degrés vers le haut. Baptisée "Shrage Musik", cette installation ingénieuse permet à l'assaillant de s'approcher de sa proie par en dessous, puis de lui décocher une rafale mortelle dans le ventre, sans même avoir été repéré.

L'astuce, qui coûtera la vie à des centaines d'aviateurs britanniques, et qui sera reprise, mais avec beaucoup moins de succès, par les aviateurs japonais, mettra des mois avant d'être découverte...

lundi 28 mars 2005

750 - retiens la nuit

... la nuit protège le bombardier contre la DCA et la chasse ennemies, mais elle l'empêche aussi de voir ce qui défile sous ses ailes. Les nuits sans lune, repérer une ville soumise au black-out est très difficile. Y distinguer une cible particulière - comme une usine - est carrément impossible.

Les instruments de radionavigation peuvent certes aider, mais ils peuvent aussi être brouillés par l'ennemi. C'est ce qui arrive à ce Dornier 217 allemand qui, le 12 octobre 1941, est contraint de se poser en panne sèche au beau milieu de la campagne anglaise alors qu'il se croit au dessus de la France. Plus puissant que l'émetteur allemand, l'émetteur de radionavigation anglais n'a cessé de lui envoyer de mauvais caps et directions...

Loin de la fumée et des explosions, une guerre secrète et feutrée se déroule en parallèle, dans le silence et le confort des laboratoires et des centres d'études, entre les ingénieurs qui tentent de percer la nuit, et ceux qui s'efforcent au contraire de lui conserver son opacité.

Le radar allemand peut être aveuglé par le largage, à haute altitude, de milliers de bandelettes d'aluminium - appelées « windows » - qui brouillent les écrans et font croire à la présence de milliers de bombardiers. Mais le radar britannique peut aussi trahir son utilisateur.

Installé sous le ventre de certains bombardiers, le radar aéroporté H2S donne une vague image du sol, et facilite donc la navigation ainsi que le repérage des cibles. Mais ses émissions sont également détectées par les chasseurs de nuit allemands, qui n'ont plus qu'à les remonter jusqu'à la source. Des dizaines de bombardiers britanniques tombent ainsi, victimes de chasseurs qu'ils n'ont pas eu le temps de voir venir, et d'une technologie qui s'est retournée contre eux...

dimanche 27 mars 2005

749 - cibles émouvantes

... dans la guerre totale, même la ville la moins industrialisée peut devenir une cible dont le sort - survie ou destruction - ne dépend en définitive que du bon vouloir de l'assaillant, des renseignements dont il dispose, de ses moyens matériels, de l'habileté de ses pilotes, voire du simple hasard.

"Compte tenu de sa taille, on touchait toujours Berlin", écrit Jorg Friedrich. Il en alla autrement, le 3 mars 1943, lorsqu'en approchant de la côte, le Master Bomber prit pour le port de Hambourg les bancs de sable de l'Elbe, mis à nus par la marée (...) Il fut en outre induit en erreur par une installation camouflée, construite et éclairée par les Allemands à seize kilomètres en aval pour détourner le bombardement (...) Ces deux fautes s'additionnèrent et furent fatales à la petite ville voisine de Wedel. Elle fut rayée de la carte".

De même, si la ville de Hiroshima est bel et bien un "centre militaire" depuis 1868, ainsi qu'un important port militaire, avec arsenaux et bassins de radoubs, et si Nagasaki est, depuis le début du 20ème siècle, l'un des plus plus grands sites de construction navale japonais, qui abrite plusieurs arsenaux, la seconde ne devra en définitive sa destruction qu'à la présence, au dessus de la ville voisine de Kokura, d'une couverture nuageuse si importante qu'elle contraindra le B29 qui doit y larguer la deuxième bombe atomique de l'Histoire à se détourner vers Nagasaki.

La Vie ou la Mort, c'est parfois une simple affaire de nuages en plus ou en moins...

samedi 26 mars 2005

748 - civil ou militaire ?



















... dans une guerre totale, la distinction entre civil et militaire s'estompe. Si le militaire combat encore au Front, le civil, de son côté, travaille dans une entreprise forcément liée de près ou de loin à l'effort de guerre. Est-il muté au Front qu'il se retrouve aussitôt remplacé par un déporté ou une femme sur la même ligne de production, qui ne s'arrête pas une minute de tourner.

Ailleurs, les seniors reprennent du service actif dans la police, la défense passive ou chez les pompiers. Même les enfants et les adolescents sont mis à contribution pour creuser des tranchées, manipuler des obus, ou servir dans les batteries de canons anti-aériens.

Lorsque l'Allemagne, faute de combattants, commence à démanteler les effectifs de ses unités de DCA pour combler les pertes subies sur les différents fronts, ce sont tout naturellement des civils, et souvent les enfants des écoles qui prennent la relève.

Ainsi, le 6 mars 1944, le Flak Abteilung 437 - dont les canons de 105mm sont installé au coeur de Berlin - est servi par 36 soldats de l'armée régulière, 90 écoliers et... 29 prisonniers russes.

"Nous étions dans une situation bizarre, traités tantôt comme des soldats, tantôt comme des enfants (...) On espérait que nous abattrions des avions ennemis avec nos canons de 105mm, mais nous n'étions pas considérés comme assez vieux pour porter les fusils lorsque nous devions essayer de capturer les équipages qui descendaient en parachute"

De même, dans le district de Siemensstadt, le Leicht Flak Abteilung 722 aligne lui aussi ses trois canons de 37mm... à moins de 100 mètres de l'école où étudie Godfried Gottschalk, "Lufwaffenhelfer" de 16 ans : "Un garçon est entré dans la classe et a crié 'Voralarm!' Nous nous sommes tous levés pour nous ruer dehors vers les canons, en attrapant casque d'acier et masque à gaz"

Il ne reste plus à ces "enfants" qu'à débâcher les canons, comprimer les ressorts d'armements, puis glisser un chargeur de 6 obus dans chaque culasse. Si les bombes tombent sur l'école avant qu'ils arrivent à leurs canons, ils meurent en civils innocents, injustement pris pour cible. Si elles tombent deux minutes plus tard, et cent mètres plus loin, ils deviennent soldats morts au combat. S'ils abattent un B24 américain, tuant les dix hommes d'équipage, ils sont décorés comme héros de la Nouvelle Allemagne. S'ils le ratent, ou si aucun bombardier ne se présente à portée de tir, ils rebâchent les canons et retournent tranquillement en classe dès la fin de l'alerte...

vendredi 25 mars 2005

747 - d'une réalité à l'autre

... si les citoyens allemands disposent de nombreux abris, de services de secours bien organisés et, au moins jusqu'en 1943, d'une défense anti-aérienne bien au point, au Japon, en revanche, dans leurs maisons presque exclusivement construites en bois, et généralement dépourvues de caves, les habitants, qui ne peuvent pas davantage compter sur une défense anti-aérienne et des services de secours efficaces, souffrent bien davantage.

En prenant la direction des opérations de bombardement sur le Japon, en janvier 1945, le général Curtis LeMay a en effet très vite réalisé que l'on peut facilement y recréer, et à bien moindre coût, les recettes du bombardement incendiaire qui ont déjà incinéré les villes allemandes.

Le 9 mai 1945, 300 "Superforteresses" B29 pilonnent Yamata et Tokyo ravageant 40 km2 d'habitations pour la perte de 14 appareils seulement, dont 13 à l'atterrissage (!) Le 25 mai, 464 B29 déclenchent l'apocalypse sur Tokyo, annihilant 49 km2 d'habitations pour la perte de 26 appareils. Vient ensuite le tour de Yokohama, rasée à 85%. A l'été, la plupart des grandes villes japonaises ne sont plus que des amas de ruines fumantes. Au bilan final, les raids de Curtis LeMay auront coûté la vie à des centaines de milliers de Japonais, et créé 13 millions de sans-abris.

Pour autant, on ne peut pas, là encore, conclure à l'absence de tout objectif militaire.

"Bien avant la guerre, les usines [d'armements japonaises] avaient été aménagées dans des zones fortement urbanisées (...) Plus grave encore, la concentration des usines et des ateliers de sous-traitance autour des grands centres urbains, que les B29 prirent pour cibles dès l'automne 1944. Dans ce domaine, le Japon paya durement l'imprévoyance générale tant des autorités trop confiantes que des constructeurs trop peu concernés par les problèmes de sécurité. Les grands centres industriels connus des Américains constituèrent de véritables invitations au bombardement. (...) Une fois de plus, la prise de conscience fut trop tardive. Les déplacements d'usines furent entrepris dans la plus grande précipitation, sous les bombes. En 1945, il résulta de ce chaos une chute sensible de la production"

jeudi 24 mars 2005

746 - bourreau ou victime ?

... dans la guerre totale, chacun devient tour à tour le bourreau et la victime de l'autre. Ayant applaudi aux bombardements de Guernica (1937), puis de Varsovie (1939), puis de Rotterdam, Coventry ou Londres (1940), avant ceux de Leningrad ou Moscou (1941), l'Allemagne doit forcément, tôt ou tard, se retrouver victime de sa propre médecine, et en particulier des bombardements incendiaires qu'elle a elle-même testés en Espagne, quelques années auparavant.

Mais s'ils transforment effectivement les villes allemandes en amas de ruines fumantes, les bombardements anglo-américains, malgré toute leur férocité, n'y tuent qu'entre 400 000 et 600 000 personnes, soit seulement 1.5% de la population urbaine allemande, et bien moins que les chiffres auxquels chaque camp s'attendait avant la guerre.

A voir les images de Cologne, Berlin, Hambourg, Dresde, ou de tant d'autres villes ravagées par les explosions et les incendies, il semble pourtant impossible que quelqu'un ait pu y survivre. Mais les caves, les bunkers, les abris aménagés un peu partout, ainsi que la qualité et l'organisation de la défense passive allemande, accomplissent bel et bien des miracles.

Les assaillants, en revanche, n'ont aucun miracle à attendre

"Le Bomber Command imposait à ses équipages une série de trente missions. En 1943, les chances de s'en sortir vivant étaient de une sur six, en novembre, elles atteignaient 20% (...) Les équipages devenaient donc fatalistes. On y arrivait ou on n'y arrivait pas. (...) Une incroyable épouvante ne tarda pas à creuser les traits des aspirants aux airs d'adolescents qui, par désir d'aventure et parce qu'il fallait que le Bomber Command gagne la guerre, accomplissaient leurs trente missions"

mercredi 23 mars 2005

745 - l'histoire sans héros

... pour les civils, comme ceux de Londres, qui connurent les bombardements de la 2ème Guerre mondiale, et pour les citoyens d'aujourd'hui, amollis par trois générations de Paix, il paraissait (et il paraît toujours) invraisemblable que des bombes aient pu tomber sur d'autres villes que les villes visées, qu'elles aient détruit des écoles, des hôpitaux, des lotissements, des fermes, voire même des champs, situés parfois à des dizaines de kilomètres de tout objectif militaire.

Pour l'expliquer, on peut invoquer les défaillances du renseignement, les mauvaises conditions météorologiques, l'absence de visibilité, ou le pur et simple accident. Mais le "facteur humain" y joue un rôle tout aussi important.

Dans la plupart des cas, et chez tous les belligérants, il n'y a en effet pas de "Dummy Run", de "coup pour rien". Lorsque l'objectif n'est pas repéré du premier coup, on ne fait pas un deuxième ou un troisième passage, en s'exposant à chaque fois au feu de la DCA ennemie. Et pas question non plus d'entreprendre l'interminable trajet du retour, puis l'atterrissage, avec le plein chargement de bombes. Au mieux, on se cherche un objectif secondaire - il y en a toujours plusieurs de prévus - sur lequel les lancer. Au pire, on les largue immédiatement, peu importe où, histoire d'alléger l'avion.

Les aviateurs ne sont pas des héros sans peur et sans reproche, mais de simples être humains âgés d'une vingtaine d'années. Entassés pendant des heures dans un avion poussif, inconfortable, bruyant, hyper-exigu, soumis à un froid polaire (ni chauffage ni pressurisation masque à oxygène obligatoire et - 30 degrés celsius à l'intérieur), traqués par les projecteurs la nuit, canonnés en tout temps par la DCA, mitraillés par les chasseurs adverses infiniment plus maniables et performants, et avec comme seule perspective celle de rentrer intact à la base pour remettre ça le lendemain ou le surlendemain, ils ne songent qu'à sauver leur propre peau, tout en sachant que les bombes qu'ils larguent ont finalement bien davantage de chance de tuer un civil qu'un officier de l'armée ennemie...

mardi 22 mars 2005

744 - de jour comme de nuit

... en septembre 1941, suite à la publication du Rapport Butt sur l'efficacité des bombardements aériens, le Bomber Command britannique élabore une nouvelle stratégie, spécifiquement destinée à l'attaque des villes.

"L'État-major de l'armée de l'Air avait calculé qu'avec 4 000 bombardiers, et un largage mensuel de 60 000 tonnes, soit dix fois plus que ce qu'on avait fait jusque là, on pourrait détruire quarante-trois villes allemandes de plus de 100 000 habitants. Quinze millions de civils y vivaient. On mettrait l'Allemagne à genoux en six mois rien qu'en éliminant la volonté de résistance des Allemands"

Mais on ne dispose même pas du quart des bombardiers requis et l'entrée en guerre des Américains (décembre 1941) n'améliore nullement les capacités du Bomber Command. Il faudra en effet plus d'un an avant que la 8ème Air Force Américaine - qu'on appellera un jour la "Mighty Eight" - soit opérationnelle et lâche ses premiers B17 et B24 au dessus de l'Europe occupée...

Pêchant par naïveté, les Américains croient en effet qu'à la différence des bombardiers britanniques, leurs "forteresses volantes", évoluant à haute altitude en "packs" serrés, telles des divisions napoléoniennes, parviendront à affronter avec succès les meutes de chasseurs que la Luftwaffe ne manquera pas de lancer sur leur chemin. Ils pensent également qu'en opérant de jour, et non de nuit, leurs bombardiers trouveront plus facilement la cible, et pourront donc l'attaquer avec davantage d'efficacité tout en provoquant moins de dommages collatéraux.

Dans la réalité et particulièrement dans les premiers mois, les résultats sont pourtant catastrophiques. Aucune formation de B17, aussi nombreuse et serrée soit-elle, ne parvient à empêcher la chasse allemande d'y prélever un lourd tribut. Le seul raid sur Schweinfurth (14 octobre 1943) coûte près de 30% des effectifs engagés (!)

Quant à la plus grande précision attendue, elle n'est que rarement au rendez-vous. A l'entraînement, par temps clair, sous de parfaites conditions de visibilité, la précision des bombardements est d'environ 300 mètres. Mais en conditions réelles de combat, au dessus du territoire ennemi, par temps couvert, elle chute immédiatement à plusieurs kilomètres.

Le facteur humain joue il est vrai un grand rôle

lundi 21 mars 2005

743 - la guerre totale

... si toutes les villes finissent par être bombardées au moins une fois, ne serait-ce que par erreur, alors qu'on en vise une autre, certains bombardements peuvent évidemment sembler plus justifiés que d'autre.

A priori, Berlin - ville industrielle, capitale du Reich millénaire, siège du gouvernement - apparaît comme une cible plus légitime que Wörms, petite bourgade de 58 000 habitants n'abritant qu'une seule entreprise d'armement. Mais dans la logique de "guerre totale", il n'est plus ni cités ni civils innocents.

"Voulez-vous la guerre totale ?" s'écrie le Ministre de la Propagande du Reich, Joseph Goebbels à la tribune du Palais des Sports de Berlin, le 18 février 1943, avant d'ajouter, toujours soutenu par les acclamations d'une foule en délire, "Êtes-vous résolus à suivre le Führer et à lutter pour la victoire quel qu'en soit le coût".

Et bien que le coût se fasse jour après jour plus exorbitant, le régime nazi n'en conserve pas moins l'appui de la majorité du peuple allemand jusqu'à la mi-1944, lorsqu'il devient évident que l'Allemagne va se trouver laminée par l'avancée conjointe des troupes russes et anglo-américaines.

Encore la volonté de frapper en retour, plutôt que la résignation de se rendre, prédomine-t-elle quasiment jusqu'à la fin. Comme le souligne Jorg Friedrich, "Un sentiment de haine déferlait sur le peuple tout entier. De manière presque unanime, tous les Volksgenossen exigent qu'à partir de maintenant le peuple anglais soit exterminé. La vengeance contre l'Angleterre ne peut pas être assez dure (...) Après le raid de Francfort du 28 janvier 1944, on y appelle à la guerre bactériologique. (...) Le rapport de la Wehrmacht du 16 juin, qui annonce que des raids ont été menés sur le sud de l'Angleterre et sur Londres avec un engin explosif d'un genre nouveau [les fusées V1] provoque des transports de joie. (...) On exulte en apprenant que des coups ont été portés au centre de la ville"

dimanche 20 mars 2005

742 - "Il est clair que les cibles doivent être les zones d'habitation"

... face à l'ampleur des pertes, et devant l'impossibilité matérielle de détruire des objectifs clairement délimités, le gouvernement britannique décide, en février 1942, de renoncer à la langue de bois et aux fioritures rhétoriques.

La "directive area bombing" adressée au Bomber Command précise en effet : "Il a été décidé que le principal objectif de votre opération serait désormais axé sur le moral de la population ennemie, notamment celui des ouvriers de l'industrie" (...) "Il est clair que les cibles doivent être les zones d'habitation et non, par exemple, des chantiers navals, ou les industries d'aviation. Cela doit être parfaitement clair."

Il faut dire que nombre de villes allemandes comme Hambourg constituent bel et bien des cibles militaires en tant que telles, et hébergent des ouvriers et des employés qui, dans leur majorité, travaillent pour des entreprises liées de près ou de loin à l'effort de guerre.

Ainsi, malgré un début de délocalisation des industries loin des centres fortement urbanisés (dans des mines, des tunnels ferroviaires ou même au milieu des forêts), une ville comme Berlin abrite encore, au printemps 1944, la moitié de l'industrie électromécanique allemande, avec des usines comme AEG (radios, isolateurs, générateurs), Telefunken (radios, radars) ou Robert Bosch (allumages pour véhicules et avions).

Berlin est aussi le troisième centre de production de roulements à billes d'Allemagne, un important centre de constructions aéronautique, avec les usines Heinkel (26 bombardiers quadrimoteurs Heinkel 177 par mois), Henschel (avions d'assaut Henschel 129 et bombardiers Junkers 88), Focke-Wulf, Dornier et Flettner, l'usine de moteurs d'avions Argus (fabriquant les pulsoréacteurs propulsant les bientôt célèbres fusées V1), et l'immense usine de Daimler-Benz à Genshagen, qui fabrique à elle seule 20% des moteurs d'avions allemands.

De leur côté, Auto-Union (qui s'appellera un jour Audi) et Alkett produisent en grande série les blindés et canons automoteurs dessinés, notamment, par Ferdinand Porsche, et dont Maybach, installé à Tempelhof, fabrique les moteurs. Des milliers de camions et de véhicules militaires de tous types sortent également des usines Demag à Staaken, Büssing et Nationale Automobile à Oberschöneweide.

samedi 19 mars 2005

741 - où est la cible ?

... pour détruire un objectif comme Coventry du haut des airs, encore faut-il le trouver, ce qui n'est pas une mince affaire, surtout de nuit. Car si l'obscurité protège quelque peu les très vulnérables bombardiers, elle les empêche également de voir ce qui défile sous leurs ailes.

"En août [1941], écrit l'historien allemand Jorg Friedrich, un rapport d'enquête [sur l'efficacité des bombardements et les pertes encourues] fut présenté au gouvernement et au Parlement, le rapport Butt. A l'aide de photos aériennes, il concluait que, lorsque le temps était favorable [ce qui était très rare] le *tiers* des appareils engagés touchait leur cible. La "cible" étant une zone d'un *rayon* de *huit kilomètres* autour d'un point. Dans le bassin de la Ruhr, principale zone d'opérations, on ne touchait sa cible que par hasard pendant les semaines sans lune. (...) En novembre 1943, toucher une zone industrielle (...) au sein des 900 kilomètres carrés de Berlin relevait encore du hasard".

De fait, à cette époque, et malgré l'apparition des premiers radars de bord, seul un équipage sur quatre est capable, de nuit, de placer ses bombes à moins de trois kilomètres de la cible visée (!)

Dit autrement, l'immense majorité des bombes que l'on tente d'envoyer sur des objectifs précis - comme des usines ou des raffineries de quelques centaines de mètres carrés - tombe tout simplement à côté, le plus souvent dans les forêts ou les champs de pommes de terre, ce qui, compte tenu des pertes que l'on subit (55 000 tués et 20 000 blessés ou prisonniers sur un effectif total de 125 000 aviateurs britanniques employés entre 1940 et 1945) est proprement insoutenable si le seul résultat concret de l'opération revient à labourer la campagne allemande.

Compte tenu des moyens techniques dont on dispose, il ne reste donc plus le choix qu'entre deux solutions : renoncer tout simplement à bombarder l'Allemagne et envoyer les avions à la casse, ou trouver, en Allemagne, des objectifs suffisamment étendus pour que les bombes puissent y toucher quelque chose de plus utile qu'un champ de pommes de terre.

Seules les villes correspondent à cette définition

vendredi 18 mars 2005

740 - cent fois sur le métier...
















... les ponts se réparent, les machines-outils se remplacent, les cratères se remplissent, les incendies s'éteignent, les ruines se déblaient, et d'autant plus facilement que la ville est industrielle et fortement peuplée.

Il importe donc de répéter fréquemment le bombardement, de ne pas laisser le moindre répit aux habitants en sorte que, épuisés, ils finissent par exiger la Paix, ce qui est le but final de la manoeuvre, par ailleurs régulièrement rappelé - avant et après les raids - par le largage de milliers de tracts, appelant la population à déserter les usines, à quitter les villes et, in fine, à se révolter contre ses dirigeants.

Bien entendu, le Pouvoir en place ne l'entend pas de cette oreille, qui réprime sévèrement, et condamne même à mort, ceux qui s'emparent de ces tracts ou se laissent aller à des comportements ou propos jugés "défaitistes". La ville grouille d'indicateurs de la Police. Chacun soupçonne l'autre d'être un délateur, se méfie, se replie sur lui-même, mais n'hésite pas pour autant à dénoncer son voisin, voire ses parents ou son conjoint. A mesure que la défaite se rapproche, la répression se fait plus impitoyable. L'écoute de la radio ennemie est passible des tribunaux. En 1945, le simple fait de hisser un drapeau blanc à un balcon allemand vaut exécution immédiate et sans jugement de tous les occupants de la maison.

Après le bâton vient évidemment la carotte. Loin de s'affaiblir, l'État se renforce par les bombardements, ou plus exactement par la relation d'obligés que les bombardements créent entre les sinistrés et lui. Aussi dictatorial soit-il, l'État est en effet le seul capable d'organiser les secours, de venir en aide à ceux qui ont tout perdu, de leur distribuer nourriture et boisson, de les reloger, de leur procurer mobilier et vêtements de remplacement, dut-il pour cela les rafler dans toute l'Europe. Si le bombardement de l'Allemagne ruine l'État et les citoyens allemands, il ruine aussi les États et les citoyens des pays occupés par l'Allemagne, qui se voient contraints d'y exporter leurs biens manufacturés et leurs produits agricoles pour remplacer ceux qui ont été détruits en Allemagne.

Pour l'assaillant, la réparation des biens détruits, et l'absence de révolte chez les sinistrés, constituent évidemment autant d'invitations à répéter les bombardements. Les villes sont donc bombardées et rebombardées des dizaines de fois. Certaines, comme Berlin, plusieurs centaines...

jeudi 17 mars 2005

739 - les sorciers du feu

... Dépendamment de la nature de la cible (ville ancienne ou nouvelle, constructions en bois, en pierres ou en briques, densité de population, etc.), on utilise différentes compositions chimiques, et différents dosages de bombes incendiaires et explosives.

A l'empirisme de la Légion Condor, qui en 1936 lance des bidons simplement remplis d'un mélange d'huile et d'essence (lointain ancêtre du napalm) sur les villes et villages espagnols, réplique bientôt la recherche et l'expérimentation des scientifiques britanniques, qui font grand usage de phosphore, de produits chimiques corrosifs, et de méthanol.

La pyromanie guerrière n'est pas encore une science exacte, mais ce n'est déjà plus de l'artisanat d'amateurs. Jour et nuit, des techniciens étudient donc les cartes d'Allemagne et les dossiers des compagnies d'assurances. Ils comparent les habitats, réfléchissent et testent de nouveaux mélanges dont le but ultime est de provoquer l'apparition d'un "tempête de feu", comme celle qui engloutira Hambourg en juillet 1943 et forcera le Ministre allemand de la Propagande, Joseph Goebbels, à écrire, devant l'ampleur des destructions que rien n'a pu arrêter - les températures ont dépassé les mille degrés - qu'il s'agissait "d'une catastrophe devant laquelle recule l'imagination".

Sans surprise, ce sont les villes anciennes, à l'habitat très resserré, et construites en bois, qui brûlent le mieux. Si le feu adore les greniers, les poutres centenaires et les rues étroites, et n'aime ni le béton ni les banlieues ni les larges avenues, il conserve néanmoins sa part de magie, laquelle fait précisément le désespoir des sorciers britanniques, qui ne parviennent pas à comprendre pourquoi Berlin brûle aussi mal malgré tous les incendies qu'ils s'efforcent d'y allumer.

Berlin se fut-il avéré aussi combustible que Cologne ou Hambourg, la Seconde Guerre mondiale eut sans doute pris une tournure différente, et duré moins longtemps.

Ce ne fut hélas pas le cas...

mercredi 16 mars 2005

738 - le chaudron infernal

... si le feu constitue la manière la plus efficace et la plus économique de détruire une ville comme Coventry, encore faut-il réussir à le faire démarrer, puis à l'entretenir.

Un bombardement incendiaire s'avère en effet inefficace si les pompiers, voire les habitants eux-mêmes, parviennent à circonscrire les foyers d'incendie avant qu'ils ne se développent, ne se propagent, ne se rejoignent, et ne deviennent finalement incontrôlables.

A l'intérieur de la ville, les pompiers se sont entraînés aux effets des bombardements. La défense passive a distribué des centaines de tonnes de sable, qu'on a répandu sur le plancher de tous les greniers, afin de freiner la propagation des flammes par les toits et les soupentes. Les rideaux ont disparu des fenêtres. Dans la mesure du possible, on a installé des parois ou des portes coupe-feu, écarté le mobilier des murs, et dit adieu à tous les articles facilement inflammables.

Les habitants eux-mêmes se sont préparés au pire, et gardent en permanence leurs seaux et baignoires remplis d'eau, afin de pouvoir étouffer tout début d'incendie.

Pour l'attaquant-pyromane, le but consiste évidemment à déjouer les moyens de défense mis en place par l'attaqué-pompier. Un bombardement incendiaire est donc immédiatement précédé d'un bombardement conventionnel qui, en abattant les maisons, les murs et les portes, mais aussi en détruisant les canalisations d'eau et en projetant des débris dans toutes les directions, facilitera la progression des flammes, et gênera l'intervention des pompiers.

Pour la gêner davantage, on bombarde pendant des heures, et on lance des bombes à retardement, ce qui force les pompiers à se terrer eux-mêmes dans leurs propres abris, et laisse aux flammes le temps de gagner en importance.

mardi 15 mars 2005

737 - le grand feu

... pour détruire une ville comme Rotterdam, la bombe incendiaire est une arme bien plus efficace et économique que la simple bombe explosive. Le feu peut en effet s'auto-entretenir, et donc se propager pendant des heures, tandis que la bombe explosive cesse ses effets aussitôt après son éclatement.

Le feu et ses compagnons - la chaleur et la fumée - peuvent en outre s'insinuer et tuer dans les caves, les bunkers, les grottes, les tunnels, soit tous ces endroits enterrés et généralement inaccessibles aux bombes conventionnelles dans lesquels la population s'est réfugiée par habitude,... et dans lesquels elle va à présent cuire ou mourir d'asphyxie.

C'est particulièrement vrai pour les caves, qui n'ont jamais été conçues pour résister aux bombes d'avions ni - a fortiori - à l'incendie généré par les bombes d'avions.

Protégés du souffle et des éclats par les parois de leurs caves, les occupants ne se rendent pas compte qu'il doivent les quitter à plus ou moins bref délai,... sous peine de voir ces mêmes parois se transformer en fours mortels sous l'effet des incendies qui, dehors, génèrent des températures qui peuvent dépasser les mille degrés.

Les gaz qui s'insinuent dans les caves, et la lente raréfaction de l'oxygène, sont d'autres pièges qui tuent des milliers de personnes, lesquelles ne se sont souvent rendues de rien, ou n'ont pas eu la force et le courage nécessaires pour quitter à temps cet abri par trop rassurant.

Il faut dire que, dehors, les portes de l'enfer se sont ouvertes en grand, et que tout a été étudié pour que ceux qui s'y trouvent précipités ne puissent en ressortir...

lundi 14 mars 2005

736 - les trois petits cochons

... Pour détruire les villes - sièges du Pouvoir politique, administratif et économique, et également refuges des industries d'armements - on utilise des bombes explosives. Mais s'ils démolissent les maisons en surface, les projectiles de petit et moyen calibre s'avèrent en revanche généralement inefficaces contre les caves, et sans effet aucun contre les bunkers souterrains, où les civils attendent patiemment la fin de l'alerte.

Plus grave : hormis l'éventualité d'un coup direct - statistiquement fort rare - les ponts, les machines-outils, les voies de chemin de fer, n'ont pas grand-chose à craindre des bombes conventionnelles, qui n'agissent que par effet de souffle. Durant la guerre du Vietnam, les Américains vont ainsi gaspiller des centaines de tonnes d'explosifs dans d'innombrables tentatives visant à abattre le Pont Doumer à Hanoï, n'y réussissant au bout du compte que par l'emploi des premières "bombes intelligentes" à guidage laser (Saviez-vous que... -133 -)

Allégorie des trois petits cochons, le souffle des bombes explosives de la Seconde Guerre mondiale abat les bâtiments administratifs, crève les verrières des usines, aplatit les quartiers ouvriers alentours,... mais reste le plus souvent impuissant contre les machines et les équipements, protégés par de simples murs pare-souffle. Après quelques heures de réparation et de déblayage, quelques jours au maximum, l'usine, le port, la gare, retrouvent leur rendement habituel.

Face à ce constat sans appel, le premier réflexe est de bombarder à saturation, d'augmenter la quantité de projectiles largués. Cette méthode, dite du "tapis de bombes", entraîne cependant un extraordinaire gaspillage de munitions, en plus de mobiliser un nombre sans cesse croissant de bombardiers, qui aboutira aux célèbres "raids de mille avions", dont la magie du chiffre masque bien souvent l'inefficacité pratique.

On peut aussi accroître la taille - et donc le poids - des bombes elles-mêmes, en se disant qu'une seule bombe plus grosse et plus lourde causera davantage de dégâts que dix bombes légères. Dans cette discipline très particulière, les Britanniques sont les spécialistes incontestés, avec leurs "Tallboy" de 5.4 tonnes, et leurs "Grand Slam" de 10 tonnes,... qui nécessitent tout de même des Lancaster spécialement modifiés, et très vulnérables.

La "Grand Slam" pulvérise théoriquement un quartier d'habitations en entier, mais est trop difficile à fabriquer et à transporter pour devenir une arme d'usage courant.

Du reste, dès 1936, les Allemands ont testé, et développé, une méthode bien plus économique pour détruire les villes...

dimanche 13 mars 2005

735 - copier n'est pas jouer

... Le 8 août 1941, pour répondre aux premiers bombardements de Moscou par la Luftwaffe allemande, des bimoteurs DB-3 s'en prennent à la capitale du Reich, n'y causant que des dégâts insignifiants.

Le premier bombardement par des Pe-8, deux jours plus tard, est encore plus anodin. Sur les 10 quadrimoteurs prévus pour le raid, seuls quatre parviennent à prendre l'air avant que les autres départs ne soient annulés suite à l'écrasement d'un Pe-8 au décollage.

Et un seul parvient à rentrer à sa base après la mission.

Jusqu'à la fin du conflit, les Pe-8 n'en continueront pas moins leur guerre dans l'anonymat et l'ombre des grands raids britanniques et américains.

Incapable de lui fournir un successeur, et de le produire en nombre suffisant, l'industrie soviétique jugera finalement plus avantageux - et surtout plus pratique - de copier intégralement, et illégalement, le B29 américain, dont plusieurs exemplaires ont dû effectuer des atterrissages forcés en Sibérie au retour de missions sur le Japon.

Si les autorités soviétiques consentiront à libérer les aviateurs américains, elles refuseront en revanche de restituer les avions, qui seront démontés jusqu'au dernier boulon, puis copiés, afin de donner naissance au Tupolev TU-4, qui effectuera son premier vol, le 3 juillet 1947, trop tard pour bombarder la moindre ville allemande ou japonaise.

Quant aux Pe-8, bombardiers insignifiants malgré leurs dimensions respectables, la plupart seront finalement convertis en avions de transport, à l'image de celui qui convoya le ministre Molotov de Moscou jusqu'à Washington, en mai 1942.

Un voyage interminable, effectué dans des conditions dantesques : le Pe-8 n'étant ni chauffé ni pressurisé, Molotov et sa suite durent supporter, des heures durant, vestes fourrées et masques à oxygène, par des températures qui descendirent jusqu'à moins 40 degrés...

samedi 12 mars 2005

734 - les faucons rouges

... Joseph Staline appelle ses aviateurs "Mes Faucons". Une marque d'affection qui ne l'empêche pourtant pas de les sacrifier par nichées entières dès le début de l'invasion allemande.

Si l'aviation d'assaut soviétique - et en particulier ses Petliakov Pe-2 et autres Iliouchine Il-2 "Shtourmoviks" - est "aussi indispensable à l'Armée rouge que l'air qu'elle respire et le pain qu'elle mange" (Saviez-vous que... no 565), c'est peu dire des rares Petliakov Pe-8 qu'ils ne jouent aucun rôle dans le conflit.

Intrinsèquement, le Petliakov n'est pourtant pas un mauvais avion, mais la priorité de l'industrie aéronautique étant toute autre, le seul et unique quadrimoteur stratégique russe ne sera construit qu'à... 93 exemplaires (!)

Un chiffre ridicule si on le compare aux quelques 16 000 quadrimoteurs que les Britanniques produiront à eux seuls durant la guerre.

Fabriqué au compte-gouttes, et aligné en nombres insignifiants - jamais plus de 32 exemplaires à la fois - le Petliakov ne peut évidemment causer grand tort aux villes allemandes qu'il s'obstine pourtant à bombarder pour plaire au camarade Staline, lequel entend bien venger au centuple les bombardements sur Moscou, opérés par la Luftwaffe allemande dès le 22 juillet 1941...

vendredi 11 mars 2005

733 - le retour sur terre

... si la guerre se termine en Europe sans que le B29 n'y prenne part, dans le Pacifique, en revanche, l'avion a tout le loisir d'incinérer les villes japonaises les unes après les autres, et de balayer les faibles défenses que le Japon peut encore dresser contre lui.

Bombardier parfait pour son époque, le B29 vole en effet trop haut et trop vite pour la plupart des chasseurs nippons dont les moteurs, généralement dépourvus de turbocompresseurs, s'époumonent en vain à tenter de le rattraper. Et quand ils y parviennent - ce qui est fort rare - le puissant armement télécommandé de l'avion ne leur laisse de toute manière que peu de chances de survie.

En désespoir de cause, nombre de pilotes japonais opteront, là encore, pour la technique des kamikazes, éperonnant les bombardiers américains avec leurs propres appareils, et s'écrasant avec lui sur les villes japonaises en flammes...

Au lendemain d'Hiroshima et de Nagasaki, le binôme B29 / bombe atomique passe pour l'arme absolue, celle qui mettra immédiatement fin à tous les conflits.

Hélas, la guerre de Corée, quelques années plus tard, sonnera le glas des illusions. Contraints de renoncer à l'usage d'arme atomique, les B29 devront en revenir aux bombes classiques,... fort peu efficaces sur un pays rural, ce que les théoriciens du bombardement stratégique n'avaient pas prévu.

Rattrapés par les avions à réaction, les Boeing B29 se verront de surcroît contraints de ne plus opérer que de nuit - comme autrefois les bombardiers britanniques au dessus de l'Allemagne - sous peine de subir des pertes intolérables. Pour finir, on jugera plus sage de les retirer du Front et de les transformer en avions de guerre électronique, ou en ravitailleurs hélas bien trop lents pour les avions qu'ils sont censés ravitailler

A peine devenue absolue, l'arme a déjà cessé de l'être..

jeudi 10 mars 2005

732 - la Superforteresse

... en 1938, alors que les premiers exemplaires de série des "forteresses volantes" B17 commencent à peine à sortir des chaînes de montage, les ingénieurs de Boeing sont déjà occupés à concevoir la relève et à donner naissance au premier véritable bombardier stratégique moderne, un avion non seulement capable de franchir l'Atlantique et de délivrer un chargement de bombes de plus de 6 tonnes, mais aussi de croiser à plus de 600 kms/h, et à des altitudes supérieures à 8 000 mètres.

Pour l'époque, c'est un exploit à l'extrême limite du réalisable, sur lequel tous les constructeurs européens se sont d'ailleurs cassés les dents.

Premier bombardier pressurisé réellement opérationnel, muni de quatre tourelles télécommandées pour sa défense, le B29 est un véritable monstre qui, avec ses 35 tonnes à vide, est presque 50% plus lourd qu'un B17 à pleine charge, et qui exige de quatre à cinq fois plus d'heures de travail par exemplaire produit.

De fait, les défis techniques sont si nombreux que la gestation de l'avion s'avèrera fort longue.

Ce n'est qu'en juin 1944 que le B29 pourra enfin concrétiser les espoirs que les partisans du bombardement stratégique avaient placé dans les "croiseurs aériens" au début des années 1920 : gagner la guerre en bombardant les villes ennemies du haut des airs.

En apprenant les caractéristiques du Boeing B29, en 1944, les responsables allemands ont d'ailleurs dû convenir que même leurs nouveaux canons de 128mm anti-aériens, qui viennent à peine d'entrer en service, seront incapables de protéger les villes du Reich contre des appareils volant à pareilles vitesses et altitudes.

L'arme enfin absolue...

mercredi 9 mars 2005

731 - du mythe à la réalité

... les choix techniques différents opérés entre Britanniques et Américains - et qui perdureront tout au long de la guerre - ne pouvaient qu'amener à la création d'avions extrêmement différents eux aussi.

Là où les Lancaster, Halifax ou Sterling britanniques transportent gaillardement leurs cinq à six tonnes de bombes, les pauvres Boeing B17 et Consolidated B24 américains doivent se contenter de la moitié.

En revanche, avec leurs huit mitrailleuses de 7.7mm, les sept membres d'équipage d'un Lancaster n'ont aucune chance face aux chasseurs allemands, qui se méfient en revanche davantage des treize mitrailleuses de 12.7mm, servies par les onze occupants d'un B17.

Malgré cela, les premiers raids américains menés de jour, dès 1943, se traduiront par de véritables catastrophes, qui feront l'effet d'une douche froide à tous ceux qui avaient cru au concept-même de "forteresse volante"

Ainsi, lors de l'attaque des usines de roulement à billes de Schweinfurth, le 14 octobre 1943, 60 B17, soit près de 30% des avions engagés, seront envoyés au tapis, ce qui poussera la "Mighty Eigth" (la 8ème Air Force américaine) à renoncer non seulement à s'en prendre à Schweinfurth, mais aussi à exiger en priorité absolue, un chasseur d'escorte à long rayon d'action, qui n'arrivera hélas qu'en 1944, sous les traits du North American P51 "Mustang"...

mardi 8 mars 2005

730 - le mythe des forteresses volantes

... "The Bomber comes through", avait déclaré Stanley Baldwin, Premier ministre britannique, avant le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale.

Et de fait, lorsqu'ils avaient étudié, bien avant la guerre, leurs gros bombardiers quadrimoteurs, les ingénieurs britanniques, convaincus que leurs avions "passeraient" quoi qu'il arrive, avaient privilégié la charge utile (c-à-d la quantité et le poids des bombes transportées) au détriment de la protection du bombardier lui-même.

Hélas, les bombardiers britanniques comme le Short Stirling étaient si peu protégés (avec quelques ridicules mitrailleuses de 7.7mm) contre la chasse allemande qu'ils ne "passaient" en réalité que par miracle, et au prix de si lourdes pertes qu'il avait fallu se résoudre, dès le début des hostilités, à ne les employer que de nuit - donc dans de très mauvaises conditions de visée - sous peine de se retrouver rapidement avec une flotte réduite à néant.

A l'inverse de leurs cousins anglais, les Américains avaient quant à eux, et dès le départ, privilégié le concept de "forteresse volante", soit de l'avion à ce point truffé de mitrailleuses qu'il serait - du moins en principe - capable d'opérer de jour et de se défendre lui-même contre les appareils ennemis.

Les ingénieurs américains avaient donc délibérément sacrifié la charge utile au profit d'un lourd armement défensif, composé d'une multitude de mitrailleuses de fort calibre (12.7mm)

lundi 7 mars 2005

729 - l'éveil du géant

... au lendemain de la Première Guerre mondiale - la "der des der" - l'Amérique avait bien failli liquider sa force aérienne, et n'avait pas hésité à traduire Billy Mitchell en conseil de guerre pour "irrespect et insubordination" alors que ce dernier avait pourtant démontré, et à plusieurs reprises, qu'aucun cuirassé - aussi puissant fut-il - ni aucune ville - aussi éloignée fut-elle - n'était désormais à l'abri de l'arme aérienne.

Dix ans après la condamnation de Billy Mitchell (janvier 1926), l'Amérique découvrit, grâce aux images de la Guerre d'Espagne, qu'elle pourrait bien elle aussi se retrouver un jour victime de bombes lancées depuis des avions,... ce qui était d'autant plus fâcheux que son aviation de combat était pour ainsi dire inexistante, isolationnisme oblige.

Les avionneurs américains possédaient certes maints projets d'avions nouveaux dans leurs cartons, mais, faute d'argent, la plupart n'avaient jamais dépassé le stade de la planche à dessin.

Heureusement, la montée des périls et, surtout, les commandes européennes placées aux États-Unis, finirent par débloquer la situation, et transformèrent le nain américain en géant aéronautique qui, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, avait laminé tous ses compétiteurs et dominait à présent tous les domaines du vol.

S'ils se lancèrent, comme tout le monde, dans les bombardiers légers et moyens, mono ou bimoteurs, les Américains, qui devaient composer avec les énormes distances de leur territoire, comprirent très vite l'intérêt des gros bombardiers quadrimoteurs, de ces "croiseurs aériens" capables - du moins en théorie - de remplacer avantageusement les divisions blindées et les flottes de cuirassés et de remporter, dans les airs, des guerres qu'on n'aurait plus besoin de mener au sol ou sur la mer.

dimanche 6 mars 2005

728 - les briquets volants














... faute d'aluminium et d'alliages à haute résistance, les Japonais devront bientôt se résoudre à construire leurs chasseurs et bombardiers avec des produits de substitution, beaucoup moins solides. Faute d'essence, les essais des nouveaux moteurs seront bâclés, et les mélanges réglés beaucoup trop pauvre.

La production elle-même devra être déménagée en catastrophe, sous les bombes, et confiée à une multitude de petits sous-traitants sous-équipés.

Il en résultera d'innombrables accidents, au sol comme en plein ciel, une diminution dramatique de la qualité des avions, et des taux d'indisponibilité du matériel sans équivalent dans toute la 2ème Guerre mondiale.

... "[les bombardiers américains] ne s'enflammaient que très rarement", résuma le capitaine Kofukuda après la guerre. "Ils étaient en outre défendus par de nombreuses mitrailleuses lourdes qui gênaient considérablement nos avions. (...) leur capacité de résistance fut toujours une source d'étonnement pour nos pilotes (...) Nous ne pouvions leur comparer que nos propres G4M-1 qui, eux, s'enflammaient si facilement sous les coups des chasseurs ennemis que nous les avions surnommés "cigares" ou "briquets volants"

(...) Le pire restait encore à venir avec le Boeing B29 (...) l'ennemi disposait d'un engin capable d'attaquer le coeur de l'empire sans escorte. En dépit des efforts déployés par nos chasseurs, les équipages américains savaient que, statistiquement, ils avaient plus de chances de rentrer indemnes que d'être abattus au dessus du Japon. Pour nos propres équipages de bombardiers, cette statistique s'inversa dès octobre 1942, à Guadalcanal".

samedi 5 mars 2005

727 - une industrie à la traîne

... à l'image de l'Italie, le Japon est certes en mesure d'élaborer de fort beaux avions, mais pas d'en fabriquer ni d'en mettre suffisamment en oeuvre pour remporter la guerre du bombardement stratégique.

Si le Japon parviendra malgré tout à produire quelque 10 000 bimoteurs de combat - chiffre élevé dans l'absolu mais très inférieur aux 22 000 bimoteurs et 30 000 quadrimoteurs fabriqués aux États-Unis durant la même période - il ne sera par contre en mesure d'en lancer une centaine sur un seul et même objectif que... dans la première semaine de la guerre (!)

Là où chaque raid américain ou britannique mobilise plusieurs centaines, voire un millier de bombardiers à la fois, qui peuvent donc bombarder à saturation un objectif déterminé, les raids japonais rassemblent rarement plus d'une trentaine d'avions en même temps, qui ne peuvent donc causer de gros dommages.

Là encore, les succès faciles remportés en Chine - notamment lors des bombardements opérés sur Shangaï ou Nankin - ont trop longtemps fait illusion.

Contre le rouleau compresseur américain, les bimoteurs japonais comme le Mitsubishi KI-21 "Sally", toujours engagés en nombre ridiculement faible, iront tout bonnement à l'abattoir, en plus d'être rigoureusement incapables de s'en prendre aux villes américaines.

Ils s'avéreront de surcroît d'une fragilité déconcertante.

Trop légers, généralement dépourvus de blindage et de réservoirs auto-obturants, les bombardiers nippon vont très vite devenir des proies faciles pour leurs adversaires américains.

La situation s'aggravera encore lorsque les sous-marins américains seront en mesure de couper les lignes d'approvisionnement nippones, et les bombardiers de ravager les usines d'armements du Japon continental...

vendredi 4 mars 2005

726 - trop peu, trop tard

... face aux villes polonaises faiblement protégées, et aux villes belges, hollandaises ou françaises carrément évacuées, les bimoteurs allemands feront longtemps illusion.

Mais quand ils devront s'en prendre à des villes comme Londres, Leningrad ou Moscou, âprement défendues par quantités de chasseurs adverses, les Dornier 17, Junkers 88 et autres Heinkel 111 avoueront clairement leurs limites, se retrouveront dépassés par l'ampleur de la tâche, et subiront de lourdes pertes.

Et quand la décision finira par s'imposer de recourir, à l'image des anglo-américains, à de gros bombardiers (tels le Heinkel 177), l'Allemagne n'aura plus le temps de les étudier, les ressources pour les produire ou, tout simplement, les moyens de la fiabiliser et de les mettre en oeuvre.

Seuls quelques centaines de Heinkel 177, et une poignée de Junkers 290, entreront donc en service, sans grands résultats.

Pendant ce temps-là, la Grande-Bretagne à elle seule aura construit plus de 16 000 bombardiers quadrimoteurs, qui auront transformé l'Allemagne en amas de ruines fumantes...

jeudi 3 mars 2005

725 - la servitude de la Luftwaffe

... ayant rasé Guernica en 1937, et ravagé Varsovie en 1939, la Luftwaffe allemande semble la mieux à même de remporter la guerre moderne, celle qui sera gagnée dans les airs, par des bombardiers stratégiques capables de soumettre - et à défaut d'annihiler - les villes de l'adversaire.

Malgré la volonté de ses chefs - et en premier lieu d'Adolf Hitler lui-même - malgré des milliers d'avions produits, malgré plusieurs "premières mondiales" - comme les bombardements incendiaires des villes et villages au moyen de bidons au mélange huile/essence, ancêtres du napalm (Espagne, 1936), ou les multiples raids "de terreur" opérés tant sur Varsovie que sur Rotterdam, Londres, ou encore Leningrad - ce ne sera pourtant pas le cas.

Fondamentalement, la Luftwaffe demeurera en effet une aviation de servitude, opérant aux ordres et en soutien direct de l'armée de terre tout au long de la guerre.

Et pour assurer ce soutien, c-à-d pour procéder à des bombardements tactiques et non pas stratégiques, mieux vaut de petits bombardiers bimoteurs polyvalents - comme le Dornier 17 - agiles, faciles à construire et à mettre en service, plutôt que de gros quadrimoteurs complexes, patauds et fort coûteux.

C'est du moins l'opinion d'Adolf Hitler, qui s'intéresse bien moins à la taille des avions allemands qu'au nombre d'avions que l'Allemagne est en mesure de construire quelle que soit leur taille.

Ce sera aussi une erreur tragique.

mercredi 2 mars 2005

724 - To Hell and Back

... Traqués par les projecteurs, canonnés par la flak, mitraillés par les chasseurs adverses, bourrés aux amphétamines entre les vols, les sept hommes - moyenne d'âge : 20 ans - d'un bombardier Lancaster ont une espérance de vie qui ne dépasse pas onze missions.

C'est un "To Hell and Back", dans lequel chacun s'efforce de faire son boulot, convaincu que celui-ci abrégera la guerre et lui permettra de rentrer chez lui le plus rapidement et le plus intact possible.

Pas question de "remords du guerrier". C'est une invention moderne, anachronique. Lorsqu'il largue un "cookie" de 2000 litres de méthanol sur une ville allemande, le pilote de Lancaster sait très bien qu'il va carboniser bien davantage de civils que de membres actifs de la Waffen SS.

Il sait aussi que s'il se retrouve contraint de sauter en parachute au dessus de l'Allemagne, il passera, au mieux, le reste de la guerre dans un stalag ou, au pire, se fera carrément lyncher par une population allemande fort mal disposée à son endroit...

Et pas question non plus de "dummy run". L'équipage qui ne trouve pas sa cible du premier coup ne recommence pas une approche héroïque, comme on le lui a pourtant appris à l'entraînement. Il se cherche immédiatement un objectif secondaire sur lequel larguer ses trois ou quatre tonnes de bombes.

Et s'il ne le trouve pas non plus, il largue sa cargaison au petit bonheur pour rentrer le plus vite possible, et en un seul morceau, en Angleterre...

mardi 1 mars 2005

723 - des pertes stupéfiantes

... La nuit, à l'altitude où ils évoluent, les bombardiers britanniques comme le Short Stirling - qui ne sont ni pressurisés ni chauffés - se transforment rapidement en de véritables glacières, obligeant leurs équipages à porter des heures durant vestes fourrées, gants et masques à oxygène, par des températures qui atteignent souvent les - 30 degrés.

Formidablement inconfortables, ouverts à tous les vents, poussifs (450 km/h de vitesse maxi... pour les plus rapides d'entre eux), et aussi bien trop vulnérables à la chasse comme à la DCA ennemies, les bombardiers se révèlent de surcroît des pièges mortels pour leurs occupants.

C'est ainsi que sur les 125 000 aviateurs qui endossèrent l'uniforme du Bomber Command de 1940 à 1945, 55 000 furent tués au combat, et 20 000 blessés ou faits prisonniers, ce qui représente une perte de 60% des effectifs, qui ne fut dépassée durant la guerre que par les équipages des sous-marins allemands (!)

Au sol, les victimes allemandes, civiles et militaires, se montèrent à quelque 500 000 personnes, soit environ 1.5% de la population urbaine allemande...